Attention ! Texte très important. Le P. Kenneth Baker, S.J., est le directeur depuis avril 1971 de Homiletic & Pastoral Review (ici), le plus ancien et le plus influent périodique mensuel – il fut créé en 1900 – destiné au clergé américain, et qui bénéficie de collaborations prestigieuses. La
dernière livraison de l’année, décembre 2009, contient un article du professeur Mark J. Clark, « Faire revenir le latin » que le père jésuite Baker a trouvé suffisamment important
pour en faire une ample et roborative présentation, et en faire “l’appel” de la couverture de ce numéro. C’est son texte dont vous allez pouvoir lire ci-dessous la traduction que je viens
d’achever. Vous devriez le lire “crayon en main” : pas de gras, rien que du muscle ! Et plein de petits détails “qui font sens” (comme disent les cuistres modernistes) et qui devraient vous
réjouir… Enjoy !
« Il est indubitable que nous avons constaté un déclin extrême de la connaissance du latin dans l’Église catholique depuis Vatican II. Il n’est sans doute pas venu à l’esprit de la
plupart des évêques présents au Concile que leur approbation de l’utilisation du vernaculaire dans la liturgie de l’Église aboutirait à la quasi disparition du latin chez les évêques comme chez
les prêtres.
Voici quelques exemples de ce que je veux dire. La plupart des prêtres désormais ordonnés ne connaissent pas assez de latin pour célébrer la Messe selon la forme extraordinaire. La plupart des
évêques désignés pour se rendre aux synodes à Rome sont incapables de comprendre le latin quand il est utilisé. Ils ne savent pas davantage le lire ou le parler. J’ai été personnellement le
témoin de cela depuis trente-cinq ans. Et cela se passe dans une Église dont la langue officielle est le latin ! De très importants documents du Vatican, qui pendant plus de 1 500 ans
étaient écrits en latin, le sont désormais en langues vernaculaires puis ensuite traduits en latin. Un bon exemple de cela est celui du Catéchisme de l’Église catholique qui a d’abord
été rédigé en français puis ultérieurement traduit en latin.
L’indifférence au latin dans les séminaires a commencé vers 1960. Le pape Jean XXIII tenta d’arrêter le déclin du latin en promulguant sa constitution apostolique Veterum Sapientia
en 1962. Mais les évêques comme les supérieurs religieux n’appliquèrent pas le souhait du Pontife et n’y obligèrent pas, si bien qu’elle resta lettre morte [1]. Je me souviens avoir
demandé à un séminariste jésuite au début des années 1970, s’il connaissait le latin. Il me répondit : “Non, et on n’en a plus besoin ? Tout ce qu’il nous faut savoir est disponible en
traductions anglaises”.
Je voudrais attirer votre attention sur un article de cette livraison : “Faire revenir le latin” du professeur Mark Clark qui enseigne le latin au Christendom College à Front Royal,
Viriginie. Le professeur Clark souligne que près de deux mille ans d’histoire, de théologie et de culture catholiques sont en langue latine. Ceux qui ne connaissent pas la latin n’ont accès à ce
trésor qu’en traductions vernaculaires, mais aucune traduction ne peut donner totalement les nuances et le sens de ce qu’on trouve dans les originaux. Dès lors, quand évêques et prêtres ignorent
le latin ils sont privés à l’accès direct aux sources de la culture catholique. C’est une catastrophe de première grandeur et il faut absolument faire quelque chose. On m’a dit qu’il n’y a avait
plus que cinq ou six spécialistes du latin à Rome même qui soient capables de traduire en latin des documents comme le Catéchisme [voir ici].
Les Pères de Vatican II ont pensé que le latin continuerait à être la langue commune des prêtres dans le monde entier. Dans leur toute première constitution sur la liturgie, ils déclarèrent :
“L’usage de la langue latine, sauf droit particulier, sera conservé dans les rites latins.” (n. 36, § 1). Mais, ce faisant, ils ne comprirent pas qu’ils allaient approuver l’usage du vernaculaire
qui “peut être souvent très utile pour le peuple” [id. § 2]. C’était là une de ces “bombe à retardement” dissimulées dans les documents de Vatican II que la plupart des évêques qui les
avaient votées n’avaient pas vues.
Est-il trop tard pour que le latin redevienne une langue vivante parmi les clercs et les universitaires laïcs catholiques ? Le professeur Clark voit des signes certains d’un retour
possible du latin. L’un d’entre eux est sans conteste la popularité sans cesse grandissante de la Messe traditionnelle latine et le fait qu’elle soit de plus en plus acceptée dans tout le pays.
Le fait que le pape Benoît XVI ait promulgué en 2007 le motu proprio Summorum Pontificum, constitue un autre signe. Beaucoup de jeunes prêtres sont en train d’apprendre le latin
afin de pouvoir célébrer la Messe selon la forme extraordinaire qu’on trouve dans le Missel romain de 1962. À la basilique Saint-Pierre on constate actuellement un renouveau du chant
grégorien.
Ce serait un signal fort pour le retour du latin si le pape ordonnait à tous les séminaristes se formant au sacerdoce catholique de devoir apprendre à célébrer la Messe en latin. Il y a une
rumeur selon laquelle la chose serait étudiée à Rome. Cela voudrait dire que tous les séminaires devraient de nouveau enseigner le latin et exiger qu’on sache au moins le lire pour être autorisé
à être ordonné. Quand j’ai fait mon apprentissage de jésuite dans les années 1950, des cours étaient donnés en latin, nos manuels étaient en latin et l’examen oral de fin d’année était conduit en
latin. Lors de notre ordination, nous pouvions lire, écrire et parler en latin.
Le latin est un facteur d’unité pour tous les catholiques romains. J’espère et je prie pour que le Saint Esprit inspire notre pape et nos évêques afin qu’il fasse revenir le latin comme signe de
l’unicité de l’Église. »
1. Je souligne, au passage, que beaucoup de successeurs des apôtres se moquent comme d’une guigne des constitutions apostoliques des papes… À plus forte raison des
motu proprio… Suivez mon regard (en tous cas en France).
Du plaisir de la messe en latin!
Et pourtant quand on a fait du latin au lycée jusqu’au bac, même pour un bac passé récemment, le latin de la messe est jouissif car beaucoup plus facile à comprendre que les auteurs classiques! On se sent devenir bon élève (Mais c’est vrai cela aide un peu d’avoir déjà pour langue maternelle une langue d’origine latine).
Bref vive le latin et espérons!
Cher monsieur Hamiche,
Votre regard pourrait se diriger aussi vers la province de Québec…
Quant aux messes en langue vernaculaire, c’est-à -dire en français en ce qui me concerne, je crois que j’en serai bientôt privée, car je me trouve régulièrement aux grandes fêtes à des messes bilingues (espagnol-français ou italien-français), ce qui n’est pas très agréable, quand ce n’est pas carrément à une messe entière en langue étrangère (pour moi). Ce serait tellement plus simple si la messe était en latin partout! De messe en latin dans ma ville, il n’y en a qu’une, le dimanche à une heure plutôt difficile pour les familles.
“Ce serait un signal fort pour le retour du latin si le pape ordonnait à tous les séminaristes se formant au sacerdoce catholique de devoir apprendre à célébrer la Messe en latin. “
Il faudrait le P. Baker lise l’instruction de 1965 (donc post-conciliaire) “Doctrina et Exemplo”.
Au n°15, il est spécifié que la forme ordinaire de la liturgie dans les séminaire doit être célébrée en latin, le vernaculaire étant une exception à la règle.
Et dans le même document, au n°4, dernier paragraphe, il est dit que le non-respect des normes liturgiques entrainant la perte du caractère liturgique d’une célébration !
UdP,
Boris Maire