Le droit européen l’exige, l’idéologie de la non-discrimination a enfoncé le clou : un couple « gay » néerlandais, « marié » en 2000 à Leyde (Pays-Bas), a obtenu en plusieurs étapes la reconnaissance de son statut marital de la part du fisc français en vue de payer moins d’impôts.
C’est une affaire dont on a peu et discrètement parlé en 2008 lorsque Peterjan Leeman et Aad Van der Krogt ont obtenu de la direction générale des finances publiques du ministère du Budget la reconnaissance de la validité de leur mariage à l’étranger, même si le « mariage » homosexuel demeure interdit en France, ce qui leur a permis de demander une imposition commune.
Les deux hommes se sont installés en France en 2003. Après avoir acheté et réhabilité une grosse maison de campagne du XVIIIe siècle dans le Sud-Ouest, ils ont lancé une activité de chambres d’hôtes de luxe. Techniquement considérés comme célibataires, et donc partenaires commerciaux, ils risquaient une double imposition au titre de leur affaire, expliquaient-ils en 2008 au journal néerlandais De Volkskrant.
Assistés de l’avocat parisien Alain Leclerc, ils ont entamé leurs démarches auprès du fisc français lors de leur première déclaration de revenus en 2006, pour se voir officiellement conseiller de se pacser. Impossible : une personne mariée ne peut s’engager dans un pacs… Au bout du compte, Me Leclerc a obtenu gain de cause en soutenant que toute discrimination selon la nationalité est interdite. Quant au ministère de l’Economie et des Finances, il devait finir par préciser par écrit que la France reconnaît les mariages légalement conclus à l’étranger, même entre personnes de même sexe.
Mais discrètement, alors…
Il est vrai qu’une directive de l’Union européenne (2004/38/CE) reconnaît, au nom de la liberté de circulation, des droits aux partenaires légalement unis dans un pays dans tous les autres pays de l’UE, et Viviane Reding, répondant à une question orale au Parlement européen en août dernier, confirmait que cette règle, renforcée par le principe de non-discrimination en raison de l’orientation sexuelle contenue dans la Charte des droits fondamentaux, devrait s’appliquer partout au bénéfice des couples homosexuels unis par un partenariat civil ou un mariage.
La France se soumet donc sans tambours ni trompettes, et aux dires du couple néerlandais, ils sont loin d’être seuls à avoir saisi le fisc d’une telle affaire et pas non plus seuls à avoir vu leur droit reconnu.
De fait, Leeman et Van der Krogt, aujourd’hui âgés de 56 et 55 ans, ont obtenu une victoire supplémentaire en 2010, le fisc ayant concédé une reconnaissance encore plus large de leur mariage, étendue désormais à tous les aspects de la fiscalité, y compris la succession.
Question : quid si des couples homosexuels français se « marient » dans un pays où cela est légal ? La réponse a été donnée en 2006 par le garde des Sceaux : le mariage homosexuel étant interdit en France, dès lors qu’un au moins des deux partenaires impliqués est français, le « mariage » ne sera pas reconnu.
Ce dernier point changera, peut-être, avec la décision du Conseil constitutionnel sur le mariage homosexuel, attendue pour le 28 janvier…
Source : www.present.fr (Présent du 21 janvier 2011).