“Ce qui me frappe […], c’est le glissement qui s’opère depuis une dizaine d’années, au moins dans certains secteurs de l’opinion, d’une laïcité de l’État à une laïcité de la société. Je dis tout de suite ma propre position et ce sera le contenu de mon intervention : ce glissement me paraît indu. C’est l’État qui est laïc, ce n’est pas la société. Celle-ci est plurielle.”
“Il y a dix ans, on voulait donner aux musulmans ce qu’on avait donné aux catholiques, aux protestants et aux juifs (bâtiments, aumônerie…). Aujourd’hui, on restreindrait volontiers ce qu’on avait donné aux catholiques (ou ce à quoi ils avaient droit) pour ne pas le donner aux musulmans (création d’une aumônerie scolaire dans un collège, affichage dans un lycée, voile sur les photos d’identité). Il faut d’ailleurs noter que pour éviter de donner l’impression d’une discrimination religieuse vis-à-vis d’une religion, même si le problème est spécifique à cette religion, on prendra une mesure qui touchera toutes les religions, pour ne pas faire – dit-on – de discrimination envers une religion (par ex. l’interdiction de tout signe ostentatoire dans l’espace scolaire).”
Ce ne sont que deux passages, mais particulièrement significatifs, de l’intervention faite par le cardinal Ricard, archevêque de Bordeaux, lors d’une conférence prononcée au Centre Saint-Louis de Rome, le 27 septembre 2012, sur le thème de la laïcité.
En distinguant laïcité de l’État et laïcité de la société, le cardinal Ricard offre un angle intéressant permettant de concilier la séparation de l’Église et de l’État avec l’affirmation du lien privilégié qui doit continuer d’unir la société française et le catholicisme en dépit de la sécularisation qui nourrit “un processus d’éloignement de notre société vis-à-vis de sa référence chrétienne”.
On lira avec profit l’intégralité de la conférence de l’ancien président des évêques de France sur le site de l’agence Zenit.