Rosaura Almonte, 16 ans, est morte vendredi matin en République dominicaine des suites d’une leucémie. Celle que la presse appelait « Esperancita » pour protéger son identité était aussi enceinte. Elle a été victime d’une fausse couche spontanée la veille. C’est une histoire tragique – dont on veut faire un moteur pour en finir avec les lois qui protègent la vie de l’enfant à naître.
Pour la presse internationale, Rosaura est morte parce qu’au nom de la Constitution pro-vie de la République dominicaine, qui criminalise l’avortement, les médecins ont retardé la chimiothérapie qui aurait pu lui sauver la vie au détriment de celle de l’enfant qu’elle portait. « Elle est morte à cause de l’article 37 de la Constitution », hurlaient les féministes.
L’affaire est pourtant loin d’être aussi claire, ce qui peut se subodorer à la vue même des commentaires des féministes et des pro-avortement qui se plaignent aussi bien de ce que le traitement aurait été retardé que de ce que Rosaura n’ait pas obtenu « un avortement qui aurait pu lui sauver la vie ». Le Collectif Femme et santé ( « Mujer y Salud ») affirme en tout cas qu’elle n’a pas bénéficié d’un « avortement thérapeutique » et assure qu’elle a été victime d’un « acte de torture, cruel et inhumain ». La coordinatrice du Foro Feminista, Sergia Galvan, crie au « féminicide d’Etat ».
En vérité, la protection de l’être humain depuis sa conception jusqu’à sa mort naturelle, affirmée par l’article 37 de la Constitution dominicaine, proscrit forcément l’avortement thérapeutique. Mais on ne peut pas en dire autant d’une chimiothérapie qui peut indirectement et involontairement entraîner la mort d’un enfant à naître lorsqu’elle est administrée à une femme enceinte pour qui elle constitue le seul espoir de survie. Libre à elle de la refuser, héroïquement. Mais y avoir recours ne constitue pas – ni en morale ni en droit positif – un assassinat.
La jeune Rosaura a-t-elle été privée de traitements qui auraient pu lui sauver la vie, au nom de l’interdiction de l’avortement ?
En fait, elle est entrée à l’hôpital le 2 juillet, en très mauvais état. La nature précise de son cancer a été diagnostiquée le 19 juillet, a précisé la directrice de hôpital du Seguro Médico de Maestros lors d’une conférence de presse ce matin, entourée des médecins qui ont soigné la jeune fille. La chimiothérapie a démarré… le 20 juillet. Mais on savait déjà qu’il y avait peu d’espoir : « Le pronostic était très mauvais pour la patiente en raison de son âge, 16 ans, et parce qu’elle avait beaucoup de globules blancs et qu’elle était très anémiée. »
Alors, morte d’avoir été privée de chimiothérapie, comme le dit la presse ? Ou morte de ce qu’on lui ait refusé l’avortement, comme le disait aujourd’hui sa mère, Rosa Hernandez, à l’unisson de nombre de groupes féministes ? « Mujer y Salud » en est à se demander si la jeune fille n’est pas morte d’hémorragie utérine à la suite de sa fausse couche, vendredi, du fait de l’expulsion de « l’embryon » : la jeune fille était enceinte de trois mois, moyennant quoi l’association affirme qu’elle aura été victime des « défenseurs à outrance du droit du zygote à la vie ». (Pour mémoire : le zygote, dans le développement embryonnaire humain, est l’œuf pendant la première semaine de gestation ; on parle d’embryon jusqu’à la huitième semaine.)
En fait, l’état de la jeune fille s’est dégradé rapidement cette semaine : elle présentait des fièvres correspondant aux limites de la régénération du sang causées précisément par la chimiothérapie ; elle a reçu alors transfusions et plaquettes, selon le protocole habituel, mais n’a pas réagi à ce traitement. Elle a présenté des hémorragies du nez et du vagin qui ont provoqué son transfert en réanimation. Elle est morte de cette perte de sang, de détresse respiratoire, et c’est au cours de ce processus qu’elle a subi un avortement spontané.
Le cardinal Nicolas de Jesus Lopez, archevêque de Santo Domingo a rejeté les accusations qui visaient la loi pro-vie de la République dominicaine en affirmant :
« Ce sont des canailleries, des canailleries ! Peu importe qui l’ait dit, nous, nous défendons la vie humaine parce qu’il faut la défendre. Ainsi, dans ce cas précis, on a fait tout ce qui était humainement possible pour qu’elle puisse recevoir les plaquettes. Ils oublient que ce n’est pas la grossesse qui l’a tuée, mais très évidemment, un problème grave qu’elle avait : la leucémie. »
Il a invité les commentateurs à « être un peu plus honnêtes dans leur manière de raisonner ». Et d’ajouter que le fait de pratiquer un avortement sur la jeune fille n’aurait pas garanti sa survie.
Cela sent en effet la manipulation à plein nez et avec très peu d’efforts la presse internationale s’enflammera, à l’instar de CNN qui a publié un article confus, tirant sur la corde sensible, qui donnait ce matin la parole à Rosa Hernandez, la mère de Rosaura qui y déclare savoir que l’avortement est un péché, mais que la vie de sa fille devait passer d’abord. Encore un peu et ce sera une nouvelle « affaire de Recife »…
Il semble bien que tout a été fait, dans le cadre d’une bataille presque impossible à gagner, pour sauver la vie de Rosaura Almonte. Tout ce qui était humainement et médicalement possible. Avec l’aide de l’Eglise catholique qui a pris à sa charge nombre des traitements. Ne comptez pas sur la presse pour vous dire tout cela !
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