Samedi matin, Benoît XVI a rencontré le deuxième groupe d’évêques français, au grand complet, auquel il a tenu un discours dont voici des extraits significatifs :
“[…] Non seulement les fidèles de vos diocèses, mais ceux du monde entier, attendent beaucoup, n’en doutez pas, de l’Église qui est en France. […]
Dans les débats importants de société, la voix de l’Église doit se faire entendre sans relâche et avec détermination. Elle le fait dans le respect de la tradition française en matière de distinction entre les sphères des compétences de l’Église et de celles de l’État. Dans ce contexte, précisément, l’harmonie qui existe entre la foi et la raison vous donne une assurance particulière : le message du Christ et de son Église n’est pas seulement porteur d’une identité religieuse qui demanderait à être respectée comme telle ; il porte une sagesse qui permet d’envisager avec rectitude les réponses concrètes aux questions pressantes, et parfois angoissantes, des temps présents. En continuant d’exercer, comme vous le faites, la dimension prophétique de votre ministère épiscopal, vous apportez dans ces débats une parole indispensable de vérité, qui libère et ouvre les cœurs à l’espérance. Cette parole, j’en suis convaincu, est attendue. Elle trouve toujours un accueil favorable lorsqu’elle est présentée avec charité, non comme le fruit de nos propres réflexions, mais d’abord comme la parole que Dieu veut adresser à tout homme.
[…] Les communautés religieuses, et notamment monastiques, de votre pays que je connais bien, peuvent compter sur votre estime et vos soins attentifs, dans le respect du charisme propre à chacune. La vie religieuse, au service exclusif de l’œuvre de Dieu, à laquelle rien ne peut être préféré (cf. Règle de saint Benoît), est un trésor dans vos diocèses. Elle apporte un témoignage radical sur la manière dont l’existence chrétienne, précisément lorsqu’elle se met entièrement à la suite du Christ, réalise pleinement la vocation humaine à la vie bienheureuse. La société tout entière, et non seulement l’Église, est grandement enrichie par ce témoignage. Offert dans l’humilité, la douceur et le silence, il apporte pour ainsi dire la preuve qu’il y a davantage dans l’homme que l’homme lui-même.
Comme le rappelle le Concile, l’action liturgique de l’Église fait aussi partie de sa contribution à l’œuvre civilisatrice (cf. Gaudium et spes n. 58, 4). La liturgie est en effet la célébration de l’événement central de l’histoire humaine, le sacrifice rédempteur du Christ. Par là, elle témoigne de l’amour dont Dieu aime l’humanité, elle témoigne que la vie de l’homme a un sens et qu’il est par vocation appelé à partager la vie glorieuse de la Trinité. L’humanité a besoin de ce témoignage. Elle a besoin de percevoir, à travers les célébrations liturgiques, la conscience que l’Église a de la seigneurie de Dieu et de la dignité de l’homme. Elle a le droit de pouvoir discerner, par-delà les limites qui marqueront toujours ses rites et ses cérémonies, que le Christ « est présent dans le sacrifice de la Messe, et dans la personne du ministre » (cf. Sacrosanctum Concilium, n. 7). Sachant le soin dont vous cherchez à entourer vos célébrations liturgiques, je vous encourage à cultiver l’art de célébrer, à aider vos prêtres dans ce sens, et à œuvrer sans cesse à la formation liturgique des séminaristes et des fidèles. Le respect des normes établies exprime l’amour et la fidélité à la foi de l’Église, au trésor de grâce qu’elle garde et transmet ; la beauté des célébrations, bien plus que les innovations et les accommodements subjectifs, fait œuvre durable et efficace d’évangélisation.
[…] Conscients de la force de l’exemple, vous saurez aussi trouver les mots et les gestes pour encourager les fidèles à incarner cette « unité de vie ». Ils doivent sentir que leur foi les engage, qu’elle est pour eux libération et non fardeau, que la cohérence est source de joie et de fécondité (cf. Exhort. apost. Christifideles laici, n. 17). Cela vaut aussi bien pour leur attachement et leur fidélité à l’enseignement moral de l’Église que, par exemple, pour le courage à afficher leurs convictions chrétiennes, sans arrogance mais avec respect, dans les divers milieux où ils évoluent. Ceux d’entre eux qui sont engagés dans la vie publique ont dans ce domaine une responsabilité particulière. Avec les Évêques, ils auront à cœur d’être attentifs aux projets de lois civiles pouvant porter atteinte à la protection du mariage entre l’homme et la femme, à la sauvegarde de la vie de la conception jusqu’à la mort, et à la juste orientation de la bioéthique en fidélité aux documents du Magistère. Il est plus que jamais nécessaire que de nombreux chrétiens prennent le chemin de service du bien commun en approfondissant notamment la Doctrine sociale de l’Église. […]”