Dans l’article d’Isabelle de Gaulmyn dont je parlais tout à l’heure, le plus intéressant tenait évidemment à l’analyse de la nouvelle stratégie des catholiques français… et au traitement qu’en faisait “La Croix”.
Mais il y a un autre point qui mérite qu’on s’y arrête. C’est la phrase du RP Henri Madelin, citée au détour d’un paragraphe:
« Les catholiques français ont longtemps intériorisé la laïcité. La nouvelle génération est plus attestataire. »
Je ne suis pas sûr que ce soit simplement une question de génération, mais il est clair que le problème central est bien là: comment comprenons-nous la distinction des pouvoirs spirituel et temporel?
Jusqu’à une date récente, les catholiques français – à commencer par leurs évêques – ont admis, non pas certes le laïcisme agressif, mais du moins la “laïcité à la française”, admirablement (et monstrueusement) résumée par Jacques Chirac:
« Non à une loi morale qui primerait sur la loi civile! »
Les évêques avaient, par la voix du cardinal Ricard, alors président de la conférence épiscopale, donné leur accord de principe (je renvoie pour les références à un article que j’ai écrit ici voici plus de 6 mois):
« Toutes les composantes religieuses doivent avoir droit de cité, publiquement, à la condition de savoir aussi donner leur place aux autres et de ne pas se mettre en contradiction avec les grands principes de la République. »
C’est évidemment plus positif que la phrase de Chirac, mais c’est acepter le principe lui-même. Qui est du totalitarisme tout pur! J’avoue d’ailleurs que je ne comprends comment la “grosse presse” et les politiques peuvent passer leurs journées à dénoncer le national-socialisme, qui a tout de même cessé ses exactions depuis plus de 60 ans, alors que, dans leur immense majorité, ils adhèrent aux principes fondamentaux du totalitarisme!
Or, les choses changent, effectivement.
La stratégie indiquée par Benoît XVI, et pratiquée avec succès dans certains pays (que l’on songe aux Etats-Unis ou à l’Espagne), des “points non négociables”, est en opposition frontale avec cette conception de la laïcité.
Pour moi, je le dis tout net, si je me sens aussi “à l’aise” avec le “lobbying” dont parle Isabelle de Gaulmyn, avec la logique “attestataire” dont parle le RP Madelin, ou – surtout – avec la stratégie de défense des “points non négociables” de Benoît XVI, c’est que je suis convaincu que les phrases de Chirac ou du cardinal Ricard sont l’exact inverse de la vérité. Ce qu’il faut dire, c’est au contraire:
“Non à une loi civile qui contredirait la loi morale!”
Ou encore:
“Les grands principes de la République doivent avoir droit de cité à la condition de ne pas se mettre en contradiction avec la loi naturelle [car ce qu’il y a de commun aux grandes “composantes religieuses”, c’est précisément la loi naturelle].”
Il faut effectivement choisir entre la laïcité “à la française” et les “points non négociables”. Pour moi, le choix est clair. Mais ce qui est nouveau, c’est que le choix semble aussi de plus en plus clair à certains évêques. Et je pense qu’il ne faut pas chercher plus loin l’origine des tensions au sein de la conférence épiscopale…
Bravo pour avoir si bien résumé la situation!
Merci pour cette belle mise au point. Au moins c’est clair !
Remarquez la chose étrange dans la phrase de Chirac. Cela signifie en filigrane que la loi civile serait au mieux amorale.
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Si la loi n’est pas appuyé à la morale, qui est la recherche de bien vivre, quel but poursuit-elle ? Qu’on se rappelle que le synonyme laïc de la “morale”, c’est “éthique”.
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Remarquez aussi que Chirac à l’époque n’avait pas critiqué une loi religieuse. Quand bien même l’Eglise ne fait que rappeler la loi naturelle, comme si justement précisé plus haut.
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