Mgr Stanislas Lalanne, évêque de Pontoise, estime que Monsieur Macron, qui vient de réaffirmer le droit absolu à l’avortement, alors que Marine Le Pen, qui souhaite revenir sur le délit d’entrave numérique à l’avortement, respecte mieux l’être humain que sa rivale. Il faudra qu’il nous explique un peu mieux… :
Le premier tour des élections présidentielles a non seulement éliminé les candidats des partis traditionnels, mais également tous les candidats de gauche. Habitués à choisir entre la gauche et la droite, les Français doivent aujourd’hui choisir entre l’extrême droite et une nouvelle force politique qui se dessine. Cette situation inédite dans la vie politique française perturbe bon nombre de citoyens.
Les évêques ont proposé à plusieurs reprises des repères qui permettent de guider le choix et je vous invite à relire ces textes. Je retiens deux points qui me paraissent fondamentaux.
Le premier est celui du respect inconditionnel de tout être humain. L’Evangile nous presse de reconnaître en toute personne un frère ou une sœur en humanité et de se faire le prochain de tous ceux qui croisent nos routes. Les résultats du premier tour traduisent une fracture sociale dans notre pays. Une fracture qui devra être mieux analysée et qui demande d’ores et déjà, de la part de chacun de nous, une attention accrue à toutes les fragilités et pauvretés dans notre société dont je suis témoin chaque jour comme évêque du Val-d’Oise. Mais cette fracture sociale ne nous exonère pas de l’accueil de ceux qui fuient leur pays à cause des guerres ou des famines. Ce sont aussi des frères et sœurs en humanité. L’accueil des réfugiés et des migrants fait partie de la grande tradition de l’Eglise.
Le second point concerne la recherche du bien commun, la recherche d’une forme de vivre ensemble qui permette à chaque personne et à chaque famille de trouver leur place dans la société. Le vivre ensemble ne peut se construire sur la méfiance, l’exclusion et le rejet de l’autre. Une véritable solidarité n’existe que si « tous, nous sommes vraiment responsables de tous ». Ce sens de la solidarité et de la responsabilité s’apprend d’abord en famille, qui joue un rôle indispensable dans la société. Cette solidarité ne peut se limiter à notre pays. D’abord, parce qu’un certain nombre de questions, comme l’écologie, les migrations mais aussi la défense, ne peuvent être résolues à l’échelle de chaque pays. Elles nécessitent des collaborations internationales. Ensuite, parce que la France a un rôle à jouer en Europe et dans le monde.
L’Europe peut être critiquée pour ses dérives technocratiques, mais elle assure la paix, la stabilité et le respect des droits de l’homme, ce qui est fondamental. Sortir de l’Union européenne mettrait aujourd’hui la France dans une position d’isolement qui ne correspond pas à ses valeurs. La France et l’Europe ont une responsabilité à l’égard de l’humanité et des générations futures. C’est ensemble que nous pouvons travailler à humaniser l’économie, à préserver « notre maison commune » et à protéger la dignité humaine à tous les âges de la vie.
Je suis bien conscient qu’aucun programme politique ne correspond en tous points aux exigences de l’Evangile, ni aujourd’hui, ni demain. Sans entrer dans le détail de chaque programme, dont beaucoup de mesures relèvent de la compétence du Parlement, il s’agit d’apprécier les visions globales de la société qu’Emmanuel Macron et Marine Le Pen proposent. L’attention aux deux points fondamentaux – respect inconditionnel de tout être humain et recherche ensemble du bien commun – font que je ne peux pas voter pour une candidate porteuse d’un projet de société marqué par le rejet de l’autre et l’isolement de la France.
J’attends, en particulier, d’un président de la République qu’il œuvre à rétablir la confiance, la confiance entre tous ceux qui habitent en France et la confiance des Français en leur pays. Qu’il soit attentif au respect de la vie, à toutes les fragilités et pauvretés. Qu’il ait le souci que la France soit une terre où il fait bon vivre pour tous en recherchant inlassablement une meilleure justice sociale.