Mgr Forte inaugure une nouvelle église à Chieti, conçue par l’architecte Mario Botta. Avvenire publie le commentaire de l’évêque mais sur Facebook les réactions des fidèles sont majoritairement (et impitoyablement) négatives. Une réflexion s’impose.
La nouvelle église de Mario Botta à Chieti, une tente divine qui devient un utérus. “L’architecture porte en elle l’idée du sacré”. Ces mots de Mario Botta montrent déjà clairement que la conception et la construction d’un bâtiment consistent toujours à créer un pont entre la terre et le ciel, en imitant presque dans le fragment le geste créateur archétypal de l’ensemble.
D’autant plus lorsque l’on choisit de faire une coupure (“temple” vient du grec témno, couper), visant à séparer un espace pour Dieu afin de le rendre habitable par notre soif de Lui et le don de sa présence, comme c’est le cas lors de la construction d’édifices sacrés. C’est dans cette conscience que Botta, le concepteur d’extraordinaires lieux sacrés, évolue : et c’est pour cette raison que ses architectures sacrées sont connaturelles pour ceux qui désirent une rencontre avec le Très-Haut et veulent donner une expression à cette profonde aspiration de l’âme. Si “désirer” signifie tracer le chemin à partir des étoiles (“de sideribus”), presque tirer le ciel vers la terre pour l’ouvrir à l’horizon ultime pour lequel il a été créé, concevoir et réaliser l’espace du sacré signifie contribuer à allumer chez les habitants du temps la soif de l’Eternel, leur offrir la demeure où conjuguer l’humilité et le courage de se mesurer à l’Autre dans la lutte du plus grand amour, comme le fit Jacob.
Parmi les centaines de commentaires sur la page Facebook d’Avvenire, voici quelques uns représentatifs :
- Il est urgent de retrouver le sens de la beauté dans l’architecture religieuse
- Dire qu’elle est laide revient à lui faire un compliment
- Mais elle est effectivement laide !!!!
- Un bel architecte et des évêques clairvoyants dans l’attente de sa transformation en un centre commercial plus fructueux (en l’absence de foi et de fidèles, c’est le seul).
- La Trinité , la maternité , la proximité de Dieu avec l’homme , la tente etc. ont de la Beauté en commun. Des facteurs que probablement les architectes, les évêques et les journalistes ignorent.
- Avec tout le respect que je vous dois , j’aimerais l’église telle qu’elle était autrefois avec un clocher
- Les églises de “jadis” sont et restent les plus belles et les plus vouées au recueillement et à la prière. J’irai la visiter. J’habite à la frontière.
- Pour moi, cette structure n’éveille rien.
- Elle ressemble à l’un de ces monuments construits dans les pays socialistes dans les années 1970. Elle serait également laide en tant que siège du comité central du parti communiste bulgare.
- C’est affreux, même la froideur du trottoir.
- Mah… des espaces conceptuels au lieu de lieux de culte pour l’assemblée liturgique… pas tout à fait là
- J’espère que le résultat sera meilleur que l’église de Foligno de Fuksas… surtout en ce qui concerne la perception et l’habitabilité de l’intérieur. Ce n’est pas par hasard que j’ai utilisé le terme “vivabilité intérieure”… parce que l’église de Foligno de Fuksas… un énorme cube de béton armé au milieu de la campagne ombrienne… le curé était obligé de la fermer pendant les mois d’hiver à cause du coût exorbitant du chauffage… L’originalité à tout prix comme principe directeur de l’architecture contemporaine… ne va pas toujours ou rarement de pair avec une logique d’habitabilité des environnements résultant des travaux…
- Disons que ces “places” sans arbre ni banc (comme à Turin) ne sont que de l’espace perdu, chaud en été. Beaucoup, beaucoup trop de ciment.
- Je crois que les gens ne vont plus à l’église, aussi parce que les bâtiments sacrés modernes renvoient à tout sauf à une spiritualité profonde. À quelques exceptions près, les églises modernes sont des bâtiments incompréhensibles qui n’inspirent rien.
Malgré toutes les bonnes, très bonnes, intentions de l’évêque, du diocèse et de l’architecte, il semblerait que la distance entre les responsables et les fidèles ne cesse de s’accroître, même en ce qui concerne l’esthétique. On peut facilement dire que les gens sont ignorants et ne comprennent pas le langage de l’artiste ou les paraboles du théologien. Mais même cela ne peut pas, ou ne devrait pas, permettre aux pasteurs de faire des rêves paisibles. Soit l’art chrétien a perdu le chemin de la beauté et sa vocation profonde à parler de Dieu, soit il a perdu le contact avec les fidèles auxquels il est destiné et qu’il est appelé à servir. Et non l’inverse, comme semblent souvent l’indiquer certains discours et certaines dévotions aux architectes du moment.