Jeudi dernier, au matin, le pape Benoît XVI a reçu en audience privée une nouvelle délégation de prélats américains en visite ad limina à Rome. Cette délégation était constituée de Mgr Edwin F. O’Brien, administrateur apostolique de l’archidiocèse de Baltimore, le premier diocèse catholique des États-Unis. Le prélat avait été nommé archevêque de Baltimore le 1er juillet 2007, mais sa nomination par Benoît XVI de pro grand maître de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem, lui a conféré le statut d’administrateur apostolique dans l’attente d’une nomination du nouvel archevêque de Baltimore. On rappellera ici que Mgr O’Brien est désormais cardinal désigné : il recevra la pourpre cardinalice lors du consistoire du 18 février prochain. Le prélat était accompagné des deux évêques auxiliaires de Baltimore, NN.SS. Mitchell T. Rozanski et Denis J. Madden.
Le prélat était également accompagné de quatre évêques des diocèses suffragants de Baltimore : NN. Paul S. Loverde d’Arlington (Virginie), Francis X. DiLorenzo de Richmond (Virginie), Michael J. Bransfield de Wheeling-Charleston (Virginie Occidentale) et William F. Malooly de Wilmington (Delaware).
Dans son discours aux évêques américains, Benoît XVI a mis en garde contre les atteintes à la liberté religieuse aux États-Unis. Voici extraits principaux de son allocution.
Plus ou moins perçue, chaque culture a un point de vue spécifique sur la nature du bien et du mal, et donc sur ce qu’est le bien-être de l’homme. Ce ressenti, gravés dans les textes fondateurs des États-Unis, plonge ses racines sur une conception du monde fondée sur la foi, mais aussi sur des principes éthiques découlant du Dieu de la nature. Mais ces principes sont aujourd’hui fortement érodés par de puissants courants culturels qui s’opposent frontalement aux principes moraux judéo-chrétiens, et sont de plus en plus hostiles au christianisme (…) À temps et contretemps, l’Église des États-Unis doit annoncer l’Évangile, et proposer ses vérités morales immuables qui sont indispensables au bonheur social et personnel (…) Avec sa longue tradition de respect du juste rapport entre foi et raison, l’Église a un rôle critique à jouer contre des courants qui, au nom d’un individualisme effréné, entendent promouvoir une liberté distincte de la morale. Elle doit défendre un raisonnement moral fondé sur la loi naturelle, qui n’est pas une menace de notre liberté mais un langage permettant de comprendre notre être, et sur lequel on peut bâtir un monde plus juste et plus humain (…) Le témoignage de l’église, qui est aussi de nature publique, entend convaincre au moyen d’arguments rationnels. La juste séparation de l’Église de l’État ne peut être interprété comme un devoir de silence face à certains sujets, ni que l’État n’ait pas à entendre ce que les chrétiens ont à dire sur ce qui décidera le sort de la société.
À la lumière de ces considérations, il est impératif que la communauté catholique des États-Unis ait conscience des graves périls que court le témoignage public de l’Église en matière morale, face à un laïcisme radical croissant dans le monde politique et social (…) On doit s’inquiéter de certains projets tendant à limiter la première des libertés de l’Amérique, la liberté de religion. Beaucoup d’entre vous m’ont signalé des tentatives de rejeter le droit à l’objection de conscience de fidèles ou d’institutions catholiques face à des pratiquement intrinsèquement mauvaises, ainsi qu’une tendance croissante préoccupante à réduire la liberté religieuses à l’exercice du culte, sans garantie de la liberté de conscience (…) On a donc besoin d’un laïcat catholique bien formé et courageux, au fort sens critique de la culture dominante, qui se dresse face à un sécularisme réductif qui voudrait délégitimer la participation de l’Église au débat public sur les questions fondamentales (…) Je tiens à saluer vos efforts pour maintenir le contact avec les fidèles qui se consacrent à la politique, afin de les renforcer dans leur responsabilité personnelle face aux choix et dans celle de témoigner de leur foi publiquement, en particulier dans le respect des grands principes que sont la défense de la vie (…), la dignité de la personne, la diffusion des droits humains véritables (…) Toute personne réaliste ne peut ignorer les difficultés actuelles de l’Église. Mais ceci ne doit pas nous empêcher de croire nécessaire la préservation d’un ordre social enraciné dans la tradition judéo-chrétienne, et de croire dans une nouvelle génération de catholiques dont l’expérience et les convictions seront décisives pour maintenir et raviver le témoignage de l’Église dans la société américaine. Ces signes des temps doivent encourager une mobilisation les forces intellectuelles et morales de la communauté catholique au service de l’évangélisation de la culture et de la civilisation de l’amour.