Mgr Robert Morlino, évêque du diocèse de Madison (Wisconsin) ne confond pas sa mission d’évêque avec le métier de contorsionniste, fût-il parfaitement maîtrisé comme il l’est par tant de ses confrères dans l’épiscopat. Cela devrait être bien connu des lecteurs habituels d’americatho. Un article de Paul M. Matenaer, paru dans le Catholic Herald, organe officiel du diocèse de Madison, traite de la manière de recevoir la Sainte Communion, et montre assez où incline l’évêque.
Dans la main ou sur la langue ?
Matenaer, en préambule, rappelle que la constitution du Concile de Vatican II, Sacrosanctum Concilium, n’a pas « aboli » l’usage universel de la communion sur la langue. En fait, les pères conciliaires n’ont pas traité de cette question. Elle est abordée dans l’instruction Memoriale Domini de 1969 qui précise que le Saint Père, à l’époque Paul VI, a décidé de ne rien changer à cet usage universel, mais que les Conférences épiscopales des pays où l’usage de recevoir l’Eucharistie dans la main était devenu coutumier pourraient demander la permission de l’autoriser pourvu que l’usage de la recevoir sur la langue ne soit pas interdit. Usage universel et dérogation ne sont évidemment pas équivalents… La Conférence épiscopale américaine ayant opté pour la généralisation de l’usage dérogeant, l’Instruction générale du Missel Romain de 2002 signalait cette dérogation pour les États-Unis tout en précisant que les communiants pourront désormais « choisir de la recevoir soit dans la main, soit sur la langue ». Deux ans plus tard, la nouvelle instruction Redemptionis Sacramentum rappelait, de nouveau que chacun « avait le droit de recevoir la Sainte Communion sur la langue, si c’était son choix » ou de la recevoir dans la main là où les ordinaires le permettent mais, précise Matenaer, cette permission « ne crée pas un droit absolu pour le communiant ».
À genoux ou debout ?
Là encore, rappelle Matenaer, cette question de posture n’a pas été abordée par les Pères conciliaires. Le premier texte normatif sur cette question date de 1967. L’instruction Eucharisticum Mysterium rappelait que les fidèles « peuvent recevoir la Communion soit à genoux, soit debout » mais qu’il pouvait revenir aux Conférences épiscopales d’adopter l’une ou l’autre posture. La Conférence épiscopale américaine opta pour la posture debout. Toutefois, l’Instruction générale du Missel Romain précisait à l’intention des Américains que les communiants « ne pourront pas se voir refuser la Sainte Communion s’ils se mettent à genoux ». D’où il ressort pour Matenaer deux autres questions d’importance. La première fut posée à Rome par le cardinal Francis George de Chicago en 2003 : doit-on interdire la position à genoux d’un fidèle en action de grâce après avoir reçu la Sainte Communion, alors que tous les autres communiants sont debout ou assis ? La réponse de Rome fut négative. La deuxième question fut de savoir si un curé pouvait refuser la Communion à ceux qui se présentent à genoux pour la recevoir. Encore une fois, la réponse romaine fut négative et anéantissait l’instruction de la commission liturgique de la Conférence épiscopale qui, en 2002, avait décidé que « l’agenouillement était une position illicite » pour recevoir la Communion.
Matenaer termine en donnant un résumé de ce qu’il vient d’exposer :
- « Primo, les fidèles ont toujours le droit de recevoir la Communion sur la langue, en raison d’une tradition multiséculaire. Toutefois, aux États-Unis il est aussi permis de la recevoir dans la main pourvu que n’existe aucun danger de profanation.
- Secundo, la norme aux États-Unis est de la recevoir debout, mais ceux qui veulent la recevoir à genoux peuvent librement le faire. Tout refus de la Très Sainte Eucharistie à ceux qui s’agenouillent est une grave infraction, et personne n’a le droit de la refuser à ceux qui s’agenouillent ou de les accuser de désobéissance.
- Par conséquent, aucun curé, ministre et à plus forte raison employé paroissial ne peuvent interdire ou dissuader un fidèle de recevoir [la Communion] à genoux si tel est son choix. C’est la loi générale de l’Église, à laquelle nous sommes, en tant que catholiques, liés par conscience. Le principe général qu’on peut en déduire est le suivant : enseigner ce que l’Église enseigne, condamner ce que l’Église condamne, mais permettre ce que l’Église permet. »
Il y a là beaucoup de bon sens et qui va dans le… bon sens. Toutefois, les remarques de Paul Matenaer ne s’appliquent qu’à la forme ordinaire de la liturgie dont la discipline est fixée par l’ensemble des décrets et instructions postérieures à la promulgation du Missel Romain de 1969. Cette nouvelle discipline ne s’applique pas à la forme extraordinaire de la liturgie, comme vient de le rappeler l’instruction Universæ Ecclesiæ. Le Missel de 1962 possède sa discipline propre qui n’a pas à tenir compte de celle qui est propre au Missel suivant. En matière de Sainte Communion, c’est toujours à genoux et sur la langue qu’elle se reçoit.