La dernière livraison de Sedes Sapinetiæ (n°160, Juin 2022), revue de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, vient de paraître et nous propose notamment le “libre entretien sur l’été 1988” (RP Louis-Marie de Blignières), “les racines bibliques de la dévotion au sacré-Coeur de Jésus” (RP Albert-Marie Crignon) ainsi que “Le Motu Proprio Traditionis custodes à l’épreuve de la rationaité juridique” (RP Réginald-Marie Rivoire) (Extrait ci dessous).
Les mesures prises par le Saint-Père, d’une dureté surprenante comme le ton violent et accusateur de la Lettre d’accomapgnement, ont suscité une vive émotion parmi les fidèles attachés à ce que l’on avait pris l’habitude d’appeler, depuis le Motu Proprio Summorum Pontificum de Benoît XVI, “la forme extraordinaire du rite romain”. En même temps, les imprécisions, difficultés d’interprétation et d’application concrète du récent motu proprio ont soulevé chez les canonistes, les pasteurs et les instituts que leur droit propre lie aux formes liturgiques de la tradition latine antérieure, de nombreuses interrogations, qui rendaient nécessaire la rapide publication d’un document d’application. Le 18 décembre 2021, la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements (CCDDS) a rendu publique des “Responsa ab dubia sur certaines dispositions de la lettre apostolique en forme de motu proprio Traditionis custodes”. Il est cependant à craindre que ces “réponses” ne soulèvent à leur tour plus de difficultés qu’elles n’en résolvent.
Le présent article se veut une lecture canonique de ces documents, principalement sous l’angle de leur rationalité. On sait que la rationalité est une des caractéristiques essentielles d’une norme juridique, de sorte qu’en toute rigueur de termes, une norme irrationnelle n’est pas une norme et n’oblige pas. Nous envisagerons brièvement le statut juridique de ces documents. Puis nous étudierons longuement l’affirmation qui est au coeur de tout ce dispositif et sa raison d’être, à savoir que les livres liturgiques promulgués par saint Paul VI et saint Jean-Paul II sont l’unique expression de la lex orandi du rite romain. Nous verrons enfin comment nombre de principes fondamentaux du droit canonique sont mis à mal par ces nouvelles normes. Nous essayerons alors d’en tirer quelques conclusions : quel sera l’avenir de cette législation ?