Le 22 juillet 2016, ce sont plus de 500 personnes qui sont venues vivre le pèlerinage à sainte Marie-Madeleine à Vézelay, mais également fêter les 70 ans du pèlerinage de la Paix de 1946.
Mgr François Tricard était présent lors de la Croisade de la Paix de 1946 et le 22 juillet 2016 pour les 70 ans, voici son témoignage :
Il y a 70 ans …
La Madeleine, à Vézelay, est pour moi un moment important de l’année. En 1946, pour la Croisade de la Paix, j’avais 8 ans, j’étais enfant de chœur. Nous sommes partis en car depuis Sens jusqu’à la Colline éternelle. On s’arrêtait entre Voutenay et Sermizelles pour la vénérer de loin. Depuis Asquins, c’était la marche jusqu’à la Cordelle. Ma sœur Monique se souvient bien de l’entrée des croix dans la basilique et de la Croix des Allemands. Des membres de ma famille d’Auxerre portaient une des croix Pierre, Michel, Germain… Nous avons les photos. Personnellement, j’étais avec les servants d’autel dans le chœur de la basilique. Je me souviens surtout du nonce, Mgr Angelo Roncalli, aujourd’hui saint Jean XXIII. Je faisais attention à lui. Je tenais la traine. Depuis, j’ai été plusieurs fois son enfant de chœur, à Auxerre, à Pontigny. Nous avons encore en mémoire le « Mystère de saint Bernard », le spectacle présenté par François Brochet sur la terrasse de Vézelay. Nous nous souvenons aussi des 40 ans, en 1986, avec Mgr Eugène Ernoult et Henry Rouyer. La messe avait été télévisée. J’ai gardé la video VHS. Le frère franciscain Pascal Seynhaeve présentait le tympan, interviewé par la nièce d’Henry Rouyer.
En 1946, chaque croix représentait des provinces, des États impliqués dans la seconde guerre mondiale : Alsace, Belgique, Angleterre, Italie… et bien sûr l’Allemagne. 70 ans après, chaque croix représente une détresse ou plusieurs dont souffre aujourd’hui l’humanité. « Rien ne ressemble plus à l’épopée humaine que le chemin de croix ».
En 1946, le père Doncœur propose un pèlerinage « pour vaincre les forces de la haine », sous la forme d’un chemin de croix, portées à pied depuis l’Angleterre, le Luxembourg, la Belgique, la Suisse, l’Italie, et différentes régions. Elles doivent converger à Vézelay en la fête de la Madeleine.
Ces croix drainent des foules : à l’arrivée à la Cordelle, les pèlerins sont des dizaines de milliers ! Le camp de prisonniers allemands de Vézelay est réquisitionné pour monter des tentes.
Des prisonniers demandent alors à participer. Ils construisent une quinzième croix avec les poutres d’une maison bombardée : signe fort d’un désir de pardon. La croix allemande, réunie au cortège, est portée par trois prêtres, allemands, anglais et français. L’émotion est intense ; il s’y mêle ressentiment et espérance, souffrance et volonté de réconciliation.
Ces croix sont désormais dans les bas-cotés de la basilique. La quinzième est marquée de ces simples mots « Allemagne 1946 », symbole de la force de l’intercession pour la paix.
Le Cardinal Vingt-Trois a prononcé l’homélie. On peut la réécouter ici.