Mgr Guyard prendra sa retraite dans 3 mois (il aura 75 ans le 19 juin). Il vient de publier sa dernière lettre épiscopale à l’occasion du Carême. Il y écrit notamment :
Il est clair, en effet, que si l’on s’en tient à une « pratique religieuse » déconnectée de la vie réelle, on tombe dans un formalisme qui la rend de plus en plus insignifi ante. Il n’est pas étonnant que ceux pour qui la foi n’est pas fondée sur une relation vivante avec le Christ, prennent de plus en plus de distance avec des gestes religieux qui leur paraissent superfl us. L’évolution de la participation à la messe du dimanche est assez éclairante sur ce point. De nombreuses personnes se déclarent pratiquantes en se contentant d’une messe mensuelle. Mais ce constat « en creux » permet à l’inverse de voir se lever une autre manière de vivre la foi et de la situer au coeur même de la vie. Les catéchumènes en sont l’exemple le plus évident. Leur rencontre du Christ transforme réellement leur vie. Pour eux, être chrétien, c’est une manière nouvelle de vivre dans le monde et de se situer par rapport aux autres qu’ils découvrent être des frères. Mais ils comprennent vite que cette relation au Christ doit rester vivante pour apprendre peu à peu à penser et vivre à sa manière. Elle suppose que l’on prenne les moyens concrets de l’entretenir. C’est une exigence, mais en même temps un vrai chemin d’épanouissement et de liberté. On constate d’autre part le développement de nombreux « groupes de prière » dans lesquels se retrouvent des chrétiens soucieux de raviver en eux le souffl e de l’Esprit-Saint.
On a peut être trop souvent et trop longtemps opposé action et contemplation en considérant un peu hâtivement que la priorité devait être accordée à l’action au nom du primat de l’amour du prochain. Mais par là même, on brisait l’unité fondamentale du véritable comportement chrétien. Prétendre aimer Dieu sans aimer ses frères, c’est mentir nous le rappelle s. Jean. Mais il est tout autant mensonger de prétendre se consacrer totalement aux autres si l’on ne puise pas sa force dans l’amour de Dieu. Il semble bien que nous soyons en train de le vérifi er dans le monde d’aujourd’hui. La complexité des problèmes que nous devons affronter pour sauvegarder la dignité de l’homme comme image de Dieu et frère de tous les autres, exige une sérieuse réfl exion sur le sens de la vie tel que nous l’a révélé le Christ et un solide ancrage dans la foi. Nous risquons en effet, si nous n’y prenons garde, soit de déserter le monde par dépit, soit de nous y laisser engloutir. Deux attitudes qui ont pour point commun de renoncer à la mission qui est la nôtre en tant que baptisés, c’est-à-dire être des témoins de la Bonne Nouvelle. La vie spirituelle n’est pas une part de notre vie séparée de l’ensemble de nos activités. C’est toute la vie qu’il s’agit d’animer par l’Esprit-Saint. La vie spirituelle est le lien entre la foi et la vie qui nous permet concrètement de mettre en oeuvre le déploiement de notre humanité et la construction du Royaume de Dieu.