Extrait de l’éditorial de Philippe Maxence dans le dernier numéro de L’Homme Nouveau :
“Réunis en Assemblée plénière à Lourdes, début novembre, les évêques de France ont publiquement demandé pardon pour les crimes de pédophilie dans l’Église. Président de la Commission permanente de lutte contre la pédophilie (CPLP), Mgr Crepy, évêque du Puy-en- Velay, a ainsi déclaré à ce propos : « Nous avons pu en être complices, nous évêques, par notre silence, notre passivité ou notre difficulté à entendre et à comprendre la souffrance ». Au printemps dernier, l’épiscopat français, secoué par l’affaire Preynat, avait mis sur pied tout un dispositif afin d’écouter les victimes et de répondre à leur souffrance, mais aussi pour prévenir avant qu’il ne soit trop tard. Cet effort passe évidemment par un renforcement de la formation sur ce sujet dans les sé- minaires.
Il ne m’appartient pas de décerner des certificats de vertu, ni des bons points en une matière aussi grave. La repentance et la demande de pardon appartiennent à notre monde chrétien. Il n’est pas toujours facile d’en user au nom de l’institution. Nous n’y engageons pas uniquement nous-mêmes et il n’est pas toujours sain de battre sa coulpe sur la poitrine de nos pères.
Dans un passé récent, nous avons pourtant assisté à une floraison de ce type de repentance, conduisant, paradoxalement mais inexorablement, à une déperdition du sens même de celle-ci. Si l’on me passe le jeu de mots trop facile, trop de repentance tue la repentance. Mais, aujourd’hui, nos évêques ne reviennent pas seulement sur les silences de leurs prédécesseurs. Ils confessent leur propre « silence » et leur propre « passivité ». Nous ne sommes pas à leur place et nous ne pouvons juger en toute objectivité le poids qui pèse sur leur conscience. Cependant, nous osons formuler deux espérances.
DEUX ESPÉRANCES
La première de ces espérances est que cette démarche ne réponde pas seulement à une pression médiatique, qui est rarement de bon conseil, mais à une volonté affirmée de réparer un crime commis contre les hommes et aussi contre Dieu. « Ce que vous faites à l’un de ces petits, c’est à moi que vous le faites » déclare très nettement le Christ. À cette parole, on mesure le poids de ce péché. Or étonnamment, la notion même de péché semble complètement absente de cette démarche.
La seconde de ces espérances est que l’on n’abandonne pas les forces surnaturelles pour combattre ce fléau. Si la grâce nécessite la nature, celle- ci est aussi incapable par ses propres forces de se guérir. Il faut bien constater pourtant que dans tout l’arsenal mis en place par les évêques pour lutter contre la pédophilie (de la psychologie à la communication en passant par Internet et la formation), il ne semble pas avoir été prévu de recourir aux armes spirituelles requises contre cette sorte de démons. On n’en fait certes pas forcément étalage sans discernement auprès du grand public. Mais espérons vraiment que l’on y recoure. Sans quoi il est à craindre que la lutte contre la pédophilie soit vaine.
Dans un même mouvement, l’Église de France aurait pu également demander pardon et faire pénitence pour le crime d’avortement auquel les paroles de Mgr Crepy que j’ai cité plus haut s’adaptent si parfaitement. Mais il est vrai que demander pardon et faire pénitence pour un tel crime impliquerait cette fois de lutter contre la pression médiatique… […]”