Sandro Magister livre une analyse intéressante de la diplomatie pontificale sous le Pape François … Qu’il inscrit dans la filiation inattendue du Pape Pie XII. Comme le Pape de la Seconde guerre mondiale, le Pape jésuite est un adepte du silence lorsqu’il s’agit d’éviter des persécutions plus grandes. Voici quelques extraits d’un article publié sur le site Chiesa :
C’est à nouveau un diplomate de carrière, le cardinal Pietro Parolin, qui est à la tête de la secrétairerie d’état. Mais François, qui l’a nommé à ce poste, a changé le visage de la géopolitique du Vatican.
La guerre des mondes dans laquelle le géant qu’était Jean-Paul II a combattu et vaincu n’est plus aujourd’hui qu’un lointain souvenir. […]
Aujourd’hui tout ce qu’il fait est public. Mais c’est toujours avec des gestes très personnels, qui paraissent étranges aux diplomates de la vieille école. Comme d’inviter les présidents d’Israël et de Palestine sous la coupole de Saint-Pierre, pour prier.
“Ici, au Vatican, 99% des gens assuraient que nous n’y parviendrions pas”. C’est ce qu’a révélé par la suite, avec candeur, le pape François lui-même. Mais, en fin de compte, c’est bel et bien le 1% persévérant – représenté par lui-même – qui s’est imposé.
De même, pour la délicate préparation du sommet, le pape a agi personnellement. Aux diplomates de carrière il n’a laissé que les miettes. Il a préféré l’aide d’un moine franciscain, Pierbattista Pizzaballa, qui est le custode de Terre Sainte, et celle d’un journaliste israélien, Henrique Cymerman, correspondant du journal “La Vanguardia ” de Barcelone.
Là où la diplomatie échoue, le pape François intervient à sa manière. […]
C’est les mains nues, avec des armes uniquement surnaturelles, que François se rend sur les frontières les plus douloureuses du monde. Ce dont les hommes ne sont pas capables, il laisse Dieu le faire. La Syrie est aujourd’hui plus dévastée que précédemment. La Méditerranée est de plus en plus sillonnée par des bateaux remplis de réfugiés. Quelques jours à peine après les prières formulées par Shimon Peres et Mahmoud Abbas, une faction palestinienne a enlevé trois jeunes israéliens. Mais la diplomatie de François vit aussi de ces défaites. C’est la diplomatie des impossibles.
C’est un style qui a des précédents chez les catholiques. En 1969, deux ans après la guerre des Six Jours, le saint maire de Florence, Giorgio La Pira, avait réuni à Hébron des dirigeants arabes et israéliens afin de prier avec eux pour la paix sur la tombe d’Abraham. […]
Le pape François a la même ambition. Ce n’est pas un naïf. En vrai jésuite qu’il est, il dose ses paroles et ses silences avec une adresse consommée.
Il a affirmé et répété à de nombreuses reprises que les chrétiens martyrisés en haine de la foi sont plus nombreux aujourd’hui que pendant les premiers siècles du christianisme. […] “Je sais beaucoup de choses en ce qui concerne la persécution mais il ne me paraît pas prudent de les raconter”, a-t-il déclaré lors de l’interview qu’il a accordée, voici quelques jours, à “La Vanguardia”.
Au milieu du mois de mai, le monde a appris la nouvelle de la condamnation à mort, au Soudan musulman, de Meriam Yahya Ibrahim, une jeune femme mariée et mère de famille, dont le seul crime est d’être chrétienne. Le même jour, Bergoglio recevait au Vatican le nouvel ambassadeur du Soudan. Pas un mot ne lui a échappé à ce sujet. Et par la suite non plus. Il a gardé un silence absolu, en dépit de la campagne mondiale de plus en plus active en faveur de la libération de la jeune femme.
“Le Saint-Siège cherche la manière la plus efficace pour intervenir et ce n’est pas toujours celle qui consiste à crier”, telle est la justification de ce silence qui a été donnée par le cardinal Parolin, secrétaire d’état.
On ne sera pas étonné d’apprendre que le pape François est un défenseur convaincu des silences de Pie XII, “pour qu’ils ne tuent pas davantage de juifs”.