L’Annonciation du corridor du couvent Saint Marc à Florence est l’une des plus connue du peintre. Cette fresque se trouve sur l’une des parois du couloir du premier étage du couvent. Elle est située en face de l’escalier du rez-de-chaussée qui mène aux cellules. Les moines, pour regagner celles-ci, gravissaient nécessairement ces marches et cette Annonciation s’offrait donc à leur vue plusieurs fois par jour. Fra Angelico réalise cette œuvre dans les années 1445-1450. La fresque est monumentale, elle mesure 2.30 m. de hauteur sur 3.21 m. de large. Comme toutes les œuvres du peintre, cette oeuvre a une fonction cultuelle, elle est liée à un rite précis et incite à la récitation de l’Ave.
L’inscription qui se détache en bas de la peinture sur l’épaisseur de la marche rappelle le rôle actif que joue cette Annonciation dans la piété quotidienne des moines. « Virginis intacte cum veneris ante figuram, praetereundo cave ne sileatur Ave » (Lorsque tu passes devant cette image de la Vierge intacte, prends garde à ne pas oublier de dire un Ave). Cette phrase ne fait pas office de simple commentaire, elle affirme la raison d’être de l’image. Réciter un Ave, c’est célébrer la foi de Marie qui ouvre à l’humanité la perspective du Salut. Elle est la nouvelle Eve. La tradition patristique la plus ancienne a opposé Marie et Eve dans la scène de l’Annonciation. Eve avait apporté la mort par sa désobéissance, Marie, lors de l’Annonciation, restaure la vie et apporte la délivrance par sa foi. Saint Irénée exprime cette idée par la formule suivante : « le genre humain avait été assujetti à la mort par une vierge, la désobéissance d’une vierge ayant été contrebalancée par l’obéissance d’une vierge. » De même Tertullien écrit : « Eve s’était fiée au serpent, Marie se fia à Gabriel, le mal qu’avait fait Eve en croyant, Marie en croyant le supprima. »
Dans l’Annonciation du corridor, la rencontre de l’ange Gabriel et de la Vierge Marie a lieu sous un grand portique, leurs silhouettes sont encadrées par les deux arcades du premier plan, à gauche s’étend le jardin clos, symbole de la Vierge. L’architecture est d’un dépouillement très pur. Le point de fuite, légèrement déporté sur la droite, souligne l’asymétrie de l’espace. Espace profond et ouvert du côté de l’ange, espace plus réduit et plus intime du côté de la Vierge Marie. Les colonnes sont solides, lisses et surmontées de chapiteaux, corinthiens au premier plan, ioniques au second. A gauche le jardin retient l’attention par l’importance de sa haute palissade. Ce jardin clos fait écho au mode de vie des moines dominicains coupés du monde régulier. La végétation de part et d’autre de la clôture est très différente. Profusion et désordre de la nature à l’extérieur, pré fleuri et disposition ordonnée des fleurs à l’intérieur. L’Ange Gabriel est vêtu avec raffinement, sa robe est brodée, le tissu est soyeux. La fantastique palette de couleurs des plumes des ailes montre la préciosité et la splendeur de l’ange. Face à l’élégance de Gabriel, la représentation de la Vierge Marie se différencie par un grand naturel et une totale simplicité. Tous les éléments qui entourent la Vierge – le tabouret grossièrement taillé ou la pauvreté de la cellule – rappellent la sobriété de la vie monacale.
Lire la suite sur Cyrano.net par Julie Faure