Cette information m’avait échappée, elle est pourtant très importante à connaître et ne semble pas avoir été traitée sur l’internet francophone ailleurs que sur les sites spécialisés : l’Organisation mondiale de la Santé a publié, le 6 juillet, ses nouvelles « directives techniques et stratégiques à l’intention des systèmes de santé » à propos de l’avortement médicalisé. C’est un catalogue complet des différentes méthodes d’avortement légal aujourd’hui pratiquées dans le monde, avec les recommandations de l’OMS pour que tout cela se passe pour le mieux. Voici le résumé de presse tel qu’il a paru sur le site de l’OMS :
Pratiqué dans de mauvaises conditions, l’avortement tue. Beaucoup d’efforts ont été consentis pour améliorer les services abortifs dans la Région européenne, mais les avortements non médicalisés provoquent toujours jusqu’à 30 % des décès maternels dans certains pays d’Europe de l’Est et d’Asie centrale. L’OMS a publié la deuxième édition de « Safe abortion: technical and policy guidance for health systems » (Avortement médicalisé : directives techniques et stratégiques à l’intention des systèmes de santé).
En 2008, selon les estimations de l’OMS, quelque 360 000 avortements non médicalisés ont été pratiqués en Europe de l’Est. Les chiffres correspondants dans d’autres parties de la Région étaient négligeables. En Europe de l’Est, 11 % des décès maternels (en moyenne) peuvent être attribués à des avortements à risque.
Principes directeurs pour un avortement médicalisé
Ces nouveaux principes directeurs, qui constituent une actualisation de la première édition de 2003, dispensent aux décideurs politiques, aux gestionnaires de programmes et aux pourvoyeurs de services de santé les plus récents préceptes sur les soins cliniques, basés sur des données probantes. Ils comprennent également des informations sur la manière de mettre en place et de renforcer des services de soins complets pour avortements médicalisés, et adoptent vis-à-vis des lois et politiques en la matière une attitude fondée sur les droits de l’homme.
Les recommandations actualisées de l’OMS reflètent les changements survenus dans les méthodes abortives et les soins apportés en cas d’avortement, ainsi que dans la façon de dispenser les services. En effet, elles s’appliquent à l’existence et à l’emploi de nouvelles méthodes. Elles comprennent aussi les informations les plus récentes sur l’ampleur du problème de l’avortement non médicalisé.
La réponse de l’OMS au « problème de l’avortement non médicalisé » est bien évidemment de prôner l’avortement médicalisé – les anglophones disent « avortement sûr » ou « avortement sans danger » – en balayant une à une toutes les objections à l’avortement. Le document s’achève d’ailleurs sur la manière de réagir face aux multiples « obstacles » à l’avortement et appelle discrètement à a mise en œuvre d’une « politique globale » jugée pour l’instant d’« application difficile »…
Sans omettre de faire la propagande pour l’avortement médicalisé, l’OMS ne va pas jusqu’à recommander de contourner la loi, puisqu’elle s’inscrit dans la logique de ce dont avaient convenu les gouvernements lors d’une séance extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies en 1999 :
« Dans les cas où il n’est pas interdit par la loi, les services de santé devraient former les prestataires de soins de santé et les équiper et devraient prendre d’autres mesures pour que l’avortement soit alors pratiqué dans de bonnes conditions de sécurité et soit accessible. Des mesures supplémentaires devraient être prises pour préserver la santé des femmes. »
Le texte complet des directives techniques se trouve ici.
On y apprend par exemple que, selon l’estimation de l’OMS, 22 % des grossesses sont « interrompues » chaque année, soit sur 210 millions de grossesses, 46 millions d’avortements, dont la moitié sont illégaux. Et que même, citant des chiffres de l’institut de recherche pro-avortement Allan Guttmacher, « dans le monde, la grande majorité des femmes auront vraisemblablement recours à au moins un avortement avant d’avoir atteint l’âge de 45 ans », ce qui est à la fois incroyablement fataliste et aussi trompeur car un tel chiffre suggère qu’il s’agit d’une conduite largement majoritaire et donc normale.
Le saviez-vous ? Il y aura toujours des avortements parce que même utilisée de façon optimale, les échecs de contraception donneraient lieu à « 6 millions de grossesses accidentelles par an » ; mieux, un « changement survenu dans la vie, tel qu’un divorce ou toute autre crise, peut transformer une grossesse désirée en grossesse non désirée » (sic), raison retenue notamment pour des avortements tardifs, après 12 semaines d’aménorrhée.
L’avortement médicalisé est « une des interventions médicales les plus sûres », il a une foule de qualités que l’OMS énumère, comme celle d’épargner le coût des soins à la suite d’avortements « pratiqués dans de mauvaises conditions de sécurité ».
Tout au long des directives, riches de plus de 100 pages, il n’est pour ainsi dire jamais question de l’embryon, du fœtus, de l’enfant à naître dans le cadre d’un avortement, mais des « produits de la conception » : Le fœtus est évoqué une fois comme produit d’un avortement chirurgical, le reste du temps il n’est question que de fœtus malformés qui peuvent ouvrir droit à l’avortement légal. Après « 6 semaines de grossesse complètes », l’OMS recommande ainsi de rechercher la présence de « villosités chorioniques » (tissus qui produiront le placenta) pour s’assurer que l’avortement a réussi et qu’il n’y a pas de grossesse ectopique.
Voici une photo d’embryon à sept semaines, entouré de ces fameuses « villosités » :
L’OMS recommande l’avortement chimique jusqu’à 9 semaines d’aménorrhée, l’aspiration jusqu’à 12, puis, jusqu’à 22 semaines, la dilatation-évacuation ou l’avortement chimique par mifépristone et utilisation répétée de misoprostol (Cytotec) alors même que l’utilisation tardive de cette molécule aux fins d’avortement est fréquemment déconseillée. Mais le Cytotec est facile à obtenir et la méthode est peu coûteuse, va donc pour les pays pauvres…
Bien sûr l’OMS ne reconnaît guère de séquelles à long terme de l’avortement (même si elle estime nécessaire un accompagnement psychologique pour les avortements de deuxième trimestre), et pour ce qui est des stress post-traumatique, des difficultés psychologiques largement documentés, l’OMS les balaie rapidement : « Des séquelles psychologiques négatives surviennent chez un très petit nombre de femmes, dans le cadre de ce qui semble être des affections préexistantes. »
Après de longs discours sur l’information, l’accessibilité et le bon accueil qui doit être fait aux femmes voulant subir un avortement légal, l’OMS évoque l’objection de conscience en termes bien restrictifs :
« Les agents de santé ont le droit d’objecter en conscience à la pratique de l’avortement, mais ils ont l’obligation de suivre les codes d’éthique professionnelle, qui exigent qu’ils orientent les patientes vers des collègues qualifiés qui ne sont pas, par principe, opposés à une interruption de grossesse autorisée par la loi. Si aucun opérateur ne peut le remplacer, l’agent de santé doit pratiquer l’avortement pour sauver la vie de la femme ou pour éviter de nuire durablement à sa santé, en accord avec les lois nationales. »
Tous les pays où l’avortement est autorisé sont invités à consacrer une part de leur budget à cette activité peu onéreuse :
« Le surcoût qu’implique la mise en place de ces services pour les femmes y ayant droit sera vraisemblablement modeste en regard des avantages qu’ils présentent pour la santé des femmes. La plupart des budgets de santé nationaux devraient pouvoir supporter cette dépense. »
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