Je voudrais signaler un article intéressant de Sandro Magister, publié en version française sur son site Chiesa. Intitulé « Les grands déçus du pape Benoît », cet article entend montrer la déception qui monte dans les rangs traditionalistes à l’égard de Benoît XVI. Le vaticaniste italien écrit :
Ces derniers temps, dans le camp catholique traditionaliste, les critiques contre le pape Ratzinger n’ont pas diminué ; leur intensité s’est même accrue. Et elles reflètent une déception croissante par rapport aux attentes qu’avait initialement suscitées l’action restauratrice de l’actuel pontificat.
Les critiques de certains traditionalistes se concentrent en particulier sur l’interprétation du concile Vatican II et de l’après-concile qui est celle de Benoît XVI.
À leur avis, le pape se trompe lorsqu’il limite sa critique aux dégénérescences de l’après-concile. En effet Vatican II – toujours d’après eux – n’a pas seulement été mal interprété et mal appliqué : il a été lui-même porteur d’erreurs. La première de celles-ci a été que les autorités de l’Église ont renoncé à exercer un magistère de définition et de condamnation lorsque c’était nécessaire ; c’est-à-dire qu’elles ont renoncé à l’anathème, au profit du dialogue.
Face à Assise et face à l’examen précis de ce que fut Vatican II, une certaine déception existe et, après tout, l’article de Sandro Magister donne quelques éléments pour apprécier cet aspect négative. Il conviendrait, cependant, de ne pas voir qu’une seule face à cette médaille. Le monde traditionaliste est aussi très conscient et très reconnaissant envers Benoît XVI de l’existence du motu proprio Summorum Pontificum, lequel indique clairement que la sainte messe traditionnelle n’avait jamais été abrogée juridiquement. Il y a là une décision importante dont les effets sont à longue portée et sur laquelle il ne sera pas possible de revenir.
Le motu proprio a entraîné un mouvement, encore lent mais assez réel, vers une expression pleine et entière de la Tradition catholique dans tous ses aspects. Associé au discours sur l’herméneutique du Concile Vatican II, cet effet a libéré la parole et les actes. Il n’a pas encore été transformé au niveau du suprême pontificat, qui n’est pas seulement combattu de l’extérieur par des épiscopats réticents, mais aussi par une coterie à l’intérieur du Vatican qui est bien décidée à bloquer tout ce processus de restauration. Au final, la déception n’est pas aussi grande que Magister veut bien le dire. Personne n’a pris Benoît XVI pour un traditionaliste ou pour un Romain à l’ancienne. Personne, sauf ses adversaires, bien décidé depuis 1985 à le faire passer pour un affreux réactionnaire. Le Saint-Père est aussi l’homme d’un temps et d’une époque. Il n’empêche : son attachement réel à la beauté et à la sacralité de la sainte liturgie a entrouvert des portes qui ne demandent qu’à s’ouvrir complètement.