La presse du monde entier vient de saluer – oui, c’est le terme – le premier « avortement » réalisé en Irlande aux termes de la nouvelle loi autorisant l’opération en cas de danger pour la vie de la mère. Il s’agirait donc, à en croire les médias unanimes, d’une mise à mort volontaire d’un enfant à naître, que Le Monde résume sous ce titre : « Premier avortement légal en Irlande. » Il aurait été pratiqué à la mi-juillet dans un hôpital de Dublin.
Les quotidiens irlandais ont les premiers répandu cette désinformation, car d’application de la nouvelle loi, il n’y en a pas eu en l’occurrence.
Ce qui importait à la grande presse, unanimement favorable à l’avortement légal (Le Monde voit d’ailleurs dans la loi irlandaise une « loi minimale » aux conditions très strictes), c’était de faire un parallèle avec l’affaire Savita Halappanavar, cette jeune femme indienne morte d’une septicémie diagnostiquée trop tard à l’occasion d’une fausse couche que la même presse avait abusivement présentée comme victime de l’interdiction de l’avortement en Irlande.
La femme en cause dans l’affaire présente souffrait d’une septicémie grave et surtout diagnostiquée qui représentait une menace grave pour sa vie alors même que les jumeaux qu’elle portait n’avait pas encore atteint le seuil de viabilité. Elle a d’abord perdu les eaux ; 24 heures plus tard, la septicémie avait atteint un tel degré de gravité que les médecins, après avoir tout fait pour essayer de sauver et la mère, et ses enfants, ont discuté avec elle et avec son compagnon, pour décider enfin de provoquer l’accouchement alors même que les deux bébés n’avaient pas de chance de survivre en dehors du sein maternel. De fait ils sont morts tous les deux après leur naissance.
Tant les médecins pro-vie irlandais que les directives de l’Institut irlandais des obstétriciens et des gynécologues affirment que les cas d’accouchement prématuré induit dans le cadre d’une septicémie mortelle ne correspondent pas à des avortements puisque l’intention n’est pas de tuer l’enfant.
Cette affaire pose évidemment des questions morales délicates mais il faut souligner plusieurs faits : les bébés n’ont pas été tués, c’est leur naissance qui a été provoquée et ils n’ont pas survécu du fait de leur prématurité, il ne s’agit donc pas d’un avortement direct. On peut souligner qu’ils n’avaient aucune chance de survie non plus dans le sein de leur mère. Et c’est en appliquant des procédures parfaitement légales sous l’ancien régime pénal de l’avortement en Irlande que la naissance a été provoquée : on ne peut pas parler d’un changement introduit grâce à la nouvelle loi.
C’est ce que confirme un communiqué du Département de la Santé irlandais selon lequel il n’y a pas encore eu d’avortement dans le cadre de la nouvelle loi en Irlande : « Cela n’a pas encore commencé. On commencera dès que ce sera faisable. Il y a des questions opérationnelles qu’il faut régler avant que ce soit possible. » Entre autres, on n’a pas encore mis en place les équipes médicales chargées de vérifier la conformité des situations avec la loi.
Plusieurs mouvements pro-vie ont dénoncé la manière dont le cas de cette femme qui vient de perdre ses deux jumeaux a été exploitée par l’Irish Times pour en faire un emblème de l’avortement légal. Même le Dr Peter Boylann qui avait plaidé en faveur de la loi d’avortement devant le Parlement irlandais, cité par LifeSite d’où je tire ces informations, a exprimé sa colère devant la divulgation des détails médicaux de l’affaire : « Il s’agit d’une scandaleuse atteinte au droit à la confidentialité », a-t-il noté, ajoutant qu’il est « totalement inacceptable de donner des détails sur un patient à la une d’un journal » et que tout médecin qui aurait donné ce type d’information à la presse devrait comparaître devant le Conseil médical.