Le nouvelle archevêque de Paris dit A Dieu à ses diocésains :
Je me rappelle ce jour précis où dans la salle à manger de mon appartement je suis tombé à genoux pour dire enfin : « que ta volonté soit faite » de toutes les fibres de mon être. Le combat fut long et difficile, mais je savais désormais que ma vie ne m’appartenait plus, qu’elle était à Dieu. Où m’emmènerait-il ? Je n’en avais pas la moindre idée. Était-ce au loin en mission, dans un monastère, religieux en communauté ou encore prêtre diocésain ? Je n’en savais rien. Je connaissais l’Église, bien sûr, mais presque rien de l’institution, c’est-à-dire de son fonctionnement.
Un prêtre rencontré lors d’une confession m’accompagna sur ce chemin improbable et je rentrais ensuite à la Maison Saint-Augustin en année propédeutique. Quand il m’arrivait d’imaginer mon avenir, je me voyais volontiers missionnaire itinérant. Drôle d’idée qui ne semblait pas correspondre aux vues de mes supérieurs. Quoique ? En effet, depuis mon entrée au séminaire j’ai déménagé 9 fois.
Dès que j’embrasse avec délice la vie de sédentaire, je dois partir ailleurs. Je n’aurai choisi aucune des missions qui m’ont été confiées, et pour cause, ne connaissant que peu de choses aux responsabilités pastorales d’un prêtre.
Et voilà qu’une fois encore, l’Église me donne une nouvelle mission. Le pape me demande d’accepter la charge du diocèse de Paris. C’est toujours au moment où je pense commencer à prendre véritablement la mesure de ma tâche que je dois à nouveau me transporter ailleurs pour la dixième fois. Ma vie sacerdotale a été une longue suite d’adieux et d’« à Dieu » en ce sens où l’appel m’oblige à sortir de mes zones de confort pastoral. Si nous étions en entreprise, je dirais que ce mouvement perpétuel ne produit guère d’efficacité. Mais nous sommes en régime ecclésial et la fécondité divine, qui ne peut venir que de l’Esprit Saint, permet de garder l’humilité nécessaire pour suivre le Christ partout où il vous entraîne.
Il faut du temps pour apprendre à aimer les personnes qui vivent sur un diocèse. Car au-delà des sympathies ou des sentiments naturels, il convient de les aimer comme Jésus lui-même les aime sans jugement, sans a priori, et sans exception. Chaque jour je prie pour tous ceux qui me sont confiés, c’est-à-dire l’ensemble des habitants des Hauts-de-Seine, car l’amour du Seigneur ne s’arrête pas aux frontières de nos églises. Ma prière ne s’arrêtera pas, évidemment, avec mon départ et tous ces visages rencontrés, toutes ces personnes dont l’engagement faisait mon admiration, tous ces prêtres généreux et inventifs dont l’estime fraternelle est exemplaire, tous nos diacres (et leurs épouses, aussi, bien sûr !) tellement attachés à leur diocèse, resteront toujours dans mon cœur et dans l’offrande quotidienne de ma vie. J’étais très impressionné d’entendre les fidèles prier pour moi à chaque messe car cela me notifiait la mesure spirituelle et la gravité de ma charge. Je l’avoue, j’ai toujours un pincement au cœur en pensant à cette phrase de Jésus : « à qui on a confié beaucoup, on demandera beaucoup ». La tentation est grande de prendre les jambes à son cou et d’aller se cacher quelque part. Mais la foi et la confiance totale en Dieu qui jamais ne nous abandonne, me permet de continuer l’étrange chemin sur lequel il me conduit.
Chères sœurs, chers frères, chers amis, je compte vraiment sur votre prière et je vous confie au Seigneur qui vous aime et vous donnera un pasteur selon son cœur.
+ Monseigneur Michel Aupetit
Évêque de Nanterre