Président émérite du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, le cardinal Kasper est intervenu en clôture d’un récent colloque sur Vatican II organisé à Salamanque par les facultés de théologie d’Espagne et du Portugal. Lors de son allocution, intitulée “Herméneutique et réception du concile Vatican II”, il a fait preuve d’une vision du concile plus proche de celle du Saint Père que de celle de son ancien maître, Hans Küng.
Voici la traduction du résumé de son intervention, publié le 20 novembre par l’Osservatore Romano.
Pour la majeure partie de nos contemporains, qui ne l’ont pas vécu de façon consciente, le concile appartient au passé. Aujourd’hui, cinquante ans après, nous vivons une époque où tout a changé, où tout est globalisé. La foi béate dans le progrès s’est dissipée depuis longtemps. Notre Église d’Europe ne connaît pas le printemps appelé de ses vœux par le concile, mais plutôt une phase hivernale.
Le concile Vatican II est un cas à part dans l’histoire conciliaire, car il ne fut pas convoqué en raison d’une situation de schisme ou d’hérésie, pas plus que n’y furent proclamés des dogmes formels ou des mesures disciplinaires concrètes: il fut la réponse donné à une époque nouvelle au nom d’un optimisme né de la foi en Dieu, refusant les prophètes de mauvais augure et à la recherche d’un aggiornamento, d’une modernisation de l’Église. Son intention était de traduire la foi traditionnelle dans le langage d’aujourd’hui.
Il n’est pas utile de faire du concile un mythe, pas plus qu’il ne s’agit de le réduire à quelques banalités bon marché. Il convient d’en faire une présentation pondérée et de dégager une herméneutique conciliaire. Les textes du concile doivent être le point de départ de cette herméneutique, selon les règles et les critères établis. L’interprétation doit se baser sur la “hiérarchie de la vérité”.
L’Église n’est pas une institution absolutiste, mais, parce qu’elle est avant tout communion, repose essentiellement sur la communication. De fait, dans les moments difficiles, à l’exemple du concile de Jérusalem, les successeurs des apôtres choisissent de se réunir pour définir un chemin commun. La réception du concile est donc l’affaire de tout le peuple de Dieu.
Selon l’herméneutique définie par Benoît XVI, le consensus doit être non seulement synchronique, se référant à l’Église actuelle, mais aussi diachronique, en référence à l’Église de tous les temps. Faute de quoi l’herméneutique risque de relever de la discontinuité ou de la rupture, plutôt que de la continuité ou de la réforme. Il faut voir le concile comme un renouveau de l’Église dans sa continuité. Dans le processus de la tradition, la nouveauté de Jésus-Christ n’est jamais dépassée parce que Jésus se fait continuellement présent dans l’Église à travers l’action du Saint-Esprit. Face à l’avenir et aux différentes orientations de la post-modernité qui limitent la vie et l’action de l’Église, nous ne devons pas céder à une compréhension fondamentaliste ou émotive de la foi, mais devons rendre compte de l’espérance qui est en chacun de nous.