Procureur général de l’ordre des chartreux, à Rome, de 1946 à 1981, dom Porion est l’auteur notamment d’Amour et silence, un superbe petit livre de spiritualité. Il fit profession à la chartreuse de La Valsainte, en Suisse, en 1925, à l’âge de 26 ans.
Doyen honoraire de la Faculté de Lettres de l’Institut catholique de Paris, directeur du Centre de recherches et d’études de spiritualité (CRESC), Nathalie Nabert vient de réunir dans un fort volume (Lettres et écrits spirituels, Beauchesne, 608 pages, 59€ jusqu’au 31 décembre prochain) la correspondance de ce chartreux qui eut des responsabilités déterminantes au sein de son ordre juste après la guerre et dans la période si mouvementée du Concile et de l’après-Concile.
La publication de cette correspondance ne suit pas l’ordre chronologique. Elle est rassemblée en fonction du correspondant et un même sujet peut être plus ou moins abordé dans plusieurs textes séparés de plusieurs pages. Celles sur le Concile et l’après-Concile sont très intéressantes tant on y voit un religieux désireux à la fois d’être fidèle au magistère et de sauver la grande spécificité contemplative de son ordre. Les échanges avec le cardinal Journet et Jacques Maritain sont très éclairants ; ceux aux membres de l’ordre ne le sont pas moins. Bien que reclus par vocation, on s’aperçoit que dom Porion bénéficie d’une très haute culture et d’une très forte exigence intellectuelle. Le spirituel habite toujours en lui et modifie les vues de l’intellectuel. Il note la différence d’ailleurs en parlant du cardinal Journet qu’il a en très haute estime mais qui reste un théologien quand il s’occupe de théologie.
Facile à lire, très bien annoté, cet ouvrage est passionnant pour l’histoire de l’Église et de la spiritualité, pour les éclairages qu’il apporte, pour les conseils qu’il transporte, même pour aujourd’hui. Terminons sur un extrait d’une lettre de dom Porion :
Se féliciter mutuellement de la dernière formule mise au goût du jour est un lieu commun de la rhétorique religieuse post-conciliaire auquel chacun se croit presque obligé de sacrifier (p. 548).