Toujours dans l’article dont je parlais tout à l’heure sur le cardinal Scola, Sandro Magister fait aussi, incidemment, cette remarque sur le gouvernement de Benoît XVI – remarque qui rejoint l’une des intuitions fondatrices de notre petit blogue (qui considérait que certains des principaux opposants à la “restauration” douce de Benoît XVI étaient aussi certains de ses plus proches collaborateurs):
“Benoît XVI ne passera pas à l’histoire comme un grand homme de gouvernement. Il a laissé la curie vaticane telle qu’il l’avait trouvée, c’est-à-dire dans le désordre où elle était déjà tombée avec son prédécesseur Karol Wojtyla, trop mondialiste pour s’occuper des affaires internes. En ce qui concerne les plus hautes charges de la curie, le pape Ratzinger s’est limité, en six ans, à un tout petit nombre de nominations, pas toutes satisfaisantes, portant sur des hommes qu’il connaissait personnellement. La première, celle de Bertone comme secrétaire d’Etat, s’est révélée rapidement une source de difficultés plutôt que d’avantages pour le pape. Mais la plus récente, celle du cardinal canadien Marc Ouellet à la tête de la congrégation qui évalue et propose au pape la nomination de tous les nouveaux évêques, promet de lui apporter davantage de consolation. En ce qui concerne l’envoi de Scola à Milan, l’entente entre Ouellet et Ratzinger a été parfaite.”
Connaissant assez bien le débat français, où l’on est bien vite catalogué comme “gallican” si l’on s’interroge sur une décision romaine (qui n’est pas toujours une décision du Pape, est-il besoin de le noter?), ou comme un “intégriste” si l’on préfère la continuité à la rupture, je voudrais attirer l’attention des lecteurs sur la personnalité de l’auteur de ces lignes: Sandro Magister n’a rien d’un opposant au Siège apostolique. Il est, au contraire, l’un des vaticanistes les mieux “en cour”, si j’ose dire, et sans doute l’un des meilleurs connaisseurs du monde “ratzinguérien”. Et ce qu’il dit – qui fera peut-être bondir d’excellentes personnes parmi les lecteurs d’OV – me semble le bon sens même: autant il faut se réjouir que Dieu nous ait donné un Pape doté de si impressionnantes qualités intellectuelles, autant on peut remarquer que la Curie romaine manque cruellement d’un chef depuis longtemps. On aurait pu penser que le cardinal Bertone suppléerait les lacunes que Benoît XVI se connaît en ce domaine. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Prions pour que le Pape repère rapidement, dans son entourage proche, des hommes de gouvernement et des hommes qui lui seront fidèles. J’ai des noms en tête, mais ce n’est certes pas à moi de les donner!
Bonsoir,
je lis toujours avec beaucoup d’intérêt vos différents articles, dont j’apprécie la mesure et la permanente charité. Permettez-moi de vous porter contradiction sur un point de celui-ci : ce n’est pas des brillantes et indéniables qualités intellectuelles de notre bien-aimé Pape qu’il faut rendre grâce au Seigneur, mais de son impressionnante vie de foi et de prière. C’est, si j’ose dire, la sainteté de Sa Sainteté qui sauvera l’Eglise. Des intellos, nous n’en avons que trop ! Des saints, nous en manquons…
Si. Il faut qu’il nomme le cardinal Ranjith. Lui seul nous sauvera.
Sandro Magister me semble continue de plus en plus à adopter mine de rien une démarche critique du pontificat. Mais à part lancer des débats, cela me paraît parfois bien peu constructif. Même s’il est important pour les rédacteurs des blogs et les journalistes d’être rigoureux et de faire un bon travail d’analyse et d’investigation
Bref la critique est aisée et l’art difficile.
Je préfère penser au Saint Père, à tout ce qu’il a déjà fait en 6 ans, aux 60 ans de son sacerdoce avec ND de Chrétienté (60 messes dites à son intention).
Il y a dans l’analyse de S. Magister un point qui me surprend: il affirme “le pape Ratzinger s’est limité, en six ans, à un tout petit nombre de nominations, pas toutes satisfaisantes”. Je voudrais juste m’arrêter sur la question du nombre sans m’attacher aux considérations qualitatives. Sauf erreur de ma part, à l’exception de la congrégation pour l’éducation catholique et du conseil pontifical pour les laïcs, tous les chefs de dicastères ont été nommés par Benoit XVI, certains postes ayant déjà connu deux changements de titulaires depuis la mort de Jean-Paul II.
Alors, dire que Benoit XVI n’a pas fait la révolution dans la Curie, c’est vrai. Mais je ne pense pas que la révolution soit dans sa nature. Par contre, on ne peut pas dire qu’il n’y a eu que peu de nominations.
Cela fait longtemps que je considère que le fruit du gallicanisme est la sécularisation, et si on “juge l’arbre à ses fruits” les résultats sont tels, qu’en effet “il vaut mieux s’adresser à Dieu qu’à Ses saints”.
C’est pourquoi, sur le plan doctrinal, je ne reconnais d’autre autorité que celle de Rome.
La curie fonctionne comme le gouvernement espagnol de l’Ancien Régime, où le pape parle individuellement aux secrétaires d’Etat, et chaque secrétaire d’Etat ne sait pas ce qui fait son confrère. Un même dossier peut être traité par un ou plusieurs personnes.
La curie devrait prendre exemple sur le gouvernement français depuis Louis XIV, chaque ministre s’occuper d’un domaine et le conseil des ministres parlent de son domaine aux autres. Le premier ministre arbitre.
J.M. Richier : “je considère que le fruit du gallicanisme est la sécularisation” : mais est-ce bien le cas ? Si ça l’était la France serait le seul pays à subir cet effet. Il ne semble pas que ce soit le cas.
Le pape ne peut pas gouverner seul; il lui faut des hommes habiles qui acceptent ses idees. Ou peut-il les trouver? Il y en a tres peu dans la curie et ailleurs.
Réponse à Olivier. Oui, mais le pape réunit quelques fois les chefs de dicastères entre eux, ce qui correspond à ce conseil des ministres (à la française) que vous réclamez de vos voeux.
Cela s’est fait récemment, je crois, pour discuter de la crise des prêtres pédophiles, et de la réponse ecclésiale à y donner.
Il n’y eut pas de communiqué. On ne sait pas ce qui s’y est passé.
Je vous fais remarquer que le gouvernement de l’Eglise, laquelle n’est pas un Etat, ressemble aussi au gouvernement des Etats-Unis, où il n’y a pas de ministres, pas de conseil des ministres, mais seulement des secrétaires d’Etat, responsables devant le Président, qui de fait assume tous les pouvoirs exécutifs, tel un monarque élu et constitutionnel. Le gouvernement de l’Eglise, laquelle est quand même une grande société, a donc quelques traits communs avec celui d’un grand Etat moderne.