Me Adeline Le Gouvello, avocate de Mère Marie-Ferréol, renvoyée sans explication de l’Institution des Dominicaines du Saint-Esprit et de toute vie religieuse, explique sur Twitter pourquoi cette dernière a porté plainte devant la juridiction civile :
Sr Marie Ferréol a agi en responsabilité civile à l’encontre des personnes l’ayant renvoyée de sa communauté de façon abusive. Elle réclame plus de 800000 € de dommages et intérêts. L’action devant le juge civil conduit à l’octroi de dommages et intérêts : le juge civil n’a pas le pouvoir de réintégrer la sœur dans une communauté et ce n’est évidemment pas cette demande qui a été faite. Le seul moyen de réparation légalement prévu est de l’argent. Par cette réparation, la gravité du préjudice est reconnue : si le préjudice est important, le montant des dommages et intérêts l’est aussi. L’élévation de la somme est à la mesure de la gravité du préjudice que la victime a subi. Le préjudice subi par la sœur est très important et pas même quantifiable: l’éviction et les conditions de celle-ci, relevant des antiques lettres de cachet, a causé un préjudice matériel et moral considérable. La perte injustifiée d’une vie de consacrée a-t-elle un prix?
La demande élevée de dommages et intérêts est ainsi en cohérence avec l’enjeu et la gravité du préjudice subi. Gageons en outre que MM Ferréol cherchera à faire bon usage pour le bien commun de ce qui lui sera alloué. Son combat continuera car cette action en responsabilité civile, dont le résultat ne peut qu’aboutir au versement de dommages et intérêts, s’inscrit dans une démarche plus large qui est celle de sa réhabilitation et de sa vie consacrée, ainsi que le respect du Droit au sein de l’Eglise.
Et pour les fans de calculs, le préjudice matériel est de 2 ordres :
1/manquement au devoir de secours due par la communauté à ses membres, quel que soit le motif du renvoi. Le montant des besoins s’est fondé sur des tableaux officiels de revenus minimums nécessaires pr son profil.
2/ En 2d lieu, une compensation est due au regard du nombre d’années passées dans la communauté et de divers autres critères : la vie dont elle ne pourra plus bénéficier (lieu de vie, entretien matériel, accompagnement et prise en charge de la retraite et de la fin de vie), ce qu’elle aurait pu développer dans la vie civile pendant ces 34 années, son état de santé, ses droits à la retraite, le temps qu’elle a consacré à la communauté et pendant lequel elle aurait pu développer une carrière professionnelle, etc… Finalement, les mêmes critères que pour la prestation compensatoire en matière de divorce. Mère Marie Ferréol a 57 ans, peu d’années de vie active lui restant et s’est vue interdire toute possibilité d’entrer dans une autre communauté (interdiction rare, même des auteurs d’agressions sexuelles ont cette possibilité). Les responsables de son renvoi ont délibérément interdit toute aide et prise en charge de ses vieux jours. L’indemnité n’en est que plus importante car doit prendre en compte ts ces aspects.
Le préjudice moral quant à lui est énorme: souffrance, douleur, conditions vexatoires subies, impact sur la réputation et la santé. Il a néanmoins bien fallu en limiter le montant et poser un chiffre, fixé à 70 000 €, au regard de tableaux fixant des indices de souffrance subie.
C’est en tous les cas le juge qui fixera, dans son pouvoir souverain d’appréciation, s’il estime que la preuve d’une faute et d’un préjudice est rapportée
Le jugement sera prononcé le 29 novembre.