Cela fait plus de 30 ans que le Dr Wilfred van Oijen, « aide » d’innombrables patients gravement malades à mourir. Peu après son départ à la retraite l’an dernier, la Ville d’Amsterdam l’a proclamé, dimanche, « Amstellodamois de l’année » dans un Théâtre municipal (Stadsschouwburg) bondé. Souriant et heureux, celui qu’on surnommait « Doctor Death » a accueilli sa récompense, en assurant :
« J’ai dû répondre de mon travail devant le juge. Cet événement me fait l’effet d’une réhabilitation. »
A-t-il jamais regretté ses gestes d’euthanasie ? « Si c’était le cas, je ne pourrais pas être aussi à l’aise ici ce soir. »
Le Dr van Oijen, médecin généraliste, a joué un rôle de tout premier plan dans les opérations médiatiques qui ont visé à rendre l’euthanasie « acceptable » aux yeux du public. Un documentaire signé Mark Nederhorst l’avait suivi dans son « assistance » aux derniers soupirs d’un nommé Cees van Wendel en 1994 : atteint de myopathie, le malade avait eté piqué par le Dr van Oijen sous l’œil de la caméra. Death on Request (mort à la demande) avait suscité une controverse mondiale mais les résultats sont là : l’euthanasie a été légalisée par la suite aux Pays-Bas.
Une critique très fine de ce documentaire souligne à quel point la parole du malade avait été confisquée par sa femme, Anthoinette, et par le médecin, celui-ci détaillant le caractère catastrophoque de l’état du malade et son évolution probablement très rapide et celle-là « traduisant » toutes les paroles (pourtant intelligibles) de Cees pour redire et surtout resolliciter sa décision d’en finir. Le médecin, lui, répète : « Il faut nous le dire maintenant, tout de suite, peut-être que lors de ma prochaine visite tu ne seras plus en état de te faire comprendre ! » Pas un geste envers le malade, pas une marque d’affection, pas un mot pour dire qu’il sera possible de le soulager si son état se détériore : dans le film, il était clairement l’objet dont on ne voulait plus s’encombrer.
A Amsterdam, dimanche, Van Oijen a remporté les voix de 18 % du jury établi par le journal national néerlandais Het Parool. Laissant derrière lui les « deuxièmes ex aequo » qui ont obtenu 16 % des voix : Stefano van Delden, qui a monté une équipe de football pour les jeunes de la rue d’Amsterdam, et Atef Salib, fondateur du seul café homosexuel arabe de la capitale néerlandaise.
Le voici donc devenu exemplaire. Le Dr van Oijen avait été jugé coupable en 2001 pour une euthanasie non conforme aux exigences du moment pratiquée en 1997 sur une femme de 84 ans. Mais seule un peine d’une semaine avec sursis été prononcée dans la mesure où il avait « agi honorablement et conformément à sa conscience. »