Le vaticaniste de la “Stampa”, Marco Tosatti, a assisté le 12 septembre à une messe à Notre-Dame de Paris, qu’il décrit dans son blogue. Il parle du sentiment étrange d’être dans un îlot au milieu des touristes, qui continuent leur ronde incessante et leurs photographies. Et il ajoute:
“Mais ce qui m’a frappé, c’est qu’il n’est pas prévu que l’on s’agenouille pendant la messe, nous mettre à genoux. Il n’y a pas de bancs, mais des chaises, comme il pourrait y en avoir dans une salle de conférence. Celui qui veut s’agenouiller, par exemple à la consécration, peut le faire sur à même le sol.”
Et l’article est titré, sans ambiguïté: “Notre-Dame: interdit de s’agenouiller”
Le correspondant de la Croix à Rome, Frédéric Mounier, revient sur ce texte:
“Ce titre, quelque peu abusif, et l’étonnement de mon confrère, qui, par ailleurs, n’en fait pas une affaire d’Etat, me rappellent l’agacement des touristes français en visite à Rome et confrontées, pour les femmes, à l’obligation du port d’un châle sur leurs épaules nues dans les églises de la Ville Eternelle. Ainsi vont les différences culturelles, voire liturgiques, entre la France et l’Italie.”
Je sais bien qu’il y a effectivement beaucoup de sensibilité, d’enracinement culturel, etc., dans la liturgie et qu’il ne faut pas nécessairement faire d’une question liturgique un enjeu doctrinal majeur, ni même une question d’unité de l’Eglise.Il y a plusieurs demeures dans la maison du Père et c’est très bien ainsi.
Cependant, je ne suis pas certain que l’on puisse mettre sur le même plan la question vestimentaire dont parler Frédéric Mounier et l’agenouillement à la consécration. Dans le premier cas, il s’agit effectivement de sensibilité et de différence culturelle; dans l’autre cas, il s’agit tout de même du coeur de la foi de l’Eglise. Si nous nous agenouillons à la consécration, c’est que nous croyons que le Roi des rois est réellement présent et il n’est pas insignifiant de L’adorer à ce moment précis.
Je note d’ailleurs que la Présentation générale du missel romain (dont je précise qu’elle est la présentation du missel réformé de 1969) déclare:
“Ils [les fidèles] sont à genoux pour la consécration, à moins qu’une raison de santé, l’exiguïté des lieux ou le grand nombre des assistants ou d’autres justes raisons ne s’y opposent. Toutefois, ceux qui ne s’agenouillent pas pour la consécration font une inclinaison profonde lorsque le prêtre fait la génuflexion après la consécration.” (n°43)
Ce qui, selon moi, signifie une chose simple: on peut certes adorer le Christ réellement présent sous les apparences du pain et du vin dans une disposition purement intérieure, par une inclination ou par tout autre gestre, mais le geste d’adoration par excellence, auquel pense spontanément l’Eglise romaine quand elle parle de consécration, c’est bien l’agenouillement. Sans en faire moi non plus une affaire d’Etat, je ne crois pas qu’il y ait là une simple coutume locale…
Notre Dame de Paris n’est bien sûr pas l’exception dans notre beau pays de France, où le fait de s’agenouiller dans les églises dites “normales”, semble être devenu la marque de “l’intégrisme”.
Mais finalement c’est une épreuve supplémentaire à laquelle j’avoue m’attacher (faute de mieux), un peu par bravade, mais aussi parce que finalement avoir mal aux genoux (quand bien sûr son état physique permet de s’agenouiller et surtout de se relever sans trop de difficultés), cela fait aussi participer au sacrifice de l’eucharistie (toute proportion dans la souffrance du la crucifixion gardée).
Quant au fait de mettre quelques choses sur des épaules nues (ou pour les hommes de ne pas rentrer en short) c’est la moindre des politesses et non pas une différence culturelle. Les Romains sont donc restés courtois.
Les obligations sont-elles une question de sensibilité?
L’institutio generalis missalis romani (n° 43) impose l’agenouillement à la consécration: “Genuflectant vero (fideles) ad consecrationem”.
Pardon, j’ai oublié une précision: M. Ganimara dit que cette obligation se trouve dans l’IGMR de 1969. Je voulais souligner qu’elle est encore présente dans l’IGMR de 2002 (je n’ai pas les plus récentes).
Merci de rappeler que l’agenouillement est toujours prescrit. Comme il n’est presque plus pratiqué, on pourrait penser qu’il a été aboli.
Ce que j’ai vu de plus spectaculaire dans le genre, c’était une concélébration présidée par un évêque dans un monastère. A la consécration, ni l’évêque, ni (donc) les concélébrants, n’ont fait d’agenouillement, ni esquissé la moindre inclinaison, pas même de la tête. C’était une messe en latin et grégorien…
Dans l’IGMR de 2002, non seulement il est dit de s’agenouiller pour la consécration, mais il est également dit au numéro suivant que là où coutume veut que l’on s’agenouille de la fin du Sanctus à la fin de la prière Eucharistique et pour le “Ecce Agnus”, il faut conserver cette coutume.
Or telle est la coutume en France ! (ce ne sont pas 40 ans d’interdit de la véritable Liturgie qui vont remettre en cause la coutume)
j’ai connu les églises avec des tables de communion et des prie-dieu ; je suis satisfaite de voir que ce problème est soulevé ; je m’agenouille un minimum pour la consécration et après la communion mais c’est impossible sans prendre appui (sur la chaise de devant) et c’est douloureux. je suppose que les tenants de ces changements ont remplacés les prie-dieu par les chaises, persuadés qu’avec leurs réformes, le bon peuple se presserait en masse dans les églises ; c’est le contraire qui s’est produit ; quelle leçon !
Je lis dans l’épitre de st Paul aux Philippiens 2-10 : “…pour que tout, au nom de Jésus, s’agenouille au plus haut des cieux, sur la terre et dans les enfers…”
Se mettre à genoux n’est donc pas d’une question de sensibilité, puisque même les démons y sont contraints !
Il me semble qu’avoir rendu l’agenouillement dans les églises difficile voire impossible est une oeuvre de désacralisation, et que cette oeuvre est coupable!
Deuxièmement, il me semble encore que l’agenouillement est une marque extérieure d’adoration et qu’on ne peut pas, dans le monde temporel dans lequel nous nous trouvons, éliminer toutes les marques extérieures de respect, d’adoration, de politesse, de charité, d’affection, etc…
sans extérioriser par leur absence l’attitude opposée : le mépris, l’impolitesse, etc…