L’évêque, désormais émérite d’Erie (Pennsylvanie), avait été enterré de son vivant par L’Osservatore Romano qui avait annoncé en 2007 son décès en lieu et place de celui de son prédécesseur, mais comme je l’écrivais en 2009, « il n’empêche que, liturgiquement parlant, la vie de Mgr Trautmann semble s’être arrêtée dans les années 1970 lors de la mise en application, à bien des égards désastreuse, de la réforme liturgique ». L’épiscope fut systématiquement et jusqu’au bout opposé aux nouvelles traductions du Missel romain et le fit hautement savoir avant même que l’assemblée plénière d’automne de l’épiscopat se prononce par un vote sur l’adoption des nouvelles traductions. J’avais trouvé à l’époque la “sortie” de Mgr Trautmann manquant de bonne manière et de “communion” avec ses frères évêques :
« [L’] ancien président du comité épiscopal sur la liturgie (heureusement rebaptisé après son départ : comité épiscopal pour le culte divin, savourez la nuance…), le 22 octobre dernier, dans une conférence donnée à la Catholic University of America (Washington, D.C.) a sévèrement critiqué la « servilité littéraliste » de la traduction anglaise du Missale Romanum… L’épiscope y a déclaré : « La grande majorité du peuple de Dieu réuni n’est pas familiarisée à des mots du nouveau missel comme “ineffable”, “consubstantiel”, “incarné”, “inviolé”, “oblation”, “ignominie”, “précurseur”, “effusion” et “invaincu”. Le vocabulaire n’est pas facilement compréhensible par le catholique moyen. » Mgr Trautmann reconnaît donc l’effondrement culturel et l’incompréhension lexicale qui sont les conséquences tangibles de l’application de la réforme liturgique aux États-Unis – et auquel il a donné la main compte tenu de ses fonctions –, puisque des concepts et des expressions compréhensibles par tous pendant des siècles sont devenus si obscurs qu’aucun « catholique moyen » n’est capable d’en saisir le sens… Bel aveu pour l’ancien patron de la liturgie de la conférence épiscopale ! Il poursuit, avec cette mauvaise foi dont l’expression est assez familière à nos oreilles françaises depuis quarante ans : « La constitution [de Vatican II] sur la Liturgie sacrée a préconisé l’usage de la langue vernaculaire, pas d’un langage sacré » : c’est évidemment tout le contraire qui est contenu dans cette constitution ! « Jésus a-t-il jamais parlé aux gens de son époque avec des mots au-delà de leur compréhension ? Jésus a-t-il jamais utilisé des termes ou des expressions au-delà de la compréhension de ses auditeurs ? » C’est évidemment faux : bien des paroles du Seigneur passèrent par-dessus la tête de ses propres apôtres, pour ne pas parler des israélites ordinaires de son temps : cet avilissement de l’intelligence, ce mépris envers les plus pauvres en esprit supposés être incapable de saisir une expression aussi simple, profonde, quoi que mystérieuse, comme “consubstantiel, n’est pas digne d’un évêque supposé détenir un munus docendi. Mgr Trautmann prend ses auditeurs pour des imbéciles, à moins qu’il ne cherche à s’auto justifier. On n’argumentera pas davantage devant une telle mauvaise foi, et une telle obstination à refuser les instructions romaines sur la Sainte Liturgie. Mais tout cela n’est pas trop grave en vérité : Mgr Trautmann est mort dans les années 1970. Mais il ne le sait pas. »
Mon commentaire aura semblé, à l’époque, un peu sévère, mais la suite lui donna raison. En effet, l’évêque Trautmann lutta jusqu’au bout contre les nouvelles traductions (voir ici) qui furent pourtant adoptées par une écrasante majorité d’évêques américains. Cette obstination lui valut, indirectement, une allusion de Benoît XVI (voir là… Je sais, j’exagérais un peu, mais allez savoir…).
Hier donc, le pape Benoît XVI a mis un terme à l’épiscopat de Mgr Trautmann à la tête de ce diocèse de Pennsylvanie et a nommé pour lui succéder comme dixième évêque d’Erie Monseigneur Lawrence T. Persico qui sera ordonné évêque en la cathédrale St. Peter le 1er octobre prochain.
Le nouvel évêque nommé est un Pennsylvanien puisqu’il est né à Monessen dans cet État le 21 novembre 1950 mais fut ordonné prêtre pour le diocèse de Greensburg (Pennsylvanie) le 30 avril 1970. Il était, au jour de sa nomination, vicaire général du diocèse de Greensburg, modérateur de sa curie et chancelier du diocèse. Licencié en théologie, l’évêque nommé est chevalier de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem et membre à titre particulier de l’Ordre des Fils de l’Italie en Amérique (grande loge de Pennsylvanie, rien à voir avec la franc-maçonnerie).
Le diocèse d’Erie couvre 25 734 km2 (13 comtés). Sa population s’élève à 860 000 habitants dont 224 000 catholiques (un peu plus de 74 000 familles enregistrées) servis par 193 prêtres diocésains et 61 diacres permanents.
Il ressemble à Jean Rochefort; est ce la raison de ses traductions “à ma guise” ?