La troisième « grande révélation » du Sacré-Coeur
à Sainte Marguerite-Marie :
demande de la communion des premiers vendredis
et de l’heure sainte.
Comme pour les deux précédentes, la date de cette manifestation est incertaine, cependant comme la sainte Visitandine précise que c’était un jour d’exposition du Saint Sacrement, on peut en déduire, selon le coutumier de la Visitation alors en usage, que ce ne pouvait être que le jour de la fête de la Visitation (2 juillet) ou pendant l’octave de la Fête-Dieu, et probablement en 1674.
« Et une fois, entre les autres, que le Saint Sacrement était exposé, après m’être sentie retirée toute au-dedans de moi-même par un recueillement extraordinaire de tous mes sens et puissances, Jésus-Christ, mon doux Maître, se présenta à moi, tout éclatant de gloire, avec ses cinq plaies, brillantes comme cinq soleils, et de cette sacrée humanité sortaient des flammes de toutes parts, mais surtout de son adorable poitrine, qui ressemblait à une fournaise ; et s’étant ouverte, me découvrit son tout aimant et tout aimable Coeur, qui était la vive source de ces flammes. Ce fut alors qu’il me découvrit les merveilles inexplicables de son pur [amour], et jusqu’à quel excès il l’avait porté d’aimer les hommes, dont il ne recevait que des ingratitudes et méconnaissances : « Ce qui m’est beaucoup plus sensible, me dit-il, que tout ce que j’ai souffert en ma Passion ; d’autant que s’ils [me] rendaient quelque retour [d’] amour, j’estimerais peu tout ce que j’ai fait pour eux, et voudrais, s’il se pouvait, en faire encore davantage ; mais ils n’ont que des froideurs et du rebut pour tous mes empressements à leur faire du bien. Mais, du moins, donne-moi ce plaisir de suppléer à leurs ingratitudes autant que tu en pourras être capable. »
Et lui remontrant mon impuissance, il me répondit : « Tiens, voilà de quoi suppléer à tout ce qui te manque. »
Et en même temps, ce divin Coeur s’étant ouvert, il en sortit une flamme si ardente que je pensai en être consommée ; car j’en fus toute pénétrée, et ne pouvais plus la soutenir, lorsque je lui demandai d’avoir pitié de ma faiblesse.
« Je serai ta force, me dit-il, ne crains rien, mais sois attentive à ma voix et à ce que je te demande pour te disposer à l’accomplissement [de] mes desseins.
Premièrement, tu me recevras dans le Saint Sacrement autant que l’obéissance te le voudra permettre (1), quelque mortification et humiliation qui t’en doivent arriver, lesquelles tu dois recevoir comme des gages de mon amour. Tu communieras, de plus, tous les premiers vendredis de chaque mois. Et toutes les nuits du jeudi au vendredi, je te ferai participer à cette mortelle tristesse que j’ai bien voulu sentir au jardin des Olives ; laquelle tristesse te réduira, sans que tu la puisses comprendre, à une espèce d’agonie plus rude à supporter que la mort. Et pour m’accompagner dans cette humble prière que je présentai alors à mon Père parmi toutes mes angoisses, tu te lèveras entre onze heures et minuit, pour te prosterner pendant une heure avec moi, la face contre terre, tant pour apaiser la divine colère, en demandant miséricorde pour le pécheurs, que pour adoucir en quelque façon l’amertume que je sentais de l’abandon de mes apôtres, qui m’obligea à leur reprocher qu’ils n’avaient pu veiller une heure avec moi, et pendant cette heure tu feras ce que je t’enseignerai (…). » (2)
Notes :
(1) Rappelons – pour ceux qui ne le savent pas ou l’auraient oublié – qu’à cette époque-là, même dans les couvents, on ne communiait pas à chaque messe et qu’on ne se présentait pas à la sainte table si on ne s’était pas confessé à chaque fois (en outre dans les communautés, en plus de l’autorisation du confesseur il fallait aussi avoir celle des supérieurs). Dans le meilleur des cas, une religieuse particulièrement fervente et exemplaire communiait-elle tous les dimanches et aux grandes fêtes.
En demandant à Soeur Marguerite-Marie de communier le plus fréquemment possible, Notre-Seigneur sait qu’il requiert d’elle quelque chose qui la singularisera aux yeux de la communauté, et que cette singularité lui vaudra des incompréhensions, des vexations et des contradictions…
(2) Insistons sur ce point : l’heure sainte n’est pas un moment d’adoration du Saint Sacrement, de méditation ou de lecture spirituelle, mais un temps – pénible – de supplication pour le salut des pécheurs et de réparation pour l’abandon dans lequel Notre-Seigneur s’est trouvé le Jeudi Saint au moment de la sainte Agonie. Voir notre publication sur l’heure sainte > www.
Laurent de La Hyre (17e s.) : l’Agonie de Gethsémani.
Amende honorable au Sacré-Coeur de Jésus :
Pénétré de la douleur la plus vive, ô mon divin Jésus ! en voyant que votre Coeur adorable, qui a été noyé d’amertume au jardin des Olives, et rassasié d’opprobres durant tout le cours de votre Passion, souffre encore aujourd’hui dans le Saint Sacrement de l’autel des outrages plus sensibles par les irrévérences, les profanations et les sacrilèges dont la plupart des chrétiens se rendent coupables, je me prosterne devant Vous, le coeur brisé de douleur, pour Vous faire amende honorable de tant d’outrages que Vous souffrez dans le Saint Sacrement de votre amour.
Que ne puis-je effacer par mes larmes les crimes que l’on commet contre Vous !
Mais mon impuissance s’oppose à mes désirs ; du moins, ô mon Jésus ! je Vous offrirai mes peines, mes souffrances, et toutes les actions de ma vie en esprit d’expiation, de réparation et d’amende honorable des outrages faits à votre divin Coeur dans l’Eucharistie ; et pour suppléer à mon impuissance, je Vous offre les adorations que votre Coeur offre continuellement à votre Père céleste, l’amour et les adorations du Coeur de Marie, votre sainte Mère, et les hommages des anges et de tous les saints.
Voilà, ô mon divin Sauveur ! quel sera désormais l’exercice le plus doux de ma vie ; puisse-t-il être agréable à votre Coeur, et attirer sur moi et sur les coeurs mêmes qui Vous outragent les regards de votre miséricorde.
Ainsi soit-il !
Récit des deux premières « grandes révélations » du Sacré-Coeur, ici >www et ici > www