Mgr Ravel, évêque du diocèse aux armées, est interrogé par La Nouvelle République à propos du rapport d’un aumônier militaire, très critique à l’égard de la hiérarchie militaire, en raison de son attitude islamophile en Afghanistan :
Ce rapport est le ressenti du prêtre, mais j’ai demandé à l’autorité militaire d’enquêter sur la réalité de certains faits qui, soit découlent de directives – et c’est inquiétant -, soit sont de mauvaises interprétations de consignes, et cela mérite d’être corrigé. L’aumônier n’avait pas à être sanctionné, il ne l’a pas été. Et ce n’est pas lui qui a mis son rapport sur Internet ! […] Ce qui se passe à l’autre bout du monde ne peut pas nous laisser indifférents. Notre intervention en Afghanistan est, en soi, légitime, mais à condition que cela aide à faire mûrir un État stable, libre et respectant les droits de l’homme tant dans ses institutions que dans ses pratiques sociales.
La difficulté est, cependant, pour nos soldats, d’avoir le comportement juste : respecter la culture et la religion afghanes sans pour autant se mettre en position d’apostasie, ce qui ne nous ferait pas grandir aux yeux des musulmans. Je peux vous affirmer que la présence de nos aumôniers en Afghanistan est perçue comme un signe positif par bon nombre d’Afghans qui ont plus de respect pour des croyants que pour des gens sans Dieu. […]
Le contexte religieux de nos opérations militaires est nouveau. Après la mort des idéologies totalitaires, s’est réveillé un souci identitaire des religions qui tourne parfois à l’intégrisme, notamment hindou et islamiste. C’est très préoccupant. Nous ne pouvons donc pas faire l’impasse sur ce nouveau contexte religieux et notre société civile française, qui conçoit la laïcité comme une séparation de ce qui est religieux, doit reprendre sa réflexion et s’interroger. […]
Par exemple : autoriser la construction d’une mosquée avec ou sans minaret, est-ce la même chose ? Manger halal est-il une simple préférence alimentaire ? L’armée, reflet de la société, ne peut pas éviter non plus cette remise en question. Les chefs doivent donc mener une réflexion pointue afin de définir des consignes claires pour ceux qui sont sur le terrain. Car tout ne doit pas y être laissé à l’appréciation personnelle du chef d’unité. Je n’en connais pas les causes, mais il existe des exigences et requêtes communautaires nouvelles, y compris dans l’armée. Si les règles ne sont pas claires, il y aura des maladresses ou pire. Je pense qu’il ne faut pas mésestimer la portée religieuse de certains faits qui peuvent exacerber des ressentiments. Cela dit, nous avons des soldats musulmans français qui combattent en Afghanistan comme les chrétiens français le faisaient en 14-18 contre les chrétiens allemands. Et les soldats afghans sont des musulmans eux aussi !