Nombre de lecteurs assidus de Riposte Catholiques se sont émus, attristés même, de ce que les discours pontificaux au Mexique restaient très anthropocentrés. C’est vrai et c’est malheureusement le cas de bien des discours ecclésiaux. Qu’on regarde le dernier e-billet de l’évêque d’Évry, sans un mot sur Dieu. Partant pourtant des paroles consécratoires, Mgr Dubosc dresse un long plaidoyer pour les agriculteurs. Une population en difficulté certes, mais à qui aucune parle d’espérance n’est adressée. L’Église et les catholiques avec eux, tendent à oublier que la finalité ultime de l’Homme est Dieu. L’aide sociale, le combat politique ne sont que des moyens pour donner Dieu au monde, pour conduire chaque homme à l’union intime avec Dieu.
En rester à l’aspect strictement matériel de la charité est un leurre mortifère, comme nous le rappelle Benoît XVI dans Caritas in Veritate. La charité vise le salut, c’est-à-dire la vision béatifique. La charité s’ordonne au bien ultime qu’est Dieu. Certes, il nous faut soulager autant que possible les fardeaux des hommes. Dieu n’est pas un sadique qui se complait dans notre souffrance. Mais comme le rappelle saint Paul dans l’épitre aux Romains, « J’estime, en effet, qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire qui va être révélée pour nous. » Rm.8.18. Il faut entendre l’action sociale telle que saint Vincent de Paul l’avait comprise. « avant de prendre soins de leur âme, il faut qu’il prennent conscience qu’ils en ont une. » Ou à l’image de mère Teresa « avant de leur parler de Dieu, donner leur à manger. » La véritable charité a pour finalité la vie intime avec Dieu. La nôtre, parce que par ces actes de charité nous travaillons à notre propre sanctification, celle de ceux qui en sont destinataires, si notre charité ne les en éloigne pas. C’est le cas de ceux qui proposent des avortements pour soulager les conséquences économiques d’une nouvelle naissance.
Charité et vérité s’embrassent, nous dit le psalmiste. L’action sociale ou l’engagement politique sont des œuvres de miséricorde à condition qu’ils conduisent effectivement au Christ.
Il serait cependant injuste de réduire le pape François à l’hypertrophie qu’il fait lui-même de son engagement pour les pauvres. Pour connaître la pensée d’un homme, il faut lire l’ensemble de ses discours. Et dans son message aux malades, par exemple, il est clair que le Saint Père cherche à montrer le chemin des bras du Christ.
Mais il est un fait que l’Église de notre temps semble plus tournée vers les hommes que tourner les hommes vers le Ciel. C’est le risque ambigu de l’année de la miséricorde qui fait la part belle aux œuvres et risque de relèguer au second plan la finalité des œuvres, à savoir le Dieu de la miséricorde. N’eut-il pas été préférable d’instituer une année du Sacré Cœur qui en pointant la personne du Christ n’aurait rien ôté de la miséricorde ?
Cyril Brun,
Rédacteur en chef