La Colombie a accueilli de mercredi à vendredi dernier un Forum international pour la dépénalisation de l’avortement, lieu de rencontre et d’échanges pour les activistes pro-avortement qui tentent de faire reconnaître ce qu’elles appellent les « droits sexuels et reproductifs » dans l’ensemble du continent latino-américain où l’avortement légal demeure assez largement l’exception. La Colombie devait y être montrée en exemple, puisque depuis mai 2006 la Cour constitutionnelle a prévu des exceptions à l’interdiction générale de l’avortements (les « classiques » : viol, malformation fœtale, danger pour la santé de la mère. La militante pro-avortement française qui avait œuvré pour cela, Florence Thomas, était la figure d’honneur du Forum de la semaine dernière et c’est elle qui a ouvert les travaux.
Le but de la rencontre était de mettre en commun les expériences pour déterminer celles qui sont les plus efficaces dans les différents contextes socio-politiques latino-américains. Très clairement, et notamment par la voix de Luisa Cabal, directeur de l’International Legal Program Center for Reproductive Rights de New York, on expliqua qu’il faut tirer profit de la « jurisprudence internationale » sur le « droit à l’interruption volontaire de grossesse » pour faire pression sur les gouvernements et faire ouvrir le débat dans la région, le seul fait qu’on en parle étant déjà présenté comme une première victoire.
Peu importe qu’aucun traité international contraignant n’impose (pour l’heure, et fort heureusement !) la reconnaissance du « droit à l’avortement », ces militantes s’appuient sur l’air du temps et la répétition obsessionnelle d’un principe qui commence à faire plus nettement surface, notamment dans les recommandations et autres résolutions européennes par exemple.
A l’issue des trois jours de réflexion, on décida donc que le modèle mexicain est celui à suivre : la légalisation de l’avortement dans le District Fédéral de Mexico pendant les 12 premières semaines de gestation, fruit d’un intéressante « coopération » avec le Parti révolutionnaire de gauche qui cherchait à s’imposer dans la région et qui, au pouvoir, a permis l’adoption d’une loi très libérale. C’est ce qu’expliqua Maria Consuelo Mejia, directrice des « Catholiques pour le droit de décider » (sic) : pour elle, l’un des volets d’une réponse « multi-stratégique » est d’imposer la reconnaissance de la laïcité de l’Etat pour déterminer (comprendre : « limiter ») le rôle de l’Eglise et clarifier celui des politiques.
Il y eut aussi un consensus pour affirmer que tous les groupes et militants féministes sauront tirer parti des « lois ambiguës » pour faire pressions sur les Etats et obtenir la légalisation de l’avortement. L’idée étant de partir des légalisations pour les cas limites (comme au Nicaragua actuellement) mais avec le clair objectif d’une légalisation sans conditions pendant les premières semaines de grossesse, en invoquant les « traités internationaux » (qui pourtant n’obligent personne dans ce domaine).