Chronique du dimanche 5 juin de Mgr Jean-Michel di Falco Léandri :
“Plusieurs fois déjà, j’ai évoqué la Syrie à partir de confidences de personnes qui ont choisi de rester là-bas malgré le conflit qui dure.
Mais l’actualité en chasse une autre, et la Syrie intéresse de moins en moins les médias. Heureusement, des hommes et des femmes de bonnes volontés agissent sans pour autant faire la Une. Suite aux appels et aux actions du pape François demandant aux chrétiens à se mobiliser, une initiative originale pour agir là-bas est née en France à l’initiative de chefs d’entreprise chrétiens : des entrepreneurs qui aiment entreprendre, et qui donc entreprennent.
Pour reconstruire la Syrie et l’Irak et permettre aux habitants de rester chez eux ou d’y revenir, ces entrepreneurs proposent à des entreprises et holdings de placer une partie de leur trésorerie disponible dans un fonds dédié agréé par l’AMF, l’Autorité des marchés.
Ces dirigeants d’entreprise se réuniront ce mardi 7 juin. Ils cherchent à mobiliser d’autres dirigeants pour étoffer ce fonds. [NdR : Présentation du fonds de partage sur le site internet de l’Œuvre d’Orient]
Dans le système proposé, les investisseurs conservent leur capital et leurs intérêts. Le gestionnaire, lui, reverse 40 à 50% de sa commission à l’Œuvre d’Orient en soutien d’entrepreneurs de Syrie et d’Irak pour reconstruire entreprises, logements, hôpitaux, églises, écoles, et bien d’autres choses encore.
Comme dit l’un de ces dirigeants français, je le cite : « Je me mobilise pour cette initiative car je ne peux supporter de rester les bras croisés face à cette situation dramatique, et cela donne du sens selon moi à la trésorerie disponible de mon entreprise, sans pénaliser ses actionnaires puisque c’est le fonds de gestion qui reverse une partie de sa commission. J’y vois aussi une manière d’être entrepreneur engagé pour l’amélioration de la réalité dans cette région du Moyen-Orient. » Fin de citation.
Vous me direz : « Mais ce n’est pas un don, et donc ça reste intéressé ! »
À cela on peut répondre: « Et alors ? Au moins ils agissent, et en plus tout le monde sort gagnant dans ce système. »
Ça me rappelle une querelle qui avait éclaté au temps du Roi Soleil entre les évêques Fénelon, surnommé le Cygne de Cambrai, et Bossuet, surnommé l’Aigle de Meaux. Les historiens et les théologiens ont appelé ce conflit « la querelle du pur amour ». Fénelon disait que notre amour pour Dieu devait être complètement désintéressé, c’est-à-dire gratuit et dénué de tout mobile égoïste. Bossuet, lui, ne voyait pas en quoi il était mal de chercher son bonheur et son intérêt tout en aimant Dieu.
Je partage l’avis de Bossuet parce que plus humain et plus chrétien.
L’égoïsme n’est pas source de tout mal. Jésus a demandé d’aimer les autres comme on s’aime soi-même. Donc encore faut-il s’aimer soi-même pour aimer l’autre, non ? Et puis aimer l’autre ne veut pas dire se renier soi-même. Le pape François l’a rappelé récemment en ce qui concerne les échanges dans le couple par exemple. Je le cite : « L’idéal du couple ne peut pas se définir seulement comme une donation généreuse et sacrifiée, où chacun renonce à tout besoin personnel et se préoccupe seulement de faire du bien à l’autre sans aucune satisfaction. » Fin de citation. [NdR : Exhortation apostolique sur l’amour dans la famille, n° 157]
Si le renoncement au bonheur, le sacrifice, l’anéantissement de soi, le désintéressement radical, n’est pas l’unique idéal à suivre, dans la vie quotidienne, dans une vie de couple, dans la vie chrétienne. Il faut l’attendre encore moins dans le monde de l’entreprise.
Ces entrepreneurs agissent en cherchant des solutions où chacun est gagnant. Et nous alors, que faisons-nous pour trouver dans nos vies des solutions où tout le monde trouve son compte ?
Un peu d’imagination et de bonne volonté, « que diable » !”
Le cardinal Antoniano dans son Traité De l’Éducation chrétienne des enfants enseigne que le père de famille a l’obligation de défendre son patrimoine financier. C’est joindre l’intérêt au devoir.
« L’homme n’est ni ange, ni bête et le malheur veut que qui veut faire l’ange, fait la bête. » (Blaise Pascal)
J’entendais hier un prêtre irakien déclarer à la radio (RCF où un autre intervenant soutenait une thèse moderniste sans être contredit) qu’il fallait aider aussi les musulmans, car les musulmans étaient jaloux de la prospérité des chrétiens, d’où des réactions chez certains potentiellement très agressives dans certaines circonstances troubles. Je livre cette réflexion aux lecteurs du blog… ne sachant trop quoi penser de cette objection. J’ai aussi lu, il y a quelques années, le récit du martyr d’un musulman irakien défendant un voisin chrétien…
Merci à Mgr Di Falco de nous rappeler ces vérités. Ayant été spolié par la maçonnerie et la magistrature, je ne peut pas aider les chrétiens d’Orient. Je le ferai par mes très pauvres prières.