À 55 ans, Monseigneur David M. O’Connell, prêtre de la Congrégation de la Mission
(C.M.), quittera en août prochain la présidence de la prestigieuse Catholic University of America (CUA), la seule université pontificale des
États-Unis, fondée en 1887 à Washington, D.C.
Quand il fut élu à l’unanimité en 1998, à l’âge de 42 ans !, et parmi une centaine de candidats, 14ème président de la CUA, l’institution était au bord de la ruine :
minée par la dissidence 1, ayant perdu son identité catholique et la confiance des évêques américains.
Monseigneur O’Connell, non sans difficultés, lui aura rendu en douze ans une véritable identité catholique. Parangon de l’application de l’instruction romaine Ex
Corde Ecclesiæ de 1990, qui devrait être la norme de tout établissement d’éducation supérieure catholique, O’Connell – dont on parle beaucoup aux États-Unis comme
évêque possible, une rumeur que l’intéressé ne dément pas – va prendre une année sabbatique dans une maison de la Congrégation de la Mission du New Jersey, pour écrire un ouvrage
sur ce taraudant problème de l’identité catholique mis à mal par trop d’établissements d’enseignement supérieur américains qui se disent “catholiques” mais suivent en fait la déclaration de
Land O’Lakes 2.
Je vais le dire un peu familièrement : Monseigneur O’Connell n’a pas “digéré” le scandale de l’université de Notre Dame, en mai de l’an dernier – vous trouverez
des dizaines d’articles consacrés à ce scandale sur ce blogue.
Il y a fait allusion dans son allocution du samedi 15 mai dernier, à l’occasion de la cérémonie de remise des grades universitaires aux 1 400 diplômés de la 141ème promotion de la
CUA : de ce scandale « Notre Dame n’en a pas souffert. Au vrai, Notre Dame a en tiré bénéfice ».
Il s’en est ouvert plus avant au quotidien The Washington Times mercredi dernier :
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« Obama est venu à Notre Dame et tout le monde s’est affolé. 80 évêques en ont
rajouté, disant qu’une pareille chose ne se pouvait. Le Président est venu et il a prononcé son discours. [L’université] a tourné le dos à un millier de ses étudiants, mais elle continue à
recevoir un million de dollars de dons. Elle honore le nonce (…) Elle est revenue dans les bonnes grâces de l’Église. C’est quoi le résultat de tout ça ? Nous n’avons pas tiré au clair la
signification de ces choses… »
En mars de cette année, Monseigneur O’Connell était à Rome où il a pu s’entretenir pendant plus d’une
heure avec le cardinal Zenon Grocholewski, le préfet de la Congrégation pour l’éducation catholique :
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« Je voulais avoir une discussion avec lui sur l’identité catholique et la fameuse déclaration de Land
O’Lakes dont je pense qu’elle a introduit de la confusion dans la communauté de l’enseignement supérieur catholique, en tant qu’alternative à Ex Corde
Ecclesiæ (…) J’aimerais que le Saint Siège dise que Ex Corde est la norme, pas Land O’Lakes. Qualifier Land O’Lakes de
source vigoureuse pour l’éducation catholique est une tromperie ». Mais le Saint Siège se refuse à publier une clarification sur ce sujet selon O’Connell : « Ils furent très
attentifs. Mais leur réponse globale fut que c’était là une affaire locale, que c’était aux évêques des États-Unis de s’en occuper et que cela ne demandait pas l’intervention du Saint Siège. »
Il y a un groupe de travail à la Conférence épiscopale consacré à l’identité catholique dans l’enseignement supérieur, mais, précise O’Connell « où sont allées ses conclusions
et à quoi elles ressemblent, je n’en sais rien… »
Je dois dire que je serais très curieux de lire l’ouvrage que se propose d’écrire Monseigneur
O’Connell…
1. Le prêtre et théologien dissident Charles Curran y enseigna jusqu’en 1986 : c’est lui qui avait mené en 1968 une fronde de 600 théologiens
contre Humanæ Vitæ de Paul VI.
2. Cette déclaration fut notamment signée en 1967, à Land O’Lakes dans le Wisconsin, par 26 présidents d’universités catholiques qui proclamèrent leur autonomie de l’Église au nom de la « liberté
académique ».