A propos des messes pontificales en Grande-Bretagne, beaucoup de commentaires ont porté sur l’accusation de simonie. Je voudrais donner ici mon point de vue sur cette question.
Avant toute chose, j’affirme (je ré-affirme plutôt) que l’épiscopat britannique porte une très lourde responsabilité dans ce gâchis: s’ll avait été capable d’organiser correctement le déplacement du Pape, nous n’en serions pas là.
Cela étant, Benoît XVI étant effectivement au sommet de la hiérarchie catholique, il est, à certains égards au moins, responsable de la situation (ne serait-ce que parce qu’il aurait pu sanctionner ou même démettre les évêques fautifs).
Est-il pour autant justiciable du crime de simonie?
Cela me paraît pour le moins douteux.
Qu’est-ce que la simonie? C’est la vente (ou l’achat) d’un bien spirituel et particulièrement d’un sacrement.
Si, dans le cas qui nous occupe, il fallait payer une certaine somme pour communier, nous serions devant un acte simoniaque. Mais ce n’est pas le cas: la somme demandée n’a rien à voir avec la communion, ni même avec le Saint-Sacrifice, elle a à voir avec l’organisation (pardon, l’absence d’organisation). Ce qui est payé, c’est la location des emplacements, les services de sécurité, etc., non les biens spirituels.
On me dira peut-être que mon raisonnement est “jésuitique”. C’est possible, mais alors, il faudrait qu’on m’explique pourquoi anglicans, presbytériens et catholiques sont traités sur le même pied. Il est clair qu’il n’y a aucun bien spirituel pour un presbytérien à assister à une messe du Pape, pourtant je n’ai pas entendu dire que les sujets non catholiques de la couronne britannique soient dispensés de contribuer s’ils décident d’assister à l’une des célébrations. On me dira peut-être qu’il y aura peu de personnes dans ce cas. C’est loin d’être certain et, de toute façon, ce qui compte en l’espèce, c’est le principe: oui ou non, un non-catholique curieux d’assister, disons à une “mômerie papiste”, et donc fort peu désireux d’en recevoir un bien spirituel, devra-t-il s’acquitter de la même somme qu’un catholique?
Par ailleurs, j’ai lu dans un des commentaires, un argument qui me semble fort juste. Nous avons l’habitude d’offrir un casuel aux clercs qui célèbrent pour nous les sacrements (une offrande pour les messes, les baptêmes, les mariages, les funérailles…), personne n’estime qu’il y a là de la simonie. La messe n’a évidemment pas de prix, mais, heureux d’en recevoir les fruits, nous en remercions le prêtre en lui donnant une certaine somme fixée par l’usage dans un pays ou un diocèse donné.
Dernier point, l’un des intervenants dans ce débat demandait: “Imaginez-vous saint Paul sur les routes de Palestine et sur le pourtour de la Méditerranée faisant payer les personnes qu’il allait évangéliser ?” Evidemment non, on n’imagine pas saint Paul faisant payer les personnes qu’il allait évangéliser, mais on imagine d’autant mieux saint Paul demander de l’aide financière aux personnes qu’il avait évangélisées que lui-même a déclaré sans ambiguïté que les ministres de l’autel avaient le droit de vivre de l’autel (voir 1 Co IX).
Bref, je suis entièrement d’accord avec les critiques sévères qui ont été publiées en commentaires ici; je trouve qu’il avait parfaitement inepte, et même à certains égards scandaleux (au sens où cela peut troubler les âmes des plus faibles et que cela peut difficilement se pardonner), d’avoir voulu faire payer l’assistance aux messes pontificales, mais je ne crois pas que l’on puisse dire pour autant que c’est une oeuvre simoniaque.
PS: au passage, je note que le canon 1380 affirme: “Qui célèbre ou reçoit un sacrement par simonie sera puni d’interdit ou de suspense.” Si, réellement, il y avait simonie, nous serions obligés de dire que Benoît XVI va se trouver au minimum frappé de suspense. Je serais curieux de savoir qui va lui notifier cette sanction. A-t-on oublié ce vieil adage canonique selon lequel le pontife romain n’est jugé par personne, si ce n’est pour le crime d’hérésie?
PS2: Je viens de découvrir sur le site de la conférence épiscopale de France, cette question et cette réponse:
” Ne tombe-t-on pas sous l’accusation de ” simonie “, dont parlent les Actes des apôtres ? “(Actes 8, 9-25)
La ” simonie ” consiste à faire comme Simon le magicien un trafic des biens spirituels. Elle est la perversion du sacrifice : elle vise à enchaîner à prix d’argent la puissance de Dieu, ce qui est dérisoire.
Dans une optique de foi, le prêtre qui sacrifie à l’autel rend sacrés nos dons et reçoit de l’autel sa subsistance.
Il s’agit de payer pour assister à la Messe. Qui ne paye pas n’y assistera pas. Donc …
Il ne s’agit pas de demander aux fidèles une aide financière, comme lors des quêtes : il s’agit qu’ils payent pour pouvoir assister à la Messe, donc, du fait même, qu’ils payent pour communier, qu’ils payent pour recevoir les grâces spirituelles liées à la communion au Très Saint Sacrement.
Vouloir exonérer les fautifs est s’en rendre complice.
Cordialement.
Il est assez drôle de citer 1Co 9 en justification de l’exercice vénal du sacerdoce ministériel alors que saint Paul le refuse explicitement pour lui même et Barnabé ! Et qu’il dit que c’est là une pratique païenne ! Amusant, vraiment ! Paul est à 1000 lieues de vos principes religieux. Son enseignement est du Seigneur et c’est bien en reformant nos pratiques à partir de ce qu’il écrit que nous devrions agir. Cela nous mènerait bien loin de nos vains débats sur les pratiques liturgiques pour nous centrer, nous recentrer sur l’unique nécessaire : Jésus mort et ressuscité pour le salut de tous. Le reste, je vous prie de bien vouloir excuser la verdeur de mon propos, n’est que foutaises !
Cher Erasmus.
Le même S. Paul a organisé une collecte pour l’Église de Jérusalem… La solidarité intra-ecclésiale, que vous semblez qualifier de foutaise, est un acte éminent de la vertu théologale de charité.
Le même S. Paul a également affirmé normal que l’ouvrier reçoive son salaire. Donner aux ministres du culte les subsides de leur existence est également acte de charité, autant que de justice.
Et non, le dogme de foi ne se limite pas à la Résurrection.