De même que le général De Gaulle disait en 1965
“Bien entendu, on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant l’Europe ! l’Europe ! l’Europe ! mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien”,
certains épiscopes n’ont que “Vatican II” à la bouche, mais sans autre consistance qu’un certain “esprit” et surtout un cléricalisme abusif. Mgr Guido Pozzo, Secrétaire de la
Commission Pontificale Ecclesia Dei, a donné une conférence aux prêtres européens de la Fraternité Saint-Pierre le vendredi 2
juillet 2010. Il y dénonce cet esprit malsain autour du Concile Vatican II. Extraits :
“si vous lisez ou entendez une grande partie de ce qui a été dit par certains théologiens, certains célèbres, d’autres qui ne sont que des amateurs en théologie, dans une large production
littéraire catholique post-conciliaire, on ne peut pas ne pas être saisi par une tristesse profonde et éviter d’être sérieusement préoccupé. C’est vraiment difficile d’imaginer un plus
grand contraste existant d’une part entre les documents officiels de Vatican II, le Magistère postérieur des Papes, les interventions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, et
d’autre part, tant d’idées ou de déclarations ambiguës, douteuses et souvent contraires à la saine doctrine catholique, qui se sont multipliées dans des milieux catholiques […]
Quelle est l’origine de l’interprétation de la discontinuité, ou de la rupture avec la tradition?
C’est ce que nous pouvons appeler l’idéologie conciliaire, ou plus
exactement para-conciliaire, qui s’est emparée du Concile depuis le début, en se superposant à lui. Avec cette expression, on n’entend pas quelque chose qui regarde les textes du
Concile, ni l’intention des acteurs, mais le cadre général d’interprétation dans lequel le Conseil a été placé et qui agit comme une sorte de conditionnement intérieur de la
lecture successive des faits et des documents. Le Concile n’est pas l’idéologie para-conciliaire, mais dans l’histoire de l’événement ecclésial et des moyens de communication de masse, on
a largement opéré la mystification du Concile, ce qui est précisément l’idéologie para-conciliaire. Pour que toutes les conséquences de l’idéologie para-conciliaire soient
manifestées comme un événement historique, il fallait y vérifier la révolution de 68, qui prend comme principe la rupture avec le passé et le changement radical de l’histoire. Dans
l’idéologie para-conciliaire le mouvement 68 signifie une nouvelle figure de l’Eglise en rupture avec le passé. Un tel cadre d’interprétation générale, se superposant extrinsèquement au
Concile, peut se caractériser essentiellement par trois facteurs:
1) Le premier facteur est le renoncement à l’anathème, à savoir la nette contraposition entre l’orthodoxie et l’hérésie.
Au nom de la soi-disant «pastoralité» du Concile, on a fait passer l’idée que l’Eglise renonce à la condamnation de l’erreur, à la définition de l’orthodoxie contre l’hérésie. On
oppose la condamnation contre les erreurs et l’anathème prononcée par l’Eglise dans le passé sur ce qui est incompatible avec la vérité chrétienne, au caractère pastoral de l’enseignement du
Concile, qui maintenant n’entendrait plus condamner ou censurer, mais seulement exhorter, expliquer ou témoigner. […]
2) Le deuxième facteur est la traduction de la pensée catholique dans les catégories de la modernité. L’ouverture de l’Eglise aux besoins et aux exigences de la modernité (voir
Gaudium et Spes) est interprétée par l’idéologie para-conciliaire comme la nécessité d’une conciliation entre le christianisme et pensée philosophique et l’idéologie culturelle
moderne. Il s’agit d’une opération théologique et intellectuelle qui reprend en substance l’idée du modernisme, condamné au début du XXe siècle par saint Pie X.
La théologie néo-moderniste et séculière a essayé de rencontrer le monde moderne juste à la veille de la dissolution du «moderne». Avec l’effondrement en 1989 du socialisme réel, se
sont effondrés les mythes de la modernité et de l’irréversibilité de l’émancipation de l’histoire qui représentent les postulats du sociologisme et du sécularisme. Au paradigme de la
modernité succède aujourd’hui celui post-moderne du “chaos” ou de “la complexité pluraliste», dont le fondement est le relativisme radical. […] l’idéologie
para-Conciliaire estime que le message chrétien doit être sécularisé et réinterprété en fonction des catégories de la culture moderne extra et anti ecclésiale en compromettant son
intégrité, peut-être sous le prétexte d’un « ajustement approprié» au temps. Le résultat fut de séculariser la religion et de mondaniser la foi. […]
3) Le troisième facteur est l’interprétation de l’ « aggiornamento » du Concile Vatican II. Par le terme «aggiornamento », le Pape Jean XXIII a voulu indiquer
la tâche prioritaire du Concile Vatican II. Ce terme dans la pensée du pape et du concile n’exprime pas ce qui a été mis sous son nom dans la réception idéologique du post-concile.
“Aggiornamento” dans le sens du pape et du concile voulait exprimer l’intention pastorale de l’Eglise de trouver les moyens les plus adéquats et opportuns pour conduire la conscience civile du
monde d’aujourd’hui à reconnaître la vérité éternelle du message salvifique du Christ et la doctrine de l’Eglise. L’amour de la vérité et le zèle missionnaire pour le salut des hommes sont à la
base des principes de l’action “d’aggiornamento” voulue et pensée par le Concile Vatican II et le magistère pontifical successif.
Au contraire, pour l’idéologie para-conciliaire, largement encouragée par des groupes catholiques intellectuels néo-modernistes et les centres de mass-médias des pouvoirs temporels
séculiers, le terme «aggiornamento » a été conçu et proposé comme le changement radical de l’Eglise envers le monde moderne: de l’antagonisme à la réceptivité. […]”
Désormais, lorsqu’un évêqque justifiera une décision équivoque au nom du Concile Vatican II, il faudra lui demander s’il se réfère aux documents officiels ou si c’est le fruit pourri de
l’idéologie para-conciliaire.