De l’abbé Michel Viot :
Avant de reproduire le dernier méfait de ce journal qui se prétend chrétien, je crois juste de publier la vérité qu’il prétend contredire au point de la qualifier de mensonge comme nous le verrons. Je cite simplement ZENIT qui reproduit le 14 janvier 2020 le démenti formel de Monseigneur Gänswein, secrétaire du Pape émérite et porte-parole de la Maison Pontificale, donc du Pape François.
« Le Pape émérite, précise Mgr Gänswein à l’agence autrichienne Kathpress, a demandé que l’éditeur (Fayard) supprime son nom et sa photo de la couverture du livre et que sa signature soit enlevée également de l’introduction et des conclusions, auxquelles il n’a « pas collaboré ». En revanche, le texte contenu dans l’ouvrage est de lui. Il a été écrit à l’été 2019 – avant le synode sur l’Amazonie qui a soulevé la question de l’ordination d’hommes mariés – et mis à la disposition du Cardinal Sarah.
Ainsi le Pape émérite « savait que le texte devait apparaître dans un livre » sans en connaître le programme éditorial et sans signer aucun droit avec Fayard. Pour Mgr Gänswein, il s’agit d’un malentendu « sans remettre en cause la bonne foi du Cardinal Sarah ». Pour toute personne de bonne foi, et ayant de plus l’habitude de l’édition, l’affaire est simple. L’éditeur est en fait représenté, pour la circonstance par Nicolas Diat qui interroge d’habitude le Cardinal Sarah et édite avec lui, il a sa confiance et celle du Pape émérite. Ils n’ont bien évidemment parlé que de l’essentiel, la contribution du Pape émérite, sa forme, son anonymat ou non. Il est clair, au travers des lettres publiées par le Cardinal Préfet, que le Pape émérite a voulu exprimer publiquement sa pensée. Il en avait le droit, et je me permettrais d’ajouter le devoir. Celui qui fut le Successeur de Pierre de 2005 à 2013, même s’il a fait savoir que son renoncement le conduirait à la discrétion, n’a jamais fait vœu de silence absolu. Sur une question aussi capitale que le célibat des prêtres et surtout sur les conséquences que pourrait avoir son abrogation sur la doctrine catholique du sacerdoce, il ne pouvait rester muet.
J’ajouterai trois autres considérations à mes yeux capitales : si le Pape émérite avait voulu signer sur la couverture et avait été explicitement consulté, il aurait fait écrire, dans la suite logique de sa signature « Joseph Ratzinger Benoît XVI », sur son livre en trois tomes Jésus de Nazareth, « Joseph Ratzinger Pape émérite ». Ensuite, on ne fera croire à aucune personne connaissant un peu le Vatican que le Pape émérite n’ait pas parlé de ce désir de collaboration au livre du Cardinal Sarah avec le Pape François, actuellement régnant. Imaginer une opposition des deux Papes relève de la stupidité, autant perverse que pernicieuse. Accuser implicitement de duplicité Monseigneur Georg Gänswein mérite les mêmes qualificatifs que l’imagination précédemment citée. Ce prélat n’est pas ce qu’on appelle un politique, il travaille avec zèle et amour fraternel, aussi bien auprès du Pape François que du Pape émérite. Ce qui est écrit dans Témoignage Chrétien le traite lui aussi de menteur et, par conséquent, le calomnie.
Ainsi, le texte publié par le journal Témoignage Chrétien le 23 janvier dernier est donc proprement honteux. Rien que dans sa manière de poser le problème, il dégage la mauvaise odeur de la haine et de la méchanceté : « Deux Papes ? Deux auteurs ? Cherchez l’intrus… Ou bien le Cardinal Sarah ment, ou bien c’est Joseph Ratzinger, évêque émérite de Rome, pape Benoît 16ème du nom de 2005 à 2013. Car leurs versions divergent tellement qu’elles s’excluent l’une l’autre ».
Eh bien, une première réponse peut être donné à propos de l’intrus. Nous n’avons pas à le chercher bien loin, c’est le journaliste qui a écrit ces lignes, et surtout le journal qui l’emploie qui continue son sinistre travail de sape de l’Église catholique. Voici quelques expressions employées dans cet article : « Nous savons maintenant que c’est le Cardinal Sarah qui a menti… Il n’en reste pas moins que certains passages de cette imposture ont effectivement été écrits par Joseph Ratzinger… Sarah et Ratzinger rompent fortement avec tout le reste de l’Église réuni autour de ses évêques et de François, garant de l’unité…. L’Église n’est pas une arène politique…(ça s’appelle vulgairement du culot sous la plume de ce journaliste ! »). Puis vient un court passage sur les relations de la nature humaine du Christ avec les autres hommes où notre journaliste ne fait aucune différence entre ceux qui ont reçu l’ordination aux ministères sacrés, les baptisés et ceux qui ne le sont pas. Lui qui prétend renvoyer le Cardinal Sarah au catéchisme ferait bien d’y retourner lui-même ! Mais je crois son hérésie incurable, tout comme celle qui inspire Témoignage Chrétien et particulièrement sa patronne Christine Pedotti. Notre auteur termine dans des séries de conclusions plus que contestables parce que mélangeant complètement les problèmes, comme ce qu’il déduit du fait que Jésus ait choisi des disciples hommes et femmes, il met sur le même plan ce qu’on appelle le concile de Jérusalem et le dernier synode sur l’Amazonie. Pour tout étudiant en théologie en première année, il est bien clair que le Concile de Jérusalem a pris des décisions magistérielles (qui obligeait donc, ce qui explique sans doute les versions différentes données par le livre des Actes et l’épître aux Galates, alors que le synode sur l’Amazonie n’avait aucun pouvoir doctrinal). Je ne sais si la thèse du grand remplacement est vraie ou fausse, mais elle est plausible et crédible. Accuser le Cardinal Sarah de puiser son inspiration dans les égouts de Malebolge, une des régions de l’enfer de Dante, est proprement odieux ! C’est le lieu des fraudeurs en tout genre, menteurs, hypocrites, simoniaques. Oui, rien que cela ! Ce qui m’a incité à relire ce passage de la Divine Comédie. Aussi, après réflexion, il me semble que c’est l’auteur de l’article qui serait parfaitement à son aise à Malebolge ! Mais que ses amis de Témoignage Chrétien se rassurent, il y a de la place dans cet enfer et plein d’autres régions qui leur conviendraient. Je pense en particulier à la neuvième réservée à la Trahison dans toutes ses subtiles nuances et à cet endroit raffiné qu’est la Judaïe qui punit les traîtres à leurs bienfaiteurs. Trois têtes de Satan y dévorent éternellement les têtes de Brutus et Caïus (meurtriers de César) et Judas qui trahit Jésus. Mais il y a de la place et il existe un vaste choix d’autres régions adaptables à ce qu’il faut bien appeler la secte TC. Dans une de ses professions de foi, si l’on peut dire, elle se revendique comme un rassemblement de chrétiens non liés à l’Église ! Peut-on être chrétien tout seul ? Non évidemment. Mais alors, quand on s’obstine à vouloir rester catholique et qu’en fait on ne l’est plus, il faut mettre en doute le catholicisme de la hiérarchie, en lui faisant penser et dire n’importe quoi, en la divisant.
Ici l’occasion était belle. On pouvait prendre en flagrant délit d’opposition, les deux hommes que TC déteste le plus, Ratzinger et Sarah, pour les dresser contre le Seul garant de la vérité et de l’unité, le Pape François ! On ne connaissait pas ce respect de ce journal pour un Pape régnant ! Mais il s’agit de François, le Pape réformateur tant attendu ! Il est vrai que, dans un premier temps, nos chrétiens avancés l’ont compté parmi les leurs. Mais j’émets l’impression que, depuis un moment, ils commencent à comprendre, car s’ils sont complètement hérétiques, ils ne sont pas idiots, et sont aussi d’abord et avant tout des politiques.
Je ne crois pas du tout que, dans son exhortation apostolique concernant l’Amazonie, François changera quoi que ce soit à la règle de l’Église latine concernant le célibat des prêtres. Nous savons tous que des exceptions existent, et ce, depuis des siècles, mais dans l’Ordre hiérarchique qu’est l’Église, elles ne pourront jamais confirmer la règle. Dans le catholicisme, n’en déplaise à certains, le pouvoir est de droit divin, et ne peut venir que par le haut.
Les synodes, tout comme les conciles sont des assemblées consultatives et non délibératives. Et pour ces derniers, ses décrets et autres textes magistériels n’ont d’autorité que s’ils sont signés par le Pape en premier, en tant qu’Évêque de l’Église catholique, ce qui rejette toute forme de démocratie dans l’Église, qu’on appelle autrement hérésie conciliariste.
Alors si, comme je le pense, aucune ouverture ne sera faite en faveur de la levée de l’obligation du célibat des prêtres, c’en sera fait aussi de cette autre erreur catastrophique que serait l’ordination des femmes à un ministère sacré. Car même si on ressuscitait un diaconat féminin, il ne pourrait pas être de même nature que le diaconat masculin. Tout cela, notre Pape François le sait mieux que personne, et la secte TC se doute bien de ce qui va arriver. Alors elle pourra dire avec Bertrand Rivière (le journaliste de TC que je cite), que le bon Pape François allait faire de belles et bonnes réformes qui allaient faire avancer l’Église, mais qu’il a dû y renoncer à cause de « Sarah, héraut d’une droite inflexible et féroce, ne reculant devant rien pour contrer François et son ouverture jusqu’aux extrémités de la terre, jusqu’en Amazonie, jusqu’à l’ordination d’hommes mariés. Cette droite, elle ose tout, c’est même à cela qu’on la reconnaît ».
Bien ! Mais l’Église n’a-t-elle pas le droit et même le devoir de se défendre, par le ministère de ceux qui ont été, entre autres, ordonnés à cette tâche. Car il y a aussi une gauche qui ose tout, à commencer celle des journalistes, véritables curés rouges qui n’hésitent pas, eux, à condamner et à « excommunier » ceux qui ne pensent pas selon la ligne de leur parti. Et je pense aux pères spirituels journalistes de Monsieur Bertrand Rivière, qui virent dans Sékou Touré président de Guinée, seul chef d’État africain à refuser la Communauté proposée par le général De Gaulle, le symbole de l’anti-colonialisme, l’apôtre africain de la liberté. C’était en réalité un horrible dictateur communiste qui persécuta les chrétiens et chercha constamment à faire assassiner l’abbé Sarah qui n’était pas encore Cardinal ! C’était dans les années 1958, nos devanciers ne savaient pas, peut me répondre Monsieur Rivière. Est-ce une excuse quand on doit informer ? Car pour en rester à TC, fondé pendant l’occupation allemande par le père Pierre Chaillet SJ, résistant, dont on ne peut qu’admirer le courage, il est difficile d’oublier le glissement de plus en plus à gauche de ce journal, qui frôla des frontières que je préfère ne pas qualifier quand intervinrent les guerres coloniales, le risque de révolution communiste en France en 1947, et la douloureuse affaire des prêtres-ouvriers en 1954. Le Cardinal Saliège, Archevêque de Toulouse qui, pendant l’occupation, se trouvait du même côté que le père Chaillet, n’hésita pas à lui écrire le 31 juillet 1954 : « Témoignage Chrétien renie ses origines. Il n’est plus chrétien. Dans chaque numéro, il y a toujours un article désagréable, pénible pour l’Église, pour les catholiques… Je vous dis mon étonnement, ma peine qui va parfois jusqu’à l’accablement » (1). Ce sont ensuite les supérieurs jésuites qui demanderont à Pierre Chaillet de quitter le journal, ce qu’il fera parce qu’il avait le sens du devoir… « Ceci tuera cela ». Vinrent ensuite les temps de Georges Montaron, et présentement de Christine Pedotti.
Et ce dernier nom m’incite à conclure. Je ne me serais pas attardé si longtemps sur un article de journal qui touche peu de personnes en nombre, si par d’autres réseaux il n’exerçait pas une influence que j’estime néfaste pour toute l’Église catholique. Madame Pedotti a fait toute sa carrière grâce au public catholique qui a pu connaître sa pensée par des médias importants dans le monde catholique comme le journal La Croix. Et je pourrais citer d’autres médias. Je ne mets celui-ci en avant que parce qu’il bénéficie d’une clientèle captive, j’entends par là les abonnements des diocèses et des paroisses. Ce journal relayait (le 26/03/2019 dans sa communication numérique) une pétition du comité de la jupe, fondé en 2009 par Mesdames Anne Soupa et Christine Pedotti, réaffirmant « son opposition faite aux femmes dans leur propre Église. Leur exclusion de toute responsabilité est une cause aggravante des abus sexuels, car la structure masculine et célibataire du clergé entretient un monde clos où l’impunité règne… Une telle situation est à l’origine des abus envers les femmes, les enfants et les personnes fragiles… ». Après on tombe dans le grotesque, il n’y manque parmi les victimes que les chiens et les chats.
Cela dit, il est vrai qu’à Rome, des années 905 à 963, des femmes, et surtout deux sœurs, Marozie et Théodora, très belles et très riches, paraît-il, furent à l’origine de l’élection de plusieurs papes, fils ou amants : j’en ai dénombré une douzaine. Il ne semble pas que les critères de spiritualité ou de théologie aient beaucoup joué dans les choix de leur candidat. D’ailleurs, ces messieurs étaient dans l’ensemble jeunes, mais ne vivaient pas longtemps, le record de jeunesse étant détenu par Jean XII, pape à 16 ans (955-963). On finit donc par passer à autre chose. Le 13 avril 1059, le Pape Nicolas II décréta que le Pape serait élu par les seuls cardinaux évêques et que l’approbation impériale était abolie.
Voilà ce que la tradition historique nous a laissé quant au rôle des femmes dans la direction de l’Église. Il me semble qu’il faut le rappeler à des dames qui attribuent les vices qui surviennent dans l’Église à la masculinité de sa direction. Je n’accuse pas Madame Pedotti de vouloir être une nouvelle Marozie, mais elle doit savoir que le triomphe de ses revendications pourrait donner des idées à certaines personnes moins vertueuses qu’elle.
Cela dit, elle et ses amis manquent de vertu journalistique et de loyauté vis-à-vis de leur Église.
Pour le salut de leur âme, je souhaite leur conversion rapide ou l’échec cinglant de leur publication, comme de celles qui relaient complaisamment des idéologies anti-catholiques.