Chiara Corbella |
Ils étaient radieux, rayonnants de joie lorsqu’ils ont pu parler au Pape, début mai, à la fin d’une audience du mercredi. Chiara et Enrico Petrillo Corbella étaient venus lui présenter leur petit Francesco, né il y a un peu plus d’un an. Et dire que Chiara allait mourir. Bientôt. Car elle avait refusé les traitements lourds qui auraient pu la sauver d’un cancer très agressif pour ne pas risquer de porter atteinte à la vie de leur troisième enfant. Benoît XVI en avait été profondément ému, caressant l’enfant, les touchant avec tendresse.
Chiara est morte le 13 juin. Dans la paix de Dieu qui dépasse toute intelligence.
Ses obsèques ont été célébrées en l’église Sainte-Françoise-Romaine de Rome, le 16 juin, par le vicaire général de Rome, le cardinal Vallini. Il a souligné combien l’histoire de Chiara ressemblait à celle de sainte Gianna Beretta-Molla qui s’est sacrifiée pour laisser vivre sa fille Gianna, aujourd’hui une ambassadrice émouvante du respect de la vie.
Le mariage et la vie de Chiara et Enrico, membres d’une paroisse fransiscaine, ont été profondément marqués par le pontificat de Jean-Paul II. Et leur union est devenue un véritable Evangile de la Vie. Leurs deux premiers enfants, Maria et David, étaient atteints de malformations graves décelées in utero. Maria, atteinte d’anencéphalie, est morte 30 minutes après sa naissance. David, né sans jambes et avec de graves lésions internes, n’a vécu que quelques heures. Chiara et Enrico n’ont même pas songé à avorter : c’était la « solution » qui leur était proposée… Le couple allait bientôt témoigner dans les rencontres pro-vie de la beauté de ces petites vies respectées jusqu’au bout. Leur entourage leur disait d’attendre avant d’avoir un nouvel enfant. « Nous étions de plus en plus amoureux l’un de l’autre et de Jésus. Nous n’avons jamais été déçus par cet amour, nous n’avons jamais perdu de temps », devait confier Enrico après la mort de sa femme.
L’annonce d’une troisième grossesse où, cette fois, tout allait bien, fut vite assombrie, fin 2010, par un diagnostic de cancer particulièrement grave. Chiara et Enrico se trouvaient devant un dilemme tragique : accepter les traitements qui entraîneraient la mort de leur nouveau bébé – choix moralement acceptable, puisque cette mort ne serait ni recherchée ni désirée, ni directement provoquée – ou bien laisser filer le cancer, mais laisser naître l’enfant. Ils optèrent, ensemble, pour l’héroïsme.
Rapidement, Chiara allait perdre la vue dans un œil. Le cancer évoluait. Francesco est né le 30 mai 2011. Et sa jeune maman – 28 ans – se préparait à le quitter. Les traitements entamés dès la naissance ne feraient pas d’effet.
Une semaine avant sa mort, Chiara a écrit une lettre à son garçon. « Je vais au Ciel pour m’occuper de Maria et David. Toi, tu restes ici avec Papa. Je prierai pour toi. » Elle lui a écrit que Dieu l’avait voulu de toute éternité, qu’Il lui montrerait le chemin à suivre, que la joie de l’éternité nous est déjà donnée ici-bas.Enrico, lui, a beaucoup parlé de ses derniers mois et de ses derniers jours avec sa femme. Témoignant sur Radio Vatican, il livré ces mots magnifiques et courageux :
« C’était merveilleux de découvrir cet amour qui ne cessait de grandir face à tant de problèmes. (…) Le monde, aujourd’hui, encourage les gens à prendre de mauvaises décisions par rapport aux enfants à naître, aux malades, aux vieillards, mais le Seigneur répond avec des histoires comme la nôtre.
Nous sommes ceux qui aiment philosopher à propos de la vie, de qui l’a créée, et au bout nous nous laissons embrouiller jusqu’à vouloir devenir propriétaires de la vie, et échapper à la croix que le Seigneur nous donne. La vérité, c’est que la croix – si vous l’embrassez avec le Christ – cesse d’être aussi laide qu’elle la paraît. Si vous mettez votre confiance en lui, vous découvrez que ce feu, que cette croix ne brûlent pas, et qu’on peu trouver la paix dans la souffrance, et la joie dans la mort.
J’ai passé beaucoup de temps cette année à méditer la phrase de l’Evangile qui dit que le Christ donne une croix qui est douce et un fardeau léger. Lorsque je regardais Chiara sur le point de mourir, j’étais évidemment très triste. Mais j’ai rassemblé mon courage et quelques heures avant sa mort – il était huit heures du matin, et Chiara est morte à midi – j’ai osé lui demander.
J’ai dit : “Mais Clara, mon amour, cette croix est-elle vraiment douce, comme le dit le Seigneur ?” Elle m’a regardé et elle m’a souri, et d’une voix douce elle a dit : “Oui, Enrico, elle est très douce.” En ce sens la famille ne l’a pas vue mourir paisiblement, mais dans la joie, ce qui est complètement différent. »Lorsque son fils sera grand, a-t-il ajouté, il lui dira que « c’est merveilleux de se laisser aimer par Dieu, car lorsqu’on se sent aimé, on peut tout faire : c’est ce qu’il y a de plus important dans la vie, se laisser aimer afin d’aimer et de mourir heureux. »
« Je lui dirai que c’est ce que sa mère, Chiara, a fait. Elle s’est laissée aimer, et en un certain sens, je crois qu’elle aimait tout le monde de cette manière. Je la sens plus vivante que jamais. La voir mourir heureuse aura été pour moi un défi lancé à la mort. »
Enrico a expliqué enfin qu’ils avaient appris de leurs trois enfants qu’il n’y a pas de différence entre une vie qui dure 30 minutes et une vie qui dure 100 ans.
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