En aura-t-on fini un jour avec Joseph Staline, le « petit père des peuples » ? À en croire le livre que viennent de faire paraître Mathilde Aycard et Pierre Vallaud, cette heure n’est pas encore arrivée.
Dans Russie, révolutions et stalinisme, 1905-1953 (L’Archipel, 354 pages, 24€), les auteurs terminent leur introduction en citant deux manuels scolaires russes récemment édités. L’ère stalinienne y est présentée comme une période de modernisation, « durant laquelle l’URSS, “forteresse assiégée”, a dû se transformer d’une manière extrêmement rapide ; il a fallu utiliser la “violence et la contrainte” », mais, au total, Staline a fait plus de bien que de mal. Si l’on évoque bien la famine des années 1932-1933, c’est pour la mettre sur le compte des mauvaises conditions climatiques et du manque d’achèvement de la collectivisation. Visiblement, aujourd’hui encore, Staline n’est pas mort et il fascine quand il n’est pas tout simplement réhabilité.
Ce constat a donc conduit les deux auteurs à reprendre ce dossier, tentant de présenter à l’aide de documents, cartes, photographies (deux cahiers) une synthèse sur les terribles années Staline. Répressions par catégories sociales, éliminations des adversaires, goulag, purges, procès, assassinats, autant de moyens d’aborder cette grande terreur stalinienne.
L’originalité des auteurs est de commencer leur synthèse à 1905 et de replacer ainsi Staline dans le cadre plus général de la révolution communiste russe et de l’établissement du pouvoir du parti puis de son maintien.
Malgré l’intérêt évident de ce livre, par les documents qu’il présente et son effort de synthèse, on regrettera certains jugements comme celui de vouloir sauver la théorie marxiste sous prétexte que ni Lénine, ni Staline ne l’ont appliquée. Après un Staline pas mort, c’est un Marx toujours vivant qu’il faudrait envisager…
en somme les bénéficiaires de Staline sont ceux qui ont survécu à la famine au goulag à la discrimination sociale, à la guerre, qui ont bénéficié de la corruption, des coups de chance de ne pas être compromis avec des “ennemis publics”; c’est tout un art