Un extrait de la carte du diocèse de Vincennes dessinée par son évêque Simon Bruté
XI.
Les efforts héroïques de l’évêque Bruté nourrissent le catholicisme en Indiana
L’évêque Simon Bruté embrassa la vie de missionnaire avec le zèle de la jeunesse, malgré sa grave maladie. Il n’était plus
agité par l’idée de devenir missionnaire aux Indes. Sous le patronage du missionnaire aux Indes que fut saint François-Xavier, il parcourut à cheval les pistes missionnaires de
l’Indiana.
« Je réenfourche mon cheval et trotte, la pluie me coulant sur le visage, froide comme elle est en janvier. C’est une vieille
histoire pour moi depuis mon arrivée à la Montagne [Mount St. Mary’s d’Emmitsburg] en 1811. C’est le pain quotidien des missionnaires. »
Une semaine après son installation comme évêque de Vincennes, l’évêque Bruté décida de visiter tout son diocèse. De toute
évidence, deux seuls prêtres pour l’assister dans son apostolat diocésain n’y suffiraient pas, aussi écrivit-il à l’évêque de son diocèse natal, celui de Rennes, pour voir s’il pourrait en
obtenir de l’aide. Il écrivit aussi à son jeune frère, Augustin, car il avait besoin de tout : de burettes, ornements sacerdotaux, canons d’autel, missels, un anneau
épiscopal et une croix pectorale (« pour le cas où je perdrais la mienne »), une mitre, une crosse (« celle que j’ai est en bois doré »), et jusqu’à une chasuble
légère pour porter quand il serait à cheval. Il dessina une carte du diocèse pour son frère, dont une copie existe encore.
La majorité des gens qu’il rencontrait dans le diocèse n’étaient pas catholiques. Mais, chez la plupart d’entre eux, les suspicions étaient
levées et tant l’évêque que ses deux prêtres étaient aimablement reçus.
L’évêque Bruté écrivit : « C’est avec contentement que l’évêque quitte chaque endroit, profondément convaincu
que les gens seront faciles à réconcilier avec “L’Homme de perdition” de Vincennes, et plus facilement encore avec les autres pêcheurs, ses successeurs. »
La tâche de l’évêque était identique à celle des autres missionnaires de son temps : il devait se renseigner pour savoir où pouvait se
trouver une famille catholique et partir à sa recherche. La plupart des catholiques ne savaient même pas que l’Indiana avait son propre évêque avant qu’il arrivât chez eux.
Leur évêque chevauchait sur des centaines de km. Il écrivit à un ami, en mai 1835, qu’il avait fait ses tournées à cheval « avec une
facilité que je ne peux exprimer, si l’on veut bien me croire, en disant que je ne me sentais pas plus fatigué le soir que si je n’avais pas quitté mon logis – je ne puis pas même le concevoir –,
une journée représentant 60 miles [96,5 km] parcourus, de 11 h du matin à la nuit tombante, et le plus souvent à travers des prairies humides. » Mais, pour lui, aucun effort n’était de
trop pour son troupeau dispersé, tant qu’il n’aurait pas trouvé de prêtres. Il savait qu’il ne pourrait les trouver qu’en France.
En juillet 1835, il partit pour Paris. L’évêque des contrées sauvages y conquit de nombreux cœurs. Son zèle et sa sainteté lui gagnèrent de
nombreuses recrues, prêtres et séminaristes. Son appel à l’héroïsme émut leur inclination naturelle à la noblesse de cœur et d’esprit. On dit que les gens dans les séminaires tiraient des fils de
la soutane élimée de l’évêque pour les conserver comme reliques d’un saint.
Une dizaine de séminaristes et huit prêtres repartiront avec lui en Amérique. Quelques autres avait besoin de parachever leurs études et leur
formation sacerdotale.
L’évêque Bruté ne fut pas surpris de trouver de la résistance chez les parents des prêtres et des séminaristes, tout à fait
comme chez sa propre mère. A l’une de ces mères, il écrivit : « Il y a là-bas en Amérique des âmes qui attendent la générosité d’une mère que le Seigneur saura très bien comment
consoler dans la solitude de ses derniers instants. » L’évêque avait également cherché des missionnaires de langue allemande, car les Allemands étaient en train de peupler son
diocèse.
Vingt clercs firent voile vers l’Amérique avec le saint évêque. Deux d’entre eux deviendront le deuxième et le troisième évêque de Vincennes.
Ce voyage transatlantique fut particulièrement périlleux. A un certain moment, tout le groupe se retrouva à genoux devant l’évêque lui demandant son absolution car ils redoutaient le naufrage.
L’évêque leur dit : « N’ayez pas peur mes enfants. La peur n’est qu’une des grandes supercheries du démon. Nous ne périrons pas. » Les jours ou la mer était meilleure,
l’évêque Bruté donnait des conférences au groupe pour le préparer à la mission dans ce territoire déshérité.
Sitôt qu’il fut chez lui en Indiana, l’évêque réussit à convaincre Mère Rose White d’Emmitsburg de lui envoyer trois sœurs
qui s’ajouteraient aux deux religieuses des Sisters of Nazareth du Kentucky, pour aider à l’éducation des enfants du diocèse.
En 1837, treize prêtres, cinq diacres et deux sous-diacres furent organisés, de la manière missionnaire, pour les circuits à cheval ou pour
devenir curés de paroisses stratégiques. L’évêque ne fut pas privé du chagrin que lui causèrent quelques prêtres infidèles, mais ce furent des exceptions. A l’époque de sa mort, en 1839, on
comptait vingt-cinq prêtres diocésains et vingt séminaristes servant une population qui ne cessait de croître.
« La peur n’est qu’une des grandes supercheries du démon ». Quelle magnifique citation ! La sainteté de notre évêque fondateur,
son propre héroïsme et son appel à la noblesse de son peuple et de son clergé, ont posé les fondations du catholicisme en Indiana.
Demain :
XII. Simplicité et prière : les marques de la vie de l’évêque Bruté
Le drapeau actuel de la ville de Vincennes qui ne dissimule pas ses origines françaises
© Most Rev. Daniel M. Buechlein, Archbishop of Indianapolis (Indiana).
© Daniel Hamiche pour la traduction française.