Voici la préface de l’encyclique Laudato Si (éditions Quasar), écrite par Mgr Barbarin:
“Le mercredi 13 mars 2013 au soir, le nouveau pape a choisi un prénom qui est à lui seul tout un programme. Assurément, ce texte marquera une grande étape de son pontificat. En choisissant les premiers mots de la célèbre prière de saint François d’Assise comme titre de cette Lettre encyclique, Laudato si, il accomplit en quelque sorte une des promesses de son élection : poser les bases d’une écologie intégrale, d’une écologie humaine.
Une encyclique qui ressemble au pape François
Mais François est d’abord un jésuite. Chacun a pu mesurer au fil des enseignements du successeur de Pierre l’influence majeure de saint Ignace de Loyola, lequel donne comme « Principe et Fondement » à ses Exercices spirituels : « L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur, et par là sauver son âme. Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l’homme, pour l’aider à poursuivre la fin pour laquelle il est créé. » Connu pour la vigueur de son œuvre, saint Ignace l’est moins pour son sens mystique. On raconte qu’un jour, passant devant une petite fleur, il s’est arrêté pour l’interpeller : « Chut ! Pas si fort ! », tant ce petit être proclamait l’amour de Dieu. Le pape François précise que l’homme n’est pas la fin ultime des autres créatures, mais que celles-ci avancent également vers leur terme qui est Dieu (n. 83).
François est aussi un Argentin qui a vécu dans une société aux inégalités scandaleuses et s’est toujours tenu dans une grande proximité avec les plus pauvres. Il connaît les mégapoles sud-américaines, leur pollution, les questions posées par l’agriculture intensive, l’accès à l’eau, le narcotrafic… À ce titre, son texte est concret, incarné et étayé de sa longue expérience, celle d’un pasteur de terrain.
C’est enfin sa personne qui nous permet de comprendre à quel point cet écrit est pour lui fondateur. En effet, il ne cesse d’appeler de ses vœux « une Église pauvre pour les pauvres » et, chaque jour, il en donne un exemple lumineux. Sa sobriété étonne les grands et réjouit les petits. Dans les choix de son logement, de sa voiture, de son vêtement, dans son contact avec les « plus vulnérables » et par toutes les attentions qu’il manifeste à leur égard, il témoigne de cette radicalité de l’Évangile qui nous invite à placer les richesses et les biens de ce monde à bonne distance. « Moins est plus », affirme-t-il, pour expliquer que « la spiritualité chrétienne propose une croissance par la sobriété » (n. 222). Mystère paradoxal de l’Évangile, sans cesse à réactualiser dans nos vies !
Oui, cette encyclique lui ressemble et elle reprend des thèmes dont nous savons depuis deux ans qu’ils lui sont chers. Le pape François commence par rendre hommage à l’enseignement de ses prédécesseurs sur ce sujet – Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI – puis il salue longuement la réflexion et l’engagement du Patriarche Bartholomée et des Églises orthodoxes. Il cite à de nombreuses reprises les conférences épiscopales d’Europe, d’Afrique, d’Amérique, d’Asie, d’Australie… Il va même au-delà des Églises chrétiennes, en appelant tous les croyants à être cohérents avec leur propre foi, et il ne craint pas de citer un mystique soufi (n. 233).
Pas de solution unique, mais un appel à la conversion
C’est un texte humble qui ne prétend pas offrir une solution ou des « recettes uniformes », mais analyse les causes, invite à l’examen de conscience, à la conversion et au dialogue. Sur un ton délibérément « joyeux et dramatique », François lance un appel (n. 13-16), invitant « toute la famille humaine » à s’unir « dans la recherche d’un développement durable et intégral », pour servir « le projet d’amour » du Créateur. Selon lui, « tout est lié dans le monde », par exemple la détérioration de la qualité de la vie humaine et la dégradation sociale. En insistant sur la valeur propre de chaque créature, il unit dans un même regard « les pauvres et la fragilité de la planète. » Il appelle les responsables politiques à ne pas se soumettre à l’économie : « Nous avons besoin d’une politique aux vues larges » (n. 189 et 197).
L’encyclique était très attendue. À la fin du XIXème siècle, le pape Léon XIII écrivit Rerum novarum parce que des « choses nouvelles » étaient survenues avec le développement frénétique de l’ère industrielle et que l’Église devait y apporter son éclairage. Aujourd’hui, dit François, elle n’a pas à prendre position dans les différents courants, parfois extrêmes, de l’écologie. « Elle comprend qu’elle doit écouter », et c’est ce que fait le pape tout au long de son premier chapitre : en constatant « la grande détérioration de notre maison commune » (n. 61), il affirme que l’Église doit parler avec force et agir sans retard.
Bien sûr, le Concile Vatican II évoquait déjà l’esprit de liberté et de pauvreté avec lequel l’homme doit aimer les choses que Dieu a créées. Mais, malgré les développements nouveaux du Catéchisme de l’Église catholique sur la question du respect de la création, cet enseignement méritait d’être enrichi, mis en valeur et actualisé. L’homme est maître et serviteur de la création : pas seulement un maître qui domine, pas seulement un serviteur appelé à s’effacer, mais tout à la fois un maître et un serviteur ou, comme dit François, « un administrateur responsable » (n. 116).
Voilà le socle biblique, fondé dans les récits de la Genèse, sur lequel le pape propose son « Évangile de la création » (ch. 2). C’est alors qu’il explique ce que signifie l’expression « écologie intégrale » (ch. 4), puisqu’« il n’y a pas d’écologie sans anthropologie adéquate » (n. 118). François indique ensuite des « lignes d’orientation et d’action » (ch. 5), qui sont les conséquences morales et sociales de sa vision des choses, à commencer par « un autre style de vie ». Dans le sixième et dernier chapitre, il lance un nouvel appel, spirituel cette fois, à la conversion écologique. « Plus le cœur de la personne est vide, plus elle a besoin d’objets à acheter, à posséder, à consommer » (n. 204).
Retrouver, face à la création, un élan de louange et de joie
Pendant des siècles, les travaux des conciles et les enseignements des papes ont affronté les multiples hérésies théologiques contre lesquelles l’Église devait lutter pour préserver la pureté de la Révélation. La première ligne du Credo, évoquant « le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre », est celle qui a été le moins contestée. Sans doute est-ce pour cela que la théologie de la création a connu trop peu de développement après l’époque patristique. Mais c’est probablement l’affirmation la plus blessée dans les faits, une « hérésie pratique » si l’on peut dire, qui abîme, dénature et détruit le cadeau que Dieu nous fait. Une hérésie dont le pape nous partage la gravité et le drame, en même temps qu’il esquisse les pistes pour retrouver, face à la création, un élan de louange et de joie : « Les sommets des montagnes sont à lui ; à lui, la mer, c’est lui qui l’a faite, et les terres, car ses mains les ont pétries » (Ps 94, 4-5).
Il faut donc lire et inviter à lire ce grand texte engagé du pape, le jésuite argentin prénommé François, dont la parole et l’exemple ne font qu’un, pour que naisse la « conscience d’une origine commune, d’une appartenance mutuelle, et d’un avenir partagé par tous » (n. 202) !
Enfin, grande nouveauté dans cette encyclique, François termine en proposant deux prières : une que l’on peut dire avec des croyants d’autres religions, et une autre spécifiquement chrétienne. Parmi les demandes exprimées, je suis particulièrement touché par celle où l’homme aspire à être bien situé dans la grande symphonie de la création : « Donne-nous la grâce de nous sentir intimement unis à tout ce qui existe », « montre-nous notre place dans ce monde comme instruments de ton affection pour tous les êtres de cette terre, parce qu’aucun n’est oublié de toi. »”
Avec l’encyclique du pape François et l’organisation, par la France, de la Conférence internationale sur les changements climatiques (Cop 21), l’année 2015 est celle de l’écologie. Face aux menaces d’ampleur qui pèsent sur la planète, les chrétiens ont des propositions. Et la société française s’ouvre à une approche spirituelle de la crise écologique. Pour répondre à ce besoin d’échange, l’hebdomadaire La Vie coorganise, avec le diocèse de Saint-Étienne, la 2e édition des Assises chrétiennes de l’écologie : 3 jours de rencontres et de forums avec les meilleurs experts et penseurs de l’écologie les 28, 29 et 30 août 2015. Plus de 2 000 participants sont attendus.
Parmi les temps forts proposés, on trouvera notamment des conférences plénières et des tables-rondes avec des intervenants de renom tels que Jean-Marie Pelt, directeur de l’Institut européen d’écologie, Patrick Viveret, philosophe, Corinne Lepage, ancienne ministre, présidente de LRC Cap 21, Gaël Giraud, économiste, Marie-Monique Robin, journaliste, le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, Dominique Lebrun, évêque de Saint-Étienne, Marc Stenger, évêque de Troyes, Bruno Feillet, évêque auxiliaire de Reims, Christian Krieger, vice-président de la Fédération protestante de France, Anouar Kbibech, président du Conseil français du culte musulman, Yeshaya Dalsace, rabbin à Paris, Joshin Bachoux Sensei, nonne bouddhiste. De nombreuses organisations de la société civile seront également présentes.
Près de 80 forums, ouverts aux familles et aux jeunes, sont au programme, parmi lesquels : « La terre nourricière, un trésor à préserver », « Devenir une famille à énergie positive », « Jeûner pour le climat », « Comment mettre notre argent au service d’une transition vers des sociétés soutenables ? », « Animer un éco-hameau chrétien », « Soigner l’esprit, guérir la terre ». Au-delà des temps de réflexion, le programme propose aussi des ateliers portés sur l’expérience sensible du monde (randonnée, travail de la terre) et des temps de recueillement (célébration eucharistique, prière, méditation).
http://www.rencontres-ecologie-2015.assises-chretiennes.fr
Merci au pape François de nous interpeler si fort et d’interpeler le monde. Merci de lier l’écologie de la nature à l’écologie humaine qui est liée à l’économie.
Merci de lier l’écologie à la louange et à la gratitude envers notre Créateur qui est Père plein d’une tendresse infinie.
Merci à François et prions l’Esprit Saint de nous soutenir dans nos combats et de créer un rapprochement universel de tous les hommes + + +
oui, vive la communion sociale planétaire sans frontière.
“…Face aux menaces d’ampleur qui pèsent sur la planète…”
Quelles sont ces menaces d’ampleur ?
“…la Vie et le diocèse de Saint-Étienne organisent, la 2e édition des Assises chrétiennes de l’écologie : 3 jours de rencontres et de forums avec les meilleurs experts et penseurs de l’écologie les 28, 29 et 30 août 2015…”
La première écologie c’est de commencer par respecter LA VIE dès sa conception et jusqu’à la mort mais de cela il n’est pas question.
Les VRAIS savants sur le sujet sont toujours écartés des débats et eux n’ont pas la même vision des soi-disant menaces. Pourquoi ?
Mille excuses, mon commentaire s’adresse à celui du Père J.L. Souveton.