Interrogé par le journal “La Croix”, Mgr Bruguès, secrétaire de la congrégation pour l’Education catholique, déclare:
“Pour moi, l’école catholique est une école ouverte à l’universel, à tous (sans distinction de milieu social ou de religion) et à la diversité des savoirs humains. Elle est curieuse de toute humanité. Celui qui ouvre au savoir est donc un éducateur de la conscience. Cette première dimension est généralement bien honorée, mais elle ne suffit pas.
L’école catholique confesse également une foi particulière : la foi catholique est pour nous une référence indispensable. À mon sens, dans le « grand marché éducatif », il n’y aura d’avenir pour nos établissements que s’ils sont réellement catholiques. Avec deux dimensions : tout d’abord, tout en respectant les diversités, tous nos élèves doivent suivre une initiation obligatoire à la culture chrétienne. Et puis, pour ceux qui le souhaiteraient, nous proposons un chemin de foi, une option catéchétique.
Nous constatons que, souvent, une formation à la culture chrétienne, tel le « parvis des Gentils » envisagé par le pape, fait apparaître une demande pour un tel chemin. La culture sert de terreau pour une annonce explicite de la foi.”
J’avoue que je trouve cette présentation troublante. Naturellement, tout le monde admettra facilement que l’école catholique soit ouverte à l’universel et à la diversité des savoirs. Et tout le monde admettra tout aussi facilement que l’école catholique confesse le catholicisme.
Mais, dans la présentation qu’en donne Mgr Bruguès, il semble que la foi catholique soit la marque d’un particularisme (j’allais presque dire d’un enracinement local dans un “grand marché éducatif” mondial). En réalité, c’est l’inverse qui est vrai: c’est parce que l’école est catholique qu’elle est ouverte à l’universel, qu’elle n’est pas centrée sur une “idéologie” parmi bien d’autres disponibles dans le vaste supermarché des opinions.
Entendons-nous bien: je ne suis pas sûr que ce que je crois lire dans ces phrases de Mgr Bruguès s’y trouve vraiment, ni que cela constitue le coeur de sa pensée sur le “caractère propre” de l’école catholique, mais il me semble que cette présentation est ambiguë et mériterait d’être précisée.
J’ajoute que l’expression même d’ouverture à l’universel me semble ambiguë. Quand je lis:
“Pour moi, l’école catholique est une école ouverte à l’universel, à tous (sans distinction de milieu social ou de religion) et à la diversité des savoirs humains.”
mon premier mouvement est de comprendre que l’école catholique ne doit pas “faire acception des personnes”, mais, personnellement, je ne vois pas pourquoi une école catholique ne pourrait pas “discriminer” son recrutement (professeurs et élèves) sur la fidélité à la foi et à la morale catholiques.
Le sens de cette phrase concerne vraisemblablement plutôt une ouverture à tous les savoirs, mais le “à tous (sans distinction de milieu social ou de religion)” fait planer une sorte d’impératif égalitariste (pour ne pas dire un impératif de confusion), dont je ne vois vraiment pas sur quoi il reposerait…
Accessoirement, un point me semble particulièrement inquiétant: Mgr Bruguès parle “d’option catéchétique”. Si les mots veulent dire quelque chose, cela implique que la catéchèse soit une simple option pour les écoles catholiques… ce qui me semble singulièrement problématique.
Bref, je dois avouer mon trouble, sans être certain qu’il soit fondé, mais en espérant que Mgr Bruguès précisera rapidement sa pensée.