Andrea Gagliarducci propose dans Cardinalis une analyse géopolitique du dernier consistoire. Extraits :
[…] Pour comprendre les enjeux géopolitiques du Consistoire, il faut d’abord voir la présence des délégations gouvernementales.
Les délégations au Consistoire
Il y avait un cardinal français, Jean-Paul Vesco, aujourd’hui archevêque d’Alger. En raison de la crise gouvernementale et parce que Vesco doit être considéré parmi les Algériens, il n’y a pas eu de délégation de la France. Celle-ci est généralement représentée par le ministre de l’Intérieur, qui dispose également de la délégation pour les affaires religieuses.
L’Ordre de Malte, avec le Grand Maître Fra’ John Dunlap, est toujours présent et au plus haut niveau.
La présence de Vebi Miftari, du bureau de liaison du Kosovo auprès du Saint-Siège, est intéressante. Il dirige un bureau de liaison, et non un bureau diplomatique, car le Saint-Siège n’a pas encore reconnu l’indépendance du Kosovo, annoncée le 17 février 2008. Jusqu’à présent, cependant, les relations entre le Kosovo et le Saint-Siège se sont développées à un niveau pré diplomatique. […]
La question serbe
Il a été dit qu’un représentant du Kosovo était présent. Le bonnet rouge imposé à l’archevêque de Belgrade, Ladislav Nemet, renforce la hiérarchie catholique en Serbie, pays à majorité orthodoxe. Le premier cardinal de Serbie pourrait ouvrir la voie au premier voyage du pape François dans le pays. […]
La question de l’Iran
La présence d’un cardinal originaire d’Iran – le missionnaire belge Josep Mathieu – est également significative. Le 20 novembre dernier, le pape François, rencontrant les participants au XIIe colloque du Dicastère pour le dialogue interreligieux avec le « Centre pour le dialogue interreligieux et interculturel » de Téhéran, a déclaré : Le sort de l’Église catholique en Iran, un « petit troupeau », me tient particulièrement à cœur. Et l’Église n’est pas contre le gouvernement ; non, ce sont des mensonges ! ». Le Saint-Siège s’est tourné vers l’Iran comme interlocuteur depuis le début du conflit à Gaza. Le 5 novembre 2023, le pape François s’est entretenu par téléphone avec le président al Raisi, qui est décédé dans un accident d’hélicoptère le 19 mai 2024. Le président lui-même avait demandé cette rencontre, et les déclarations iraniennes ont souligné que l’Iran avait toujours apprécié les appels du pape François en faveur d’un cessez-le-feu à Gaza. […]
La question ukrainienne
Le pape François a créé le cardinal Mykola B choke, éparque des Saints Pierre et Paul, à Melbourne, pour les gréco-catholiques ukrainiens d’Australie.
Le choix de Bychok est particulier. Le pape François n’a pas voulu créer l’archevêque majeur de l’Église gréco-catholique ukrainienne, Sviatoslav, en tant que cardinal. Il n’a pas non plus choisi le cardinal Shevchuk, et ce malgré son prédécesseur, Lubomyr Husar, s’il était cardinal.
Le pape François ne veut pas irriter Moscou, c’est pourquoi il continue à entretenir des relations avec eux. Dans le même temps, il ne souhaite pas refuser son soutien à l’Ukraine. C’est pourquoi Bychok a été choisi comme plus jeune cardinal et chef d’un minuscule troupeau de l’Église gréco-catholique ukrainienne. […]