Riposte-catholique – Le pass contraception risque d’être généralisé dans les régions socialistes. Pourquoi s’agit-il selon vous d’une mauvaise idée ?
Sabine Faibre, secrétaire nationale “vie, famille et santé” du Parti chrétien démocrate (PCD) – C’est une mauvaise idée car la stratégie utilisée, qui vise à réduire le nombre de grossesses non désirées, n’a jamais marché. Notre pays connaît un taux record d’utilisation de la contraception et parallèlement, un nombre toujours aussi élevé d’avortements.
Jamais on n’a autant parlé de contraception et jamais le taux d’avortement chez les mineures n’a été aussi élevé. Le PCD pense que la question de fond réside dans l’éducation : l’éducation à une affectivité et une sexualité responsable, qui ne cherche pas à opposer sexualité et procréation. Le discours actuel véhicule une idée tronquée de la sexualité, considérée sous un jour exclusivement sécuritaire et hygiéniste. Or la sexualité est par nature ENGAGEANTE pour l’individu, elle ouvre sur la possibilité de donner la vie, et c’est cela qui fait que c’est un acte à la fois beau et d’une très grande “portée”. C’est cette vérité qu’il ne faut cesser d’annoncer, à temps et à contre temps.
– Que préconiseriez-vous à la place ?
Le PCD préconise de développer des moyens pédagogiques qui promeuvent le respect de la dignité de l’hommet de la femme, ainsi que l’ouverture à la vie. Plusieurs associations de conseil familial et conjugal, reconnues par l’Etat, oeuvrent déjà dans ce sens dans les établissements scolaires. Il est nécessaire de faire entendre aux jeunes un autre discours que “mettez des capotes” ou “protégez-vous” : ces slogans ne répondent pas à leurs véritables attentes, qui sont surtout celles de l’amour qui dure et de l’éducation à la beauté. La sexualité est le plus souvent présentée sous un jour négatif, alors que c’est tout le contraire : la sexualité est belle et c’est parce qu’elle engage l’homme totalement qu’elle ne peut être excercée sans discernement ni responsablité.
– Au quotidien, comment le PCD défend-t-il la culture de vie ?
Le PCD souhaite promouvoir la culture de la vie dans la sphère politique ; son premier pilier est le respect de la vie depuis la conception jusqu’à la mort naturelle, et la préoccupation du plus faible. De ce pilier découle la vision politique du PCD : en effet le respect de la vie et du plus faible se décline dans tous les autres domaines de la vie publique : écologie, économie, justice etc. Tous ces thèmes que nous défendont s’enracinent dans la doctrine sociale de l’Eglise.
Concrètement, nous oeuvrons à promouvoir des lois qui vont dans le sens de la vie, nous soutenons les initiatives allant dans ce sens (comme la Marche pour la vie, à laquelle nous étions présents mais
sans étiquette partisane : en effet nous pensons que cette Marche doit dépasser largement les clivages politiques ou religieux). Nous interpellons le gouvernement sur les sujets fondamentaux dès que nous
le pouvons. Cette stratégie a porté ses fruits dans plusieurs domaines: statut du beau-parent repoussé sine die, non homologation par Education Nationale du Baiser de la Lune, développement des soins palliatifs et refus de l’euthanasie…
Nous essayons d’être également une force de propositions et un lieu de formation : ainsi notre rapport national bioéthique, issu d’un travail collectif de 2 ans, réunit plusieurs signatures d’experts ainsi que de responsables associatifs pour proposer des pistes respectueuses de la vie à tous les députés en vue de la révision des lois de bioéthique. En 2010-2011, nous amorçons un cycle de formation à destination des cadres du PCD sur les fondements de la pensée sociale chrétienne. Mais il faut reconnaître que nous aurions besoin d’être plus nombreux ! Notre défi est de nous faire connaître, de former les cadres de notre parti et nos militants, et surtout, de rassembler largement autour du projet politique que nous portons, qui est le seul à pouvoir, à mes yeux, répondre pleinement à la crise de sens que traverse notre société.
– Quelles sont les raisons d’espérer, face au déferlement actuel de la culture de mort ?
Les raisons d’espérer sont multiples car partout, dans toutes les sphères de la société, agissent des hommes et des femmes de bonne volonté qui oeuvrent pour le bien commun. Regardons la richesse du
travail des associations engagées auprès des femmes enceintes en difficulté; leur travail est remarquable, à tous points de vue – ces associations pallient en fait les carences de l’Etat et oeuvrent dans des conditions souvent précaires à l’accompagnement moral et matériel de jeunes mamans en grande détresse. Ces associations sont une lueur au milieu de la nuit.
Mais maintenant, il faut que l’Etat prenne ses responsabilités : comment parler de libre choix lorsque seul l’avortement est proposé face à une grossesse imprévue ? C’est la raison pour laquelle Christine Boutin a adressé un courrier à François Fillon demandant la création d’une mission parlementaire sur ce sujet et ce, afin d’évaluer (en particulier) les moyens aujourd’hui mis en oeuvre par l’Etat pour accompagner les femmes dans leur choix de garder leur enfant.
– Comment expliquez-vous le vote partagé (1 pour, 1 contre, 1 abstention) des députés PCD à l’Assemblée nationale le 23 février dernier ?
Le PCD a eu une ligne claire et alerté sur les risques encourus : lettre ouverte à tous les députés, argumentaire et CP ont simultanément été diffusés. Nous n’avons pas distillé le doute sur la cohérence du vote ni sur les raisons de fond.
Nous supposons que l’éparpillement du vote tient surtout à ce que certains députés ont pu penser que la résolution n’ouvrait la porte qu’à un exercice de droit comparé pour faire un bilan régulier mais sans automaticité. Ce qui était le discours de la plupart des intervenants en séance. L’avenir dira quelle sera la realité. S’il s’agit d’une comparaison faite globalement, nous serons aussi en situation d’en tirer des conclusions…
> Sabine Faivre est l’auteur de La vérité sur l’avortement aujourd’hui aux éditions Téqui (160 pages, 10 euros)
Thibaud COUPRY