Notre confrère Paix Liturgique publie une intéressante étude sur l’ordo de 1969 (dans sa lettre 623 du 11 décembre) offrant quelques rappels doctrinaux et spirituels.
Un glissement vers le « faire simplement mémoire »
Chacun des éléments examinés dans cette lettre et dans les deux qui précèdent peut paraître en soi d’une importance relative. Mais la somme en est très conséquente : de l’abandon d’un rituel contraignant à la multiplication des options, de la célébration dans la plupart des cas face au peuple à l’usage général des langues communes, de la très grande liberté dans les monitions et les commentaires à la place accrue des paroles (pratiquement toujours à haute voix) au détriment du secret rituel et sacré, de la révérence affaiblie vis-à-vis de l’eucharistie à l’expression plus faible du sacerdoce hiérarchique et surtout de la réalité du sacrifice sacramentel, en passant par l’adoption d’un certain nombre de gestes et usages de la vie ordinaire, tout l’ ensemble conduit à glisser du faire mémoire au faire simplement mémoire. Pour autant, nous ne remettons pas en cause la validité de cette messe nouvelle, mais cependant, en raison du fait que la structure du rite et des prières est beaucoup plus lâche que dans l’Ordo ancien, la question de la validité peut légitiment se poser lors de célébrations fantaisistes ou blasphématoires que certains prêtres croient pouvoir s’autoriser en profitant de cette normativité peu contraignante.
Mais ce ne sont pas seulement les prêtres « progressistes » qui bricolent le rituel mou du NOM. Les prêtres « classiques » le font aussi, en sens inverse (génuflexions interminables, commentaires insistants : « Maintenant le prêtre va consacrer le pain qui va vraiment devenir le Corps du Seigneur », etc.). On peut même dire que la mise en avant de la « présence » du célébrant, caractéristique de la messe nouvelle, est une sorte d’obligation compensatoire des manques intrinsèques de cette messe. Pour que la célébration n’incline pas vers un simple mémorial, les célébrants pieux du nouvel Ordo font en sorte de manifester leur foi et leur piété personnelle pour pallier les défectuosités de cet Ordo. Moins le rite parle de présence réel le et de sacrifice, plus le prêtre doit manifester qu’il y croit pour entraîner la foi des assistants. Ce qui bouscule le principe fondamental d’objectivité des sacrements, lesquels produisent la grâce, non pas d’abord en raison de ce que croit personnellement le célébrant, mais par ce qu’il fait publiquement au nom de l’Église.
Ce n’est pas tout à fait exact: les règles du Missel romain de 2002 sont assez claires là-dessus. Pour célébrer correctement selon ce missel, il suffit de lire les rubriques et la PGMR:
“Ainsi on sera attentif à ce qu’établissent cette Présentation générale et la pratique léguée du Rite romain, et à ce qui concourt au bien commun spirituel du peuple de Dieu, plutôt qu’aux penchants ou jugement privés.
Ainsi, célébrer le nouvel ordo de manière traditionnelle ne revient pas à le trahir; au contraire, c’est le célébrer réellement.
Et cela permet de passer outre les affirmations bêtes et méchantes du style “cet ordo missae est défectueux” (comme si l’ancien était parfait).