Notre confrère L’Homme Nouveau vient de faire une sensationnelle divulgâchion (terme québécois qui signifie : divulguer ce qui va arriver, en gâchant le plaisir – en l’espèce celui des gardiens du secret pontifical qui voulaient nous faire une surprise) : il publie sur son blogue un article dévoilant le contenu – en son état actuel – du projet de réforme de la Curie.
La parution de la Constitution apostolique Prædicate Evangelium, « sur la Curie romaine et son service de l’Église dans le monde d’aujourd’hui » pourrait intervenir le 29 juin, sauf qu’« on est actuellement dans la phase de consultation des Conférences des évêques sur ce projet : on risque donc paradoxalement de voir promulgué un texte magnifiant la synodalité, élaboré et imposé par le centre romain ». Un procédé de despotisme éclairé en somme, qui impose au peuple les lumières de la démocratie.
D’un côté, dit l’article fort bien renseigné, on a l’impression que la montagne accouche d’une souris : on nous a parlé d’une réforme radicale qui ferait que plus rien à Rome ne sera jamais plus comme avant, et on nous présente simplement un nouvel organigramme, avec regroupement d’un certain nombre d’organismes : le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie absorbe les Conseils pour les laïcs et pour la famille ; le Dicastère pour le service de développement humain intégral regroupe les compétences des Conseils « Justice et Paix », « Cor Unum », pour la pastorale des migrants, et pour la pastorale des services de santé ; le Dicastère pour l’éducation et la culture regroupe une Congrégation et un Conseil. Avec, ce qui est plus neuf, la consécration de deux nouveaux organismes, le Dicastère pour la communication et le Secrétariat pour l’économie. Mais avec une secrétairerie d’État qui, malgré toutes les déclarations contraires, restera plus puissante que jamais.
D’un autre côté, nous dit L’Homme Nouveau, on veut faire passer le message que le temps d’une nouvelle ecclésiologie, une ecclésiologie synodale, est arrivé : « La Curie agit comme une sorte de plateforme et un forum de communication par rapport aux Églises particulières et aux Conférences des évêques ». Et puis encore : « Les Dicastères, les bureaux et les organismes de la Curie romaine doivent toujours collaborer pour les questions les plus importantes avec les Églises particulières et les Conférences des évêques ». Avec des signes appuyés de correspondance aux thèmes dans l’air du temps : voici, par exemple, un Dicastère pour le service du développement humain intégral. Le Préfet de ce Dicastère et ses employés auront la rude tâche de promouvoir « un développement équitable et intégral de l’atmosphère pour la conservation de la maison commune, la protection des biens communs, que sont l’air, la terre, l’eau et le climat ».
« Mais l’élément le plus marquant de ce texte est l’humiliation symbolique de la Congrégation pour la doctrine de la Foi (anciennement Saint-Office). […] Même après Vatican II, la Congrégation pour la doctrine de la Foi était restée, bien qu’amoindrie, le premier des dicastères. Devenu aujourd’hui Dicastère pour la doctrine de la Foi, égal aux autres en dignité, il prend rang désormais après le Dicastère pour l’évangélisation. L’évangélisation l’emporte sur la doctrine, alors qu’on avait toujours considéré que l’évangélisation n’était rien d’autre que la diffusion de la doctrine enseignée par le Christ. On ne saurait mieux marquer qu’on est au terme d’une évolution qui a vu le pastoral remplacer le dogmatique ».
Si e “pastoral” l’emporte sur le dogme, l’Eglise sera ce que dénonçait Jésus : des aveugles conduisant d’autres aveugles. (Mt 15,14)
Abbé Bernard Pellabeuf
A priori, si les Québecquois ont bien créé le verbe « divulgâcher » , il ne semble pas que le substantif « divulgâchion » existe. D’ailleurs, dans l’esprit, divulgâchis serait plus approprié.
Cet article a parfaitement raison de souligner l’évolution de l’église qui consacre la priorité du pastoral sur le dogmatique, celle de la miséricorde sur la norme , celle de l’Ecriture sur sa rationalisation à postériori , celle de la foi vécue sur l’intellectualisation de la foi . Qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, c’est la ligne du pape François .
avant de réformer la Curie, il faudra mettre le cardinal Parolin à la réforme (je pensais à une autre personnalité “plus haute que lui” dans la hiérarchie des dignités, mais il faut être respectueux….).
pour M. Leibowicz
On le déplore ; premier point
on fait en sorte que l’on destitue ceux qui ne respectent pas l’enseignement de Jésus-Christ : deuxième et dernier point.
Voilà.