Le Père Garrigou-Lagrange (1877-1964) a illustré pendant des décennies l’Ordre des prêcheurs, les fameux dominicains, notamment à travers la publication de vingt-trois ouvrages et de plus de six cents articles. Aussi à l’aise en théologie fondamentale qu’en théologie spirituelle – il est l’auteur de plusieurs ouvrages de spiritualité –, le Père Garrigou-Lagrange fut notamment l’ami de Jacques Maritain dont il empêcha certainement la condamnation et qu’il n’a pas suivi dans ses options de philosophie politique. Depuis la victoire de la « nouvelle théologie », il est considéré avec mépris et dédain par les théologiens contemporains, et même par certains thomistes. Il semble que seuls les séminaires traditionnels s’appuient encore sur son enseignement.
Ses livres n’étant plus disponibles – à l’exception d’un petit traite édité chez DMM par la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier (Les trois conversions et les trois voies) – les éditions Nuntiavit ont réédité son célébre ouvrage Le Sens commun, la philosophie de l’être et les formules dogmatiques (242 pages, 15€). C’est un livre de base qui entend répondre aux grandes questions posées par le modernisme, et ce dans un esprit strictement thomiste. C’est ce que sous-tend cette étude sur la nature du sens commun et sur sa valeur.
Dans une première partie, l’auteur définit ce qu’est le sens commun, puis s’attache à réfuter la théorie nominaliste du sens commun avant de présenter la théorie conceptualiste-réaliste du sens commun. Dans une deuxième partie, il n’omet pas de présenter également la critique moderniste des preuves thomistes de l’existence de Dieu puis de répondre à ces différentes critiques avant de consacrer la troisième partie au rapport entre sens commun et formulation dogmatiques.
Même si certaines discussions peuvent paraître un peu datées (le livre reproduit la troisième édition de cet ouvrage qui date de 1922), il s’agit d’une étude à connaître et dont on peut tirer son miel.
Bonjour,
Merci pour l’info !
Je rebondis sur cette phrase :
Depuis la victoire de la « nouvelle théologie », il est considéré avec mépris et dédain par les théologiens contemporains, et même par certains thomistes. Il semble que seuls les séminaires traditionnels s’appuient encore sur son enseignement.
L’inverse est également vrai. Pire ça n’est pas le dédain qui l’emporte côté “tradi” contre ce qui entre plus ou moins dans cet ensemble-valise qu’est la “nouvelle théologie”, c’est carrément le soupçon d’hérésie.
Il est effectivement triste que de telles rancœurs existent, et perdurent, de chaque côtés.
On devrait pouvoir lire Garrigou-Lagrange avec autant de tranquillité d’esprit que Gilson. C’est sans doute le meilleur témoignage que l’on puisse faire à Thomas qui ne s’est jamais prétendu l’Alpha et l’Omega de la théologie.
Le sens commun, notion fondamentale dans la solide philosophie réaliste, voici comment le définissait le P.Garrigou-Lagrange op:
“Le sens commun est la solution confuse, mais certaine et strictement suffisante au commun des hommes, des principales questions métaphysiques, morales et religieuses.”
Et voici maintenant la définition donnée par Jaime Balmes op (philosophe espagnol thomiste) au XIX° siècle:
” Tout le monde entend par sens commun un certain nombre de principes et de notions évidentes par elles mêmes où tous les hommes puisent les motifs de leurs jugements et les règles de leur conduit.”