Cette affaire passionne la presse britannique qui y voit la preuve d’un interventionnisme étatique croissant, et de fait… Mme A, 30 ans, réputée avoir un QI de 53, a déjà eu deux enfants, deux bébés que les services sociaux de sa localité des Midlands lui ont arrachés et donnés à l’adoption au motif qu’elle serait incapable de s’en occuper. Elle s’est ensuite mariée, avec un homme réputé avoir un QI de 65, elle suit des cours et fait, comme son mari, du travail bénévole.
Il y a un an, les services sociaux ont estimé que Mme A. était victime de violences de la part de son mari et qu’en outre, il lui interdisait de prendre la pilule contraceptive parce qu’il voulait un enfant : le conseil local (« Council ») a donc décidé de lui imposer une contraception durable contre sa volonté. Et d’entamer une enquête selon les procédures de la « Cour de protection » qui a compétence pour juger des cas de « bien-être personnel » et prendre toute décision à cette fin. Il y a donc eu une série d’interrogatoires au cours desquels Mme A a dû répondre à des juristes, des médecins et des psychiatres pour déterminer son degré de capacité à comprendre quels étaient ses choix par rapport au contrôle des naissances et leurs implications.
L’affaire est finalement venue devant la Cour de protection où le Conseil local a soutenu que Mme A est incapable de comprendre ce qu’entraîne le refus d’utiliser la pilule ou un dispositif intra-utérin, ou de se rendre compte de ce qu’entraîne le fait d’élever un enfant.
Heureusement pour elle, son défenseur commis d’office (l’Official Solicitor chargé de défendre les personnes mineures ou incapables) a souligné qu’une telle argumentation conduirait un très grand nombre de femmes n’ayant jamais eu d’enfants à être jugées incapables d’en accueillir. Et le juge Bodey lui a donné raison en soulignant que le fait de laisser la collectivité juger si une femme y comprenait assez aux réalités pratiques de la maternité tournerait vite à « l’approche paternaliste » (ou plus exactement, dictatoriale).
Mais l’affaire ne s’arrête pas là. En effet, dans un premier temps, le Conseil local voulait soumettre Mme A à une procédure coercitive : on entendait venir la chercher sous la contrainte des forces de l’ordre, la soumettre à une anesthésie générale, puis lui installer une contraception de longue durée. Devant le tollé soulevé le Conseil a renoncé à demander au juge le droit d’utiliser la « force et la contrainte » tout en se réservant explicitement la possibilité de le faire par la suite.
Le juge a vu dans le recours à la force des relents de « stérilisation forcée et d’ingénierie sociale qui poseraient d’importantes questions sur l’intervention de l’Etat dans la vie privée et familiale », et l’a écarté qu’il soit réclamé ou non : « Je ne vois pas présentement comment cela pourrait être acceptable ».
Toutefois, en jugeant que Mme A était sous le coup de la contrainte de son mari, et qu’elle était elle-même incapable de prendre des décisions importantes sur les soins médicaux dont elle peut avoir besoin, n’a pas rejeté d’office le fond de la demande du Conseil local. Le juge Bodey s’est donc simplement lavé les mains de l’affaire : si le Conseil se voit interdire le recours à la force, il lui est loisible à l’avenir de déterminer, si Mme A tombe enceinte, si le couple est capable d’élever un enfant et d’effectuer alors « toute démarche qui convienne ».
Parmi ces décisions, il y a, par exemple, l’avortement.
La Cour de protection dont les pouvoirs ont été considérablement élargis par le gouvernement Labour, possède depuis la Loi « Capacité mentale » de 2005 le droit d’ordonner le retrait de traitements de survie, la mise en œuvre de traitements que le patient refuse (ainsi une femme atteinte de cancer et souffrant d’une phobie de l’hôpital et des aiguilles qui s’est vu imposer un traitement par le juge), la mise en œuvre de traitements « innovants » (ce qui peut faire utiliser des patients handicapés mentaux ou avec un faible QI comme cobayes), ou un avortement.
Jusqu’à une date assez récente la Cour de protection rendait des décisions secrètes mais elle s’est mise depuis cette année à publier des décision.
La mère de Mme A a contacté le Daily Telegraph pour dénoncer l’attitude des services sociaux qui n’ont jamais cherché à « aider » cette jeune femme et son mari qui vivent leur vie de manière indépendante et en rendant service autour d’eux, mais qui les « attaquent ». Sa fille, explique-t-elle, est « terrorisée » par ces travailleurs sociaux qui menacent de venir la chercher chez elle, de l’endormir et de la stériliser. Alors qu’elle a déjà eu « le cœur brisé » par le retrait forcé de ses deux premiers bébés.