Aux Etats-Unis, des candidats à la fécondation in vitro (FIV) sont prêts à débourser jusqu’à 50.000 $ pour des ovules prélevés sur des donneuses inscrites dans de prestigieuses universités telles Harvard. Si en France, tout don de matériel génétique doit être, légalement, anonyme et gratuit, la règle outre-Atlantique est plus souple, imposant simplement un montant limite à ne pas dépasser. Mais avec les sommes astronomiques déboursées pour des gamètes « bien nés », ces limites sont fréquemment et largement dépassées par les agences spécialisées dans leur fourniture.
Selon The Hastings Center Report cité par le site de veille bioéthique australien BioEdge, l’analyse des petites annonces publiées par ces agences dans les journaux des universités américaines laisse constater que dans 25 % des cas, la somme proposée dépasse les 10.000 dollars, somme limite fixée par les directives officielles, toute proposition à plus de 5.000 $ devant en outre étant spécifiquement justifiée.
Ce n’est pas le cas pour ces annonces où la somme promise est directement proportionnelle à la cote de l’université visée et aux performances académiques personnelles de la candidate.
Pour le bioéthicien John A. Robertson de l’Université du Texas, l’existence des directives limitant le paiement proposé aux donneuses d’ovules n’a pas lieu d’être : « Après tout, nous permettons aux individus de choisir leur partenaire ou leur donneur de sperme sur la base de ce genre de caractéristiques. Pourquoi ne pas choisir les donneuses d’ovules de la même manière ? »
D’étape en étape, on arrive ainsi à une marchandisation de plus en plus insupportable de la vie humaine : de plus en plus voyante, devrais-je dire, puisque la fécondation in vitro, même avec des dons de gamètes anonymes et gratuits comme en France, donne une apparente maîtrise de la vie au technicien et sépare volontairement la filiation de l’acte d’amour qui normalement, donne naissance à la vie, après quoi toutes les dérives sont envisageables.
Et il ne s’agit pas seulement d’éviter que des pressions soient indûment exercées sur les donneurs, et spécialement sur les femmes, pour avoir accès au précieux matériel générique – au terme de procédures longues, pénibles et non sans conséquences potentiellement néfastes sur la santé. La FIV présente un taux de réussite relativement bas : beaucoup d’embryons fécondés sont détruits au cours du processus, certains sont éliminés par « réduction embryonnaire », encore d’autres resteront « surnuméraires » et seront voués à la congélation indéfinie, à la recherche ou à la destruction pure et simple. Se pose aussi la question de la santé des enfants conçus in vitro chez qui le taux de handicaps et autres anomalies est plus élevé que chez les enfants conçus naturellement.
On peut voir ici le discours des agences de récolte d’ovules avec notamment un descriptif du processus de recrutement des donneuses. Avec leurs questionnaires (histoire médicale, MST, diplômes et notes scolaires et universitaires, CV professionnel, appartenance à tel ou tel club, engagement dans le volontariat, goûts personnels, hobbies…), leurs tests médicaux et psychologiques (comment vivrez-vous avec l’idée que vous aurez un lien génétique parental avec l’enfant d’une autre ?), leurs priorités (il paraît qu’il manque certains « profils » : juif, américano-asiatique, afro-américain)…
Puis vient l’heure des contrats et des avocats, dont les frais sont assumés par les agences : le don d’ovule doit s’accompagner d’une renonciation légale aux droits parentaux, il peut être anonyme mais la donneuse a le choix de laisser son identité accessible à l’éventuel enfant qui naîtra s’il souhaite connaître sa mère génétique lors de sa majorité, et il semblerait que cette option soit de plus en plus fréquente.
Un vrai choix sur catalogue !