Il est rare que les grandes associations de défense de la vie poussent la logique jusqu’à combattre la contraception ; nombreuses sont celles à travers le monde qui se concentrent sur le combat contre l’avortement, tandis que l’on entend volontiers répandre la fable selon laquelle plus la contraception est répandue, moins on enregistre d’ « interruptions volontaires de grossesse ».
Une conférence organisée à Rosemont, Illinois les 23 et 24 septembre derniers par la Pro-Life Action League, a réuni un grand nombre d’experts venus exploser ce mythe. Avec une nouveauté : aux côtés des catholiques fidèles au magistère de l’Eglise sur la question de la contraception « artificielle », un nombre croissant de chrétiens protestants ou évangéliques dénoncent désormais celle-ci comme étant à la racine de la culture de mort. Ce discours nouveau est en train de gagner du terrain, aux Etats-Unis en tous cas, et il s’appuie sur des arguments solides.
Il était question bien sûr des effets abortifs très précoces de la contraception chimique dont l’un des effets est d’empêcher la nidation ; mais on évoqua aussi les dégâts psychologiques du refus de la vie. Ainsi Janet Smith, professeur de théologie morale à l’Université du Sacré-Cœur à Detroit, déclarait : « Lorsque des personnes recourent à la contraception, elles ne se demandent pas si elles recherchent une relation à vie avec tel ou telle, ni si leur partenaire peut être un bon parent. Elles se bornent à vivre ensemble, généralement pour des raisons sexuelles, et àglisser vers le mariage. » Résultat : la désillusion, et le divorce.
Sur le plan pratique, les conférenciers représentant des groupes aussi importants que Human Life International et les nombreuses associations assurant la promotion de la régulation naturelle des naissances entendent militer au moins pour que soit reconnu aux pharmaciens le droit de ne pas fournir de moyens contraceptifs pour des raisons de conscience, et pour la cessation des subventions publiques qui, aux Etats-Unis comme ailleurs, alimentent la promotion du contrôle des naissances, le Planning familial notamment.
Plusieurs militants de la régulation naturelle des naissances sont venus dire à leur tour le danger qu’il y a à séparer l’activité sexuelle, « don de soi inconditionnel », du « don de Dieu que sont les enfants ». « Si les relations sexuelles n’ont rien à voir avec l’enfant, que faire si la contraception échoue ? L’avortement devient alors une solution de secours ; simplement une autre façon de se débarrasser de cet enfant dévalorisé dont on ne veut pas. »
Certaines figures de proue du combat pour la vie, comme le Dr John Willke de l’International Right to Life Federation, estiment cependant qu’un discours anti-contraceptif fera du tort au mouvement pro-vie qui a le vent en poupe ; notamment parce que de nombreux adversaires de l’avortement sont aussi des utilisateurs de moyens contraceptifs.
La question est sans doute légitime, mais c’est une façon de passer à côté de la source d’une mentalité qui s’accommode du génocide tandis que la famille change totalement de visage et que les berceaux vides menacent l’avenir des pays qui se prétendent les plus « avancés ». « C’est le cœur du sujet », rétorqua donc Joe Schiedler, organisateur de la conférence où furent également mis en avant les dégâts spirituels de la contraception artificielle.
Les statistiques britanniques et françaises pour 2004 et 2005, qui font état d’un recours massif à la contraception et à la pilule du lendemain, lui donnent raison : le nombre d’avortements légaux n’y diminue pas, il y augmente.
Sur la conférence, voir ici.
Felicitations par ton blog! Salut from l’Espagne
Je ne suis pas du tout d’accord avec l’argumentation développée lors de cette conférence. Même dans l’optique du magistère catholique, on peut très bien renoncer à suivre une norme de morale sexuelle (l’interdiction de la contraception artificielle) pour des motifs divers et variés, y compris l’hédonisme, et pour autant se refuser à aller jusqu’à tuer un être humain, violation du commandement “Tu ne tueras point”. Après tout, tous les voleurs ne deviennent pas des assassins !
Il se trouve que je suis orthodoxe et que l’Eglise orthodoxe condamne systématiquement l’avortement mais a une position beaucoup plus nuancée sur la contraception, ne distinguant pas entre la naturelle et la chimique, sauf lorsque cette dernière est abortive. Or, elle ne l’est pas systématiquement, cela dépend des méthodes et cela change beaucoup les choses. Cette position nuancée est due au fait que l’Orthodoxie ne fait pas de la procréation la fin première et principale du mariage. C’est la création d’une Eglise domestique au sens paulinien et le soutien mutuel des époux qui est fondamental, la procréation est une cause secondaire mais qui ne doit pas être refusée pour de mauvaises raisons telles que l’égoïsme.
D’accord avec vous sur un point : ce n’est pas parce que telle personne recourt à la contraception artificielle qu’elle acceptera d’avorter, tandis qu’à l’inverse la régulation naturelle des naissances peut avoir une motivation égoïste. Mais à grande échelle, la contraception légalisée et promue a toujours été accompagnée d’une hausse des avortements et d’une mentalité générale de refus de la vie. Je crois qu’il est intéressant tenir compte de cette donnée de l’expérience, même si l’on ne partage pas la critique catholique de la contraception artificielle.
Quant à cette critique, je la comprends comme étant aussi au service de l’amour vrai entre époux, car elle se fonde sur la nécessité d’un don sans réserve, sans du tout exiger qu’il aboutisse systématiquement au don de la vie.
Merci de vos commentaires.
Je reprends les arguments de Marcus à mon compte. Les fins pauliniennes du mariage ne sont pas la procréation. D’autre part, les écrits néotestamentaires n’incitent aucunement à un quelconque activisme. Témoins nous sommes et témoins nous devons rester. Pour poser la question de la contraception, il ne faut pas entrer dans un discours pseudo théologisant, mais obéir à la loi universelle de l’économie divine: l’idéologie ne saurait se substituer au réel. Or il me semble que l’on sort ici de la question du témoignage pour se placer sur le terrain idéologique qui consiste d’une certaine manière à se substituer à Dieu, à lui attribuer des “postures” anti ou pour quelque chose. Cette lecture de la vie en est en fait une interprétation.