Depuis qu’un jugement de la Cour suprême de Buenos Aires a posé le principe selon lequel on ne saurait exiger une décision judiciaire en vue de donner l’accès à l’avortement non punissable prévu en tant qu’exception par le code pénal argentin, beaucoup de provinces de cet Etat fédéral tardent à mettre en œuvre cette libéralisation. La décision date de deux mois ; si quelques provinces, comme Buenos Aires, La Rioja, Santiago des Estero, Santa Fé, Neuquen, et Chubut ont fixé des protocoles locaux pour déterminer la conduite des médecins et les assurer ainsi de l’impunité dans les cas nommés par l’article 86 du code pénal, le protocole tarde à être rendu obligatoire pour les hôpitaux publics, comme à Cordoba, voire à être mis en place.
Et de l’avis de la presse de gauche, c’est la faute de l’Eglise catholique qui fait pression sur les provinces.
La résistance se manifeste de plusieurs manières allant de l’atermoiement au refus pur et simple : de l’acceptation verbale de l’arrêt, non suivie d’effet, à l’affirmation de telle ou telle province qui se proclame « pro-vie ».
L’Eglise s’est mobilisée en effet. Avec une très grande clarté parfois. C’est le cas à Tucuman où l’archevêque, Mgr Alfredo Zecca, a réuni hommes politiques et législateurs pour déclarer : « Dans aucune circonstance nous n’accepterons que l’avortement soit autorisé. » Des évêques des provinces de Cuyo ont publié un communiqué commun affirmant : « Une femme qui a été violée mérite compréhension et accompagnement, mais sa blessure ne se guérit pas au moyen d’une plus grande injustice comme l’avortement. »
Dans la province de Corrientes c’est le gouverneur Colombo qui par décret, a déclaré la province « pro-vie », précisant que la politique de l’Etat est bien « la défense de la vie depuis la conception, comme de la famille » : il l’a signé lors d’une rencontre œcuménique rassemblant les évêques locaux ainsi que des pasteurs évangéliques.
Au niveau national, deux propositions de loi viennent d’être présentées au Congrès pour abroger les exceptions de dépénalisation de l’avortement ; ces textes visent à faciliter l’adoption des enfants conçus à l’issue d’un viol par exemple.
On sait que les associations féministes ont largement contribué à entretenir le débat et à fomenter les affaires judiciaires qui ont abouti il y a deux moins à la sentence de la Cour suprême.
On sait aussi combien les motifs de dépénalisation sont ambigus : la simple invocation d’un viol peut suffire, sans enquête policière ni poursuite pénale, ce qui est évidemment la porte ouverte à de nombreux abus dans l’abus – raison pour laquelle l’Eglise se mobilise aussi sur ce plan pour dénoncer le caractère trop large du texte et pour tenter d’éviter à tout le moins les avortements tardifs.
Aujourd’hui, ce sont les organisations féministes qui font pression dans le sens de la décision de la Cour suprême. Dix ONG ont entamé le mois dernier une démarche d’information auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations unies à propos de la situation des « droits sexuels et reproductifs » en Argentine pour exiger la mise en conformité de l’ensemble des services de santé argentins avec la décision. C’est bien devant l’ONU que ces organisations féministes sont allées réclamer l’élaboration, la reconnaissance et un statut légal pour un plan national d’un Guide technique des avortements non punissables afin que toutes les provinces l’adoptent au plus vite.
C’est la perpétuelle supercherie : présenter l’avortement légalisé comme faisant partie des « droits de la santé sexuelle et reproductive » pour l’étendre à tous les pays par le biais de traités internationaux, alors que l’avortement en a été et continue d’en être systématiquement exclu, grâce aux efforts des pays qui résistent.
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